Colère, recours au 49.3, budget, moins de jours fériés… les réponses de Michel Barnier à Ouest-France
Où est Michel Barnier, soixante-dix jours après son entrée à Matignon ? Débats épiques au Parlement sur le budget, révolte des élus locaux, colère agricole, grèves, fermetures d’usines… Finances, industrie, agriculture, environnement, santé, sécurité, démocratie : le Premier ministre répond aux questions deOuest de la France sur ses enjeux à court terme et les projets qu’elle compte mettre en œuvre pour durer. Son objectif ? « Sans baguette magique ni gimmick, améliorer le quotidien des Français. »
Il en profite pour résumer sa méthode : « Il faut comprendre que je ne me suis pas roulé par terre pour être Premier ministre. J’étais prêt, disponible, mais je ne demandais pas. J’ai accepté en me disant que je pouvais être utile. Avec ma méthode. J’essaie de rétablir le calme et le respect partout. Le respect n’est pas un gadget, c’est une condition de réussite. »
Un 49-3 pour le budget ? » Probablement «
Le volet recettes du projet de loi de finances a été largement rejeté mardi à l’Assemblée nationale par les députés macronistes, de droite et d’extrême droite. Aurons-nous un budget avant la fin de l’année ?
Bien sûr nous aurons un budget pour 2025, c’est l’objectif ! Mais un budget sérieux et responsable, non faussé comme à l’Assemblée, dans sa partie recettes par des votes improbables. Nous prendrons en compte les idées de tous les groupes, notamment des quatre de la base commune qui m’accompagnent : Ensemble pour la République, le MoDem, Horizons et la Droite Républicaine. Sans oublier évidemment le Sénat, qui dispose d’une majorité favorable au gouvernement.
Pourriez-vous reprendre les amendements du Nouveau Front populaire, qui avait largement remanié le texte ?
Je ne l’exclus pour aucun groupe. Nous examinerons toutes les propositions susceptibles de faire progresser, sans remettre en cause l’équilibre général du projet de loi de finances. Il est dans l’intérêt du pays de réduire cette énorme dette qui pèse sur nos enfants et petits-enfants.
Au final, vous serez obligé de déclencher 49-3…
Probablement. Quand je vois ce qui s’est passé à l’Assemblée, il me semble difficile de faire autrement à l’issue du débat. Mais vous constaterez que nous avons choisi de laisser le débat se dérouler là-bas.
Dans ce budget, vous demandez un effort important aux autorités locales. Allez-vous le maintenir face à la colère des élus locaux, notamment des présidents de département, que vous rencontrez à Angers ce vendredi ?
Ce budget a été construit en deux semaines avec l’impératif de réduire le déficit de 60 milliards. Jamais en soixante ans un gouvernement n’a eu de telles contraintes. Ce projet de loi de finances peut être amélioré. Je n’ai pas de tabous. Ce qui m’importe, c’est l’équilibre général qui limitera cette dette insupportable. Or, une partie de notre dette est constituée d’emprunts contractés par les collectivités locales. C’est pourquoi j’appelle tout le monde à participer à cet effort.
Collectivités : « Des ajustements budgétaires importants »
Quelles propositions ferez-vous aux présidents de département ?
Les départements n’ont plus de pouvoir fiscal, mais ont limité les dépenses, notamment sociales, qui augmentent. Je veux leur dire que nous allons prendre en compte cette très forte spécificité, et cela entraînera des ajustements importants au projet de loi. financement du côté des collectivités locales. J’ajouterai que le projet que nous allons lancer autour d’une allocation sociale unique doit permettre de réduire le poids des dépenses sociales supportées par les départements.
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Faut-il garder les départements ?
J’ai été conseiller départemental et j’ai présidé un département, celui de la Savoie, pendant 17 ans et je connais le rôle essentiel de proximité et d’identité qu’il joue pour les Français. Les communautés doivent être davantage impliquées dans la conception des politiques publiques. C’est une question de cohérence et d’efficacité. Par ailleurs, les capacités d’expérimentation, par les cadres départementaux mais aussi par les préfets, doivent être encouragées. La proximité des niveaux de décision avec les citoyens a été modifiée au cours des différentes réformes territoriales ; il faut être très attentif à ce que les missions de chaque communauté soient bien identifiées.
Certains maires réclament le retour de la taxe d’habitation. Qu’en penses-tu?
Nous n’allons pas le recréer.
Votre ministre Catherine Vautrin a évoqué l’idée d’une autre forme de contribution à la fiscalité locale…
Nous n’allons pas créer de nouveaux impôts. Chacun doit également assumer ses responsabilités. Un exemple : les collectivités qui décident de rendre gratuits certains services publics, notamment les transports, doivent assumer la responsabilité de leur choix.
Un jour férié en moins ? « Très réservé sur l’idée »
Faut-il supprimer un jour férié ou augmenter de sept heures la durée annuelle du travail pour faire rentrer de l’argent dans les caisses de la Sécurité sociale ?
Je respecte le débat parlementaire et reste ouvert aux propositions, mais je suis très réservé sur cette idée complexe à mettre en œuvre et dont je ne suis pas sûr qu’elle donnera ce que certains prétendent. L’enjeu, c’est qu’il y ait davantage de Français qui travaillent. C’est aussi par le dialogue social, auquel j’attache une grande importance, que ces questions doivent être abordées.
Il y a quelques jours, Nicolas Sarkozy estimait que les enseignants du primaire ne travaillent pas assez. Partagez-vous ce constat ?
Je ne partage pas cette évaluation. Les professeurs des écoles, qui s’occupent seuls d’une classe entière du matin au soir, exercent un travail à la fois difficile et indispensable. Le 11 novembre, à Meaux, j’ai remercié les professeurs et leur ai exprimé ma confiance.
Votre Ministre de la Fonction…