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comment Eric Ciotti a mis le feu aux Républicains en proposant une alliance avec le RN

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Cadres du parti Les Républicains, Olivier Marleix, Eric Ciotti et Bruno Retailleau, respectivement patrons des députés, du mouvement et des sénateurs, le 6 juillet 2023 à Paris.  (JACQUES WITT/SIPA)

Le président du parti de droite a annoncé mardi sa volonté de conclure un accord électoral avec le Rassemblement national en vue d’élections législatives anticipées, provoquant une crise interne aux proportions inédites.

Jusqu’au bout, ils n’ont pas voulu y croire. En attendant une intervention médiatique d’Eric Ciotti initialement prévue à 20 heures, les poids lourds des Républicains (LR) ont multiplié toute la matinée les déclarations pour rejeter tout accord électoral avec le Rassemblement national. Effort vain : le président du parti de droite a surpris tout le monde en avançant son interview au JT de 13 heures de TF1, mardi 11 juin, pour annoncer son souhait d’une alliance avec le parti de Marine Le Pen lors des élections législatives anticipées.

Sur le plateau, Eric Ciotti a plaidé pour « tous les députés LR sortants s’associer au RN pour préserver un groupe puissant à l’Assemblée nationale », saisissant la main tendue un peu plus tôt par Jordan Bardella. C’est la première fois qu’un président du parti de droite propose un accord avec le mouvement créé par Jean-Marie Le Pen. Cette alliance inédite a immédiatement déclenché une avalanche de condamnations, d’appels à la démission d’Eric Ciotti, et a même provoqué quelques départs.

« Ça bouge »lâche à franceinfo Virginie Duby-Muller, députée sortante de Haute-Savoie et vice-présidente de LR. « Je l’ai appris à la télé, comme tout le monde. C’est une décision individuelle, prise sans aucune consultation »murmure l’élue, qui se dit « déçu et en colère ». Elle avait certainement eu un doute la veille, lors de la réunion de groupe. « Eric Ciotti a pris la parole pour dire qu’on allait clarifier le fait qu’il n’y aurait pas d’alliance avec Emmanuel Macron. Un député lui a dit qu’il fallait aussi clarifier le refus d’une alliance avec le RN, et cela restait ambigu. »

Vingt-quatre heures plus tard, le député des Alpes-Maritimes sortait de l’ambiguïté en plaidant pour un accord « sur tout le territoire », afin de reconduire dans leurs fonctions les 61 députés LR sortants. Au sein du parti, on accuse le coup. « Personne ne le savait, il nous a marché sur toutes les têtes» déclare Emilie Bonnivard, députée sortante de Savoie. Sur le fond comme sur la forme, c’est un non-sens. Nous devons maintenir notre ligne d’indépendance, de droite gaulliste, qui résiste, même dans les moments difficiles. J.Je pense qu’il résiste très mal à la pression. »juge-t-elle, évoquant les bons scores obtenus par le RN à Nice (près de 38 %, quand LR atteint péniblement 9 %), où Eric Ciotti a été élu.

Le patron de LR estime que son parti est « trop ​​faible » pour aborder seul le vote provoqué par la dissolution de l’Assemblée nationale, au lendemain d’élections européennes qui ont vu LR chuter d’un point par rapport à 2019. « Dans ma circonscription aussi, le RN a de très bons scores, mais il ne faut pas aller manger à toutes les gamelles »tacle Emilie Bonnivard.

Moins de trois semaines avant le premier tour des élections législatives, le 30 juin, l’annonce d’Eric Ciotti fait imploser le parti. A tel point que certains ont annoncé qu’ils quittaient le mouvement en signe de protestation, comme le sénateur de Meurthe-et-Moselle Jean-François Husson, la sénatrice des Yvelines Sophie Primas ou encore le député du Cantal Vincent Descoeur.

Si Eric Ciotti apparaît désormais très isolé, de rares soutiens se font entendre. « Il fait le choix du bon sens et du couragesalue la députée des Alpes-Maritimes Christelle d’Intorni, proche du président des Républicains. Les électeurs veulent le droit de s’unir. Il a également reçu l’aval de son vice-président, Guilhem Carayon, porte-parole du parti et président des Jeunes Républicains. « Avec Eric Ciotti et des milliers de militants LR, nous faisons le choix du courage et du bon sens »il a écrit sur X. Fraîchement élue, l’eurodéputée Céline Imart a également partagé sur le réseau social son « plein soutien ». Mais la division attend aussi désormais le contingent de six eurodéputés LR, puisque la tête de liste François-Xavier Bellamy a de son côté rejeté une alliance avec le RN dans un communiqué.

Face à cette nouvelle guerre interne, la majorité des cadres et élus LR appellent Eric Ciotti à quitter la présidence du mouvement, qu’il a remportée fin 2022 lors d’un vote des adhérents. Mais l’intéressé refuse. « JEIl n’est absolument pas question pour moi de démissionner, d’autant que je sais que je bénéficie de la très large confiance des militants. »a-t-il assuré en quittant le plateau de TF1.

Le parti pourrait-il se retrouver complètement bloqué en pleine campagne électorale ? En interne, on réfléchit déjà au casse-tête d’une éventuelle procédure pour le déloger. « La situation ne peut pas rester telle quelle »a relevé Annie Genevard, secrétaire générale de LR, mardi sur franceinfo. Selon nos informations, une visioconférence doit réunir mardi soir les élus autour de trois ténors de la droite, Gérard Larcher, Laurent Wauquiez et Bruno Retailleau. L’avenir du président du parti sera notamment évoqué. « Cela devrait convoquer un bureau politique, mais seul le président a le pouvoir »soupire Virginie Duby-Muller. Un quart des membres de ce conseil national peuvent également exiger une telle réunion, qui pourra alors se tenir jusqu’à huit jours plus tard. Trop long toutefois, compte tenu de la date limite du 16 juin pour présenter des candidats aux élections législatives.

A défaut de pouvoir le sanctionner rapidement, les dirigeants ont choisi de multiplier les prises de parole et les tribunes. Le patron des sénateurs LR, Bruno Retailleau, a par exemple organisé une conférence de presse au cours de laquelle il a accusé Eric Ciotti de « déloyauté » et à avoir « il a menti, probablement pour son gain personnel ». Une dizaine de poids lourds du parti ont également publié un article dans Le Figaro d’affirmer que la position de leur président « C’est une impasse, ne t’engage pas (leur) famille politique et ne représente en aucun cas la ligne républicaine ». De quoi dissuader Eric Ciotti de saisir la main tendue du RN ?

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