comment des membres de « Saccage 2024 » infiltrent l’organisation des Jeux
Depuis des semaines, « Saccage 2024 » est présenté par les autorités comme un collectif « susceptible de perturber » le relais de la flamme olympique et l’organisation de la compétition. Les membres du collectif se défendent et estiment qu’ils sont « juste là pour diffuser leurs informations sur les JO ». Sélectionné comme bénévole pour les Jeux de Paris, Julien (prénom modifié) explique comment il a infiltré l’organisation et ce qu’il compte faire dans les semaines à venir pour faire passer son message.
Le 23 mars, à La Défense, des milliers de bénévoles se sont rassemblés pour la convention organisée par Paris 2024. Un rendez-vous qui rassemble les fidèles qui seront chargés d’organiser dans quelques semaines les Jeux olympiques en France. Au milieu de cette foule, des membres du collectif « Saccage 2024 » assistent au spectacle. Ils se nomment eux-mêmes les « involontaires ». Dans cette salle, les prises de parole se succèdent pour culminer avec la révélation des tenues des volontaires.
« Sur cette scène, il y avait quelques bizarreries qui essayaient de chauffer un peu la salle, commente Julien, membre du collectif. « Je pense que cette convention des bénévoles n’était pas du tout conçue pour les bénévoles. Elle était conçue pour faire des images pour la communication des Jeux. C’était ennuyeux au possible, avec plusieurs informations diffusées sur écran géant, mais les gens n’étaient pas ça ne m’intéresse pas du tout. »
Une « alerte » pour les bénévoles
Parfaitement infiltrés dans cette réunion, les membres de « Saccage 2024 » passent leur après-midi sans être repérés par les autorités et l’organisation. Au même moment, devant la salle de spectacle, des organisations syndicales déploient des tracts pour « alerter les bénévoles » sur « le volontariat et le travail caché » pendant les Jeux olympiques. Le collectif assure que les bénévoles « ont eu un retour plutôt positif sur le remorquage ». Mais au bout de quelques minutes, la police est intervenue pour stopper cette distribution. « Très forte répression policière », selon le collectif. Julien explique qu’il « craint une accélération de cette répression » à l’approche des Jeux olympiques.
Le tract distribué par les associations n’a pas vocation à être « conflictuel » avec les bénévoles. « On a juste envie de dire ‘attention’, c’est une alerte ou un point d’information syndical comme on peut le faire à l’entrée d’une entreprise », explique un membre de l’organisation. « Parfois, les gens sont un peu prudents et n’ont pas vraiment envie que les autres regardent s’ils ont pris le tract, mais devant la Défense, les volontaires étaient plutôt contents de voir leurs syndicats, c’est une chose positive. » Le collectif devrait réitérer ce type d’action en partenariat avec les syndicats dans les semaines à venir.
« C’est inquiétant, on était à côté de Tony Estanguet »
Depuis des mois, Gérald Darmanin fait connaître le collectif lors de ses conférences de presse sur les Jeux olympiques. À plusieurs reprises, le ministre de l’Intérieur a expliqué que le principal risque de perturbation est lié aux collectifs « écologistes d’ultra-gauche », citant « Rackage 2024 », « La Dernière Rénovation » et « Les Soulèvements de la Terre ». Les menaces sont prises très au sérieux par le Centre de renseignement olympique (CRO), chargé de croiser tous les services de renseignement. De nombreuses projections sont également proposées pour la compétition. Pour l’instant, les services de l’État ont exclu 800 personnes, dont 15 fichées S, sur les 180 000 contrôles effectués auprès des relayeurs ou bénévoles sélectionnés. Il reste encore plus de 800 000 personnes à contrôler.
Malgré toutes ces mesures, « Saccage 2024 » veille à ce que plus d’une centaine de personnes soient intégrées à l’organisation des Jeux Olympiques.
« Le dépistage est mauvais, il faut l’admettre », assure Julien. « Mais nous sommes un collectif qui cherche à assurer l’information et la diffusion en vue des Jeux de Paris et des Jeux de 2030. Le collectif a publié une courte vidéo humoristique sur le parcours de la flamme mais nous ne sommes pas dans « l’action. Nous n’allons pas opposer 20 agents du GIGN, ce n’est pas notre mode d’action ».
Le collectif a plaisanté sur ses réseaux sociaux en répétant que « Darmanin était l’un des rares spectateurs » de la vidéo. « Je trouve assez effrayant de voir que nos services de renseignement sont à ce point incapables de comprendre ce qui se passe », ajoute Julien. « Nous étions déjà deux personnes involontaires à la convention de mars, heureusement nous n’avions rien sur nous. »
« Saccage 2024 » n’a pas cherché à se regrouper au sein de la convention pour poursuivre ses actions dans les semaines à venir. « Mon sac a été fouillé, on aurait pu revenir avec une banderole sans problème », sourit Julien. « C’est inquiétant, nous avons été aux côtés de Tony Estanguet et de toute sa clique sans problème tout au long de la journée. »
Et maintenant?
D’autres groupes tenteront de perturber le trajet de la flamme sur le territoire français. « Saccage 2024 » assure que ce ne sera pas le cas et que son mode d’action est différent. Il n’y aura pas de consignes de groupe ni de centralisation de l’action, même s’il y aura de nombreuses discussions au sein du collectif. Un accompagnement pour les étudiants du Crous, qui perdront leur logement durant l’été, est également possible. Certains étudiants veulent lancer une mobilisation contre les réquisitions. « Nous les assisterons avec tous les moyens dont nous disposons », poursuit un membre du collectif. Et pendant les Jeux, Julien et les autres membres seront présents en tant que bénévoles. En fait, certaines personnes ne se présenteront pas lors des tests. D’autres, comme Julien, souhaitent obtenir le plus d’informations possible sur l’organisation des Jeux.
« Pour moi, très concrètement, ce que je veux faire, c’est regarder ce qui va se passer », ajoute ce membre de « Saccage 2024 ». « Y a-t-il vraiment un rapport de subordination ? Des menaces de sanctions ? Puis-je arriver en retard ? Plusieurs questions que je me pose pour voir les conditions de travail pendant les JO. Dans l’optique d' »aller aux prud’hommes ou d’aider d’autres camarades à faire appel aux tribunal des prud’hommes. Et puis si je suis fatigué, je peux aussi décider de ne pas me présenter parce que j’en ai le droit. » Et d’ajouter aux sujets des autres collectifs : « C’est utile d’être aussi dans l’action un peu plus contestataire. , si des camarades veulent faire les choses un peu plus mouvementées, on ne va pas leur dire non. » Autre sujet dans le viseur de « Saccage 2024 » : les Jeux d’hiver de 2030, organisés dans les Alpes.