Comment la crise immobilière a fragilisé les finances des départements
En 2023, l’épargne nette des départements aura baissé de 5 milliards d’euros, souligne la Cour des comptes.
Le retournement du marché immobilier fragilise l’économie française bien au-delà du cas des promoteurs ou des ménages qui ne parviennent pas à se loger décemment : l’an dernier, les finances des départements français ont été affectées. Suite à la suppression de la taxe d’habitation sur les résidences principales en 2021 et de la quote-part départementale de la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) en 2023, les frais de notaire – en termes techniques, les DMTO – qui dépendent du nombre de transactions financières, sont devenus l’un des piliers des recettes de ces collectivités.L’exercice 2023 est marqué par une baisse sans précédent des recettes DMTO. Leur montant s’élève à 11,4 milliards d’euros, en baisse de 3,2 milliards, soit -21,9% par rapport à 2022. Après deux années de niveaux records (14,6 milliards en 2022), les recettes DMTO retrouvent ainsi leur niveau de 2019 (11,4 milliards)« , écrit la Cour des comptes dans son dernier rapport publié aujourd’hui.
Conséquence : la situation financière des départements s’est fortement dégradée en 2023 avec une baisse de leur épargne nette de près de 5 milliards d’euros. Une situation qui souligne, selon les magistrats de la Cour, « l’insuffisance du financement des charges de fonctionnement des départements, constituées principalement de dépenses sociales rigides et évolutives, par un impôt cyclique et volatil » Le taux normal du DMTO est en effet fixé à 3,8 %, mais les départements peuvent l’augmenter sans dépasser un plafond de 4,5 %. Ainsi, en 2023, tous les départements sauf l’Indre, le Morbihan et Mayotte ont appliqué le taux maximum, comme en 2022.
Ralentissement de la TVA
Pour compliquer encore la situation, la baisse des frais de notaire s’est complétée par une érosion de la TVA, devenue la première ressource des départements (28,7 % de leurs recettes réelles de fonctionnement en 2023). En effet, « depuis 2021, les départements collectent une fraction de TVA en compensation du produit de la taxe foncière sur les propriétés bâties (16,1 milliards d’euros en 2023) réaffectée aux communes en compensation de la suppression de la taxe d’habitation sur les résidences principales« , rappelle la Cour des comptes. Les régions aussi sortent affaiblies de 2023. En revanche, les communes s’en sortent très bien, souligne la Cour, avec des économies en hausse de plus d’un milliard d’euros.
La situation financière globale des collectivités locales n’inquiète pas la Cour des comptes, qui relève qu’en 2023 ces dernières ont poursuivi leurs dépenses d’investissement et que leur dette reste entièrement soutenable. Les magistrats appellent simplement à la vigilance alors que « la poursuite en 2024 de la baisse des recettes des DMTO, alors que leurs dépenses sociales augmentent en volume, fragilise notamment une vingtaine de départements« .