combien vaut le navigateur, qui peut l’acheter et que serait Google sans lui ?
Le ministère américain de la Justice recommande au géant de Mountain View de se départir de son navigateur Chrome, afin de briser son monopole sur la recherche en ligne. La justice tranchera en août 2025.
Le gouvernement américain réclame la vente du navigateur internet Chrome par Google pour limiter son avantage concurrentiel, une opération qui bouleverserait le géant de la recherche, à condition qu’un ou plusieurs repreneurs se manifestent. Le ministère américain de la Justice a recommandé mercredi cette mesure au juge fédéral de Washington qui doit se prononcer l’année prochaine sur la condamnation de Google, reconnu coupable de pratiques anticoncurrentielles dans la recherche en ligne.
Quel serait l’impact pour Google ?
« Ce serait un coup dur pour Google qui changerait drastiquement son modèle économique »estime Dan Ives, analyste chez Wedbush Securities. « Cela les priverait d’un portail internet majeur, à partir duquel ils obtiennent beaucoup d’informations qu’ils peuvent utiliser pour entraîner leurs algorithmes et renforcer leur activité de recherche »explique Beth Egan, professeur de publicité à l’Université de Syracuse. Lancé en 2008, Chrome capte désormais près de 70 % du marché des navigateurs, qui a vu la part d’Explorer et Edge, les deux produits de Microsoft, passer de plus de 60 % à moins de 5 %.
Malgré tout, les observateurs ne voient pas dans cette éventuelle vente la menace d’une crise existentielle pour Google. Beth Egan fait un parallèle avec la limitation drastique par Apple et son navigateur Safari de « cookies »des marqueurs qui permettent aux entreprises de retracer le parcours d’un internaute sur le web. « Les annonceurs se sont dit : on a un angle mort, mais on va y arriver »elle se souvient. « Et Google fera la même chose. »
Combien vaut Chrome ?
Un analyste de l’agence Bloomberg estime le prix de vente du navigateur, qui compte plus de trois milliards d’utilisateurs, à au moins 15 milliards de dollars. L’absence de précédent significatif rend néanmoins toute estimation difficile. En 2016, la société norvégienne Opera Software ASA a vendu son navigateur à un groupe d’investisseurs chinois pour 600 millions de dollars, mais à l’époque elle ne revendiquait que 350 millions d’utilisateurs mensuels.
Quels acheteurs potentiels ?
« Il n’y a vraiment pas beaucoup d’acheteurs potentiels de Chrome »déclare Evelyn Mitchell-Wolf, du cabinet Emarketer. Par ailleurs, ajoute l’analyste, « il est probable que toutes les entreprises qui en ont les moyens soient déjà sous surveillance des autorités de la concurrence ». « Je ne vois pas qui peut l’acheter sans créer un nouveau problème de concurrence »est d’accord Beth Egan.
Pour Evelyn Mitchell-Wolf, le gouvernement américain pourrait néanmoins autoriser un groupe américain à acquérir le navigateur « donner la priorité à l’innovation dans l’IA (intelligence artificielle) et positionner les États-Unis à l’échelle mondiale » sur cette nouvelle technologie.
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Cela profiterait-il à d’autres navigateurs ?
« Si Chrome est séparé (de Google) et adopte un autre moteur par défaut, le volume de recherche migrera vers cette plate-forme et y restera tant que la qualité ne se détériorera pas de manière significative »réduire la part de marché de Google, prédit Evelyn Mitchell-Wolf. Cependant, prévient-elle, cela suppose que le nouveau propriétaire continue d’investir et d’innover dans Chrome. « Le ministère de la Justice estime que les gens utilisent Google parce que c’est le moteur de recherche (Chrome) par défaut » et prévoit que si le choix est laissé aux utilisateurs, « Ils en prendront un autre, mais cela me paraît improbable ».
Quelle sera la position de l’administration Trump ?
Beaucoup s’attendent déjà à ce que le juge Amit Mehta ne suive pas les recommandations du gouvernement américain concernant Chrome. Pour Angelo Zino, du cabinet CFRA, ces mesures sont « extrême et ne devrait pas être imposé par le tribunal ». En outre, la perspective d’une entrée en fonction de la nouvelle administration Trump fin janvier, « C’est un farceur »selon l’analyste.
En octobre, Donald Trump avait laissé entendre qu’il n’était pas favorable au démantèlement de Google, estimant qu’une scission serait pénalisante pour les Etats-Unis à l’international. « La Chine a peur de Google »a-t-il déclaré, tout en se montrant très critique à l’égard du groupe californien.