VExiste-t-il un seul exemple du retard technologique et industriel de la Russie par rapport aux États-Unis, à l’Europe et maintenant à la Chine ? Prenons simplement celui de l’aéronautique civile. Son président, Vladimir Poutine, gonfle le torse, mais depuis la chute de l’URSS, son pays est incapable de produire en grande quantité des avions commerciaux fiables – et encore moins exportables. Alors que le territoire russe s’étend sur onze fuseaux horaires et que le transport aérien y est vital, 95 % des Russes voyagent en Boeing ou en Airbus.
Le gouvernement claironne depuis des années sa volonté de mettre fin à cette dépendance, sans trop crier sur tous les toits qu’il y est contraint par les sanctions qui frappent la Russie depuis son invasion de l’Ukraine en février 2022.
La holding publique OAK a annoncé, lundi 25 novembre, « prendre le contrôle direct de la gestion du programme » des constructeurs aéronautiques Yakovlev et Tupolev, ainsi que le licenciement de leurs patrons. L’entreprise doit « importations de substitution » Et « lancer la production en série d’avions de ligne civils nationaux dans un délai serré et sans précédent ».
Cannibalisation d’anciens appareils
Comme à l’époque du Gosplan soviétique, Poutine s’est fixé des objectifs irréalistes. Même si Boeing et Airbus ne peuvent pas suivre le rythme en raison des tensions sur leurs marchés, « chaîne d’approvisionnement »Comment une industrie sous sanctions pourrait-elle suivre le rythme ? Moscou ne parvient pas à développer en grande quantité son avion Sukhoi SJ-100 de 100 places ; Le MC-21 d’Irkut, censé concurrencer l’A320 et le Boeing 737, n’est pas certifié ; quelques Tupolev 214 sortent des usines, mais leur conception date de la fin des années 1980 ; et il a dû abandonner le développement du CR919 long-courrier avec les Chinois.
Il y a pourtant urgence. L’âge moyen de la flotte de 1 000 appareils augmente (14,6 ans) et sa maintenance est de plus en plus difficile en raison du manque de pièces de rechange et de mises à jour logicielles. A ce jour, 34 des 66 A320-A321neo sont inutilisables, selon le journal Kommersant. Au rythme de la cannibalisation des vieux avions pour en maintenir d’autres en état de voler, la moitié sera clouée au sol d’ici un an, calcule le cabinet Oliver Wyman. Même s’il n’y a pas eu de catastrophe, les incidents se sont multipliés au cours des deux dernières années et demie. L’aéronautique est un secteur de très haute technologie où la sécurité prime sur toute autre considération. Il est plus facile de remplacer les yaourts Danone ou les hamburgers McDonald’s que les avions Airbus.