On dirait une frontière interdite. Mais côté plage. Ancrée dans le sable, une première rangée de hautes palissades surmontées de caméras de surveillance. Puis une étroite piste pour les patrouilles de contrôle. Derrière, une autre épaisse ligne de barbelés. L’impénétrable zone tampon descend de la colline pour s’enfoncer peu à peu dans la mer. Un curieux ose s’approcher. Une voix jaillit aussitôt d’un des haut-parleurs du mur de fer. Elle lui ordonne, en japonais, de lâcher sa caméra et de s’éloigner de la palissade géante. La sécurité est à fleur de peau. Rien ne doit compromettre le prochain redémarrage de la plus grande centrale nucléaire du monde.
Sur le papier, les sept réacteurs de la centrale de Kashiwazaki-Kariwa, sur la côte nord-ouest du Japon, près de Niigata, totalisent une puissance installée de 8 200 mégawatts, soit l’équivalent de 5 EPR français. Mais le site de 4 km2, qui pourrait alimenter 13 millions de foyers japonais, est à l’arrêt depuis plus de douze ans. Trois de ses tranches ne produisent plus d’électricité depuis juillet 2007, à la suite du séisme de Chu-Etsu-Oki qui a provoqué un petit incendie et une fuite radioactive sur le site. Les quatre autres, qui avaient redémarré après cet incident, ont également été arrêtées après le séisme et le tsunami de 2011 à l’autre bout du pays, à Fukushima.