« Combien de personnes ont été condamnées en France pour homosexualité ? »

LMercredi 22 novembre, un projet de loi relatif aux milliers d’hommes et de femmes condamnés pour homosexualité par la France jusqu’en 1982 sera discuté au Sénat. Si cette loi devait être approuvée par le Parlement, la France allouerait une allocation à chaque victime qui demande une indemnisation à une commission ad hoc.
A cette date, une inconnue demeure : combien de personnes ont été condamnées en France pour homosexualité ?
Déposé le 6 août 2022 à l’initiative du sénateur Hussein Bourgi (PS), le projet de loi fait écho à la célébration par Elisabeth Borne, le 4 août de la même année, de « quarante ans depuis la fin de toute répression de l’homosexualité dans le droit pénal français ».
Le Premier Ministre a rappelé à cette occasion que, aux heures les plus sombres de la Seconde Guerre mondiale, le 6 août 1942, notre pays avait de nouveau introduit dans son code pénal la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle : l’article 331.3 qui réprimait les actes « impudique et contre nature » avec un mineur du même sexe.
Disgrâce, licenciement, rupture des liens familiaux
Puis, en 1960, l’homosexualité a été catégorisée comme une « un mal social »augmentant ainsi les sanctions encourues pour outrage public à la pudeur « contre nature avec un individu du même sexe » (article 330.2). Concrètement, deux femmes ou deux hommes mutuellement consentants risquaient une peine de trois ans de prison, accompagnée d’une amende de 15 000 francs (soit environ 25 000 euros aujourd’hui).
Voués au silence, les victimes de cette répression sont certes nombreuses mais difficiles à retrouver. Seuls quelques-uns, rares, ont accepté de témoigner et de raconter ce que signifiait une condamnation pour homosexualité : opprobre, licenciement, rupture des liens familiaux, voire « mort sociale ».
De plus, jusqu’à présent, personne n’est en mesure de répondre objectivement à la question : « Combien de personnes ont été reconnues coupables d’homosexualité ? »
Même le ministère de la Justice, bien qu’enclin à produire des chiffres, n’a pas la réponse. Seule certitude : selon les comptes généraux de la justice en France, 9 566 peines de prison et amendes ont été prononcées pour des « délits d’homosexualité » (article 331.3) entre 1945 et 1978. Toutefois, les chiffres des années 1942 à 1945 et 1978 à 1982 qui ne sont pas signalés.
Malgré ces lacunes et grâce aux statistiques judiciaires, quelques grandes lignes se dessinent : toutes les catégories sociales de la société sont représentées en matière de délits d’homosexualité, un tiers des condamnés étaient mariés et un quart étaient parents. Les condamnations au titre de l’article 331.3 ne sont cependant qu’une des modalités de la répression pénale de l’homosexualité.
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