Dans le cadre des Rencontres de Pétrarque, France Culture organise chaque soir un débat sur le thème de « l’Occident à l’épreuve ». Ce soir, Caroline Broué reçoit l’historienne Sophie Bessis, le politologue Olivier Roy et le député européen Sandro Gozi pour s’interroger ensemble : comment appelle-t-on l’Occident ?
La montée de l’extrême droite en Europe, signe clair du déclin ou, au contraire, de l’affirmation de l’Occident ?
Sandro Gozi, député européen Renew dénonce une «« attitude anti-occidentale » : « L’extrême droite fait un très mauvais usage de l’idée de l’Occident. L’Occident a toujours été universaliste et innovant. Le message de l’extrême droite, qu’elle s’appelle Giorgia Meloni, Victor Orban ou Marine Le Pen, c’est ‘comme c’était mieux avant’. Il y a toujours un rappel d’un passé mythique qu’on ne retrouve plus. » Le député poursuit : « Alors je me demande, à quoi correspond cet avant ? Avant que les femmes aient le droit de vote ? Avant qu’on reconnaisse le droit à l’avortement ? Avant qu’on reconnaisse les droits des minorités ? Ce passé qui est sans cesse rappelé par l’extrême droite pour justifier sa proposition politique est, pour moi, très anti-occidental, très anti-européen. »
Sophie Bessis, historienne et politologue franco-tunisienne, ajoute : « Je voudrais reprendre ce rapport Front National-Extrême Droite-Ouest. Je pense que c’est quelque chose de très intéressant. Les intellectuels organiques de l’extrême droite, on peut reprendre la revue ‘Élément’, ont toujours valorisé le terme Occident. Il ne faut pas oublier qu’un des mouvements les plus radicaux, de la galaxie d’extrême droite française, s’appelle le mouvement Occident, c’est quand même quelque chose de très important. L’extrême droite, en particulier l’extrême droite française, a pour objectif la défense de cet Occident, la seule différence entre eux ce sont les périodes, cet Occident défendu par l’extrême droite a changé de figures, de périmètres et de frontières au fil des âges ».
Olivier Roy, chercheur au CNRS, directeur d’études à l’EHESS, professeur à l’Institut universitaire européen de Florence, spécialiste des rapports entre politique et religion, en islam, auteur de nombreux ouvrages, conclut : « Le thème essentiel mis en avant par Jordan Bardella, c’était l’immigration et l’intégration. Comme si, en 40 ans, au fond, on était confronté au même problème d’incapacité à s’intégrer. Pourtant, la société française a considérablement changé. On assiste aujourd’hui à la montée des classes moyennes issues de l’immigration, à la montée des élites issues de l’immigration, et à un certain métissage, dans tous les sens du terme, de la société française. On est dans une société qui, finalement, est dynamique, et qui a montré, pour moi, sa capacité d’intégration. Revenir à ce discours d’il y a 40 ans, c’est nier ce qui s’est passé pendant 40 ans, ou le voir comme le mal absolu, évidemment. C’est revenir à un passé qui n’a… jamais vraiment été satisfaisant. »
Carbone 14, le magazine de l’archéologie
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L’Occident entre réalité géographique et culturelle ?
Sophie Bessis, auteur de L’Occident et les autres, une histoire de suprématie (La Découverte en 2003) rend compte d’une construction historio-géographique de l’Occident.
Pour Sandro Gozi, l’Occident n’est pas une entité géographique, mais plutôt un socle de valeurs connues et reconnues dont les origines remontent à l’Antiquité, autour des collines de l’Acropole, du Capitole et du Golgotha. Le député européen aborde également les cas de la Russie et de la Turquie pour démontrer le caractère ambigu de l’Europe en tant que territoire.
Olivier Roy, pour sa part, évoque l’unité religieuse de l’Occident médiéval, il déclare : « L’Église catholique a inventé la première bureaucratie européenne. »
