Jannah Theme License is not validated, Go to the theme options page to validate the license, You need a single license for each domain name.
actualité économiqueNouvelles locales

Cinéma. A Cannes, un « espace d’expression prioritaire » pour les femmes en souffrance


On ne peut certainement pas réduire le Festival de Cannes à ses paillettes, son tapis rouge, son palais des festivals et ses stars de cinéma. Cependant, cette image a la vie dure. Y compris dans la tête de certains de ses futurs contributeurs.

C’est le cas des scénaristes laïques des films de la Quinzaine en actions, émanation de la Quinzaine des cinéastes, l’une des sections parallèles créée en 1969 par la Société des réalisateurs et réalisatrices (SRF). Ce dispositif d’accès à la culture et à l’éducation par l’image collabore toute l’année avec l’antenne cannoise de l’association d’insertion sociale et professionnelle Parcours de femmes, qui est aussi un lieu d’écoute et d’accompagnement des femmes victimes de violences.

Ils sont dix à participer à un atelier scénario. Un jury composé de professionnels du cinéma sélectionne trois de leurs œuvres qui seront adaptées à l’écran par des étudiants fraîchement diplômés de la CinéFabrique, école de cinéma de Lyon.

« Vivre le pire et s’en sortir »

Cette année, l’actrice Naidra Ayadi, César du meilleur espoir féminin pour « Polisse » et également vue dans « Les Promesses », parraine l’opération. Les courts métrages nés de cette expérience sont, même s’ils sont de la fiction, très souvent empreints du parcours personnel des scénaristes.

C’est encore une fois le cas avec « La Bonne Étoile » et « La Boule dans le Ventre », deux des films du projet, qui montrent des destins meurtris, périlleux mais suivis d’une reprise en main. Ainsi, dans « La Bonne Étoile », Nicole Étienne revient sur la perte de son enfant dans une histoire qui se décline en flashbacks. On part d’un heureux cadeau avant de replonger onze ans en arrière, dans le quotidien d’une femme enceinte. Les relations avec son mari sont tendues. Elle invoque sa douleur, il la renvoie à son hypocondrie, cherche même, sans écouter ses plaintes légitimes, à satisfaire son désir sexuel. A ce titre, une scène de viol conjugal, en partie hors champ, parle de toute la violence de son mari.

Même chose quand, dans la voiture, elle lui demande de ralentir pour réduire ses nausées. Comme un gamin, il accélère avant de lui donner l’ordre de sortir de la cabine. « J’avais vraiment envie de l’aborder sous l’axe de la résilience », explique Nicole Étienne, scénariste de ce film conçu comme un hommage à ses deux enfants, dont l’un est décédé. « Le thème était vraiment de dire qu’on pouvait vivre les pires épreuves difficiles, et s’en sortir », poursuit-elle.

Le rôle prépondérant du point de vue

Samir Titi a mis cette histoire en images. Un homme, donc, qui tourne un film sur les violences faites aux femmes. «En tant qu’homme, nous nous remettons en question. Au vu des trois films réalisés, on se rend vite compte que le pire malheur des femmes, ce sont les hommes. Je le savais déjà avant, mais franchement, je le comprenais beaucoup plus », avoue-t-il.

« J’étais consciente que j’étais un homme qui tournait un film sur la maternité et sur un homme violent. Je me suis beaucoup appuyé sur Amandine (prénom de l’héroïne), enfin Nicole Étienne, pour qu’elle me donne constamment matière à réflexion. Mon équipe technique est composée à 90% de femmes. Je me suis vraiment entourée d’un maximum de regards féminins en leur disant que si elles sentaient que je partais dans un regard qu’on pourrait qualifier de « regard masculin » (concept controversé inventé par la critique et réalisatrice Laura Mulvey, postulant une culture visuelle cinématographique imposant une perspective masculine hétérosexuelle cisgenre – ndlr) et dans quelque chose de fantasmé, d’érotique voire d’artificiel, ils pourraient me ramener à un endroit plus pertinent. »

Il est vrai que le regard et le point de vue jouent, plus encore que d’habitude, un rôle prépondérant dans ces œuvres. « Sur une histoire aussi dure, il peut être assez difficile de faire un travail de réécriture, de changement de séquences ou de lieux. Très vite, avec l’auteur, on s’est dit que je pouvais apporter un recul technique sur les dialogues, les répétitions, les enchaînements de séquences. Et, plus simplement, sur les moyens de production. Par exemple, la première séquence avec l’enfant se déroule dans un camping-car au milieu d’une forêt. Je savais très bien que ça allait être compliqué à tourner. Du coup, nous avons gardé les mêmes intentions et changé le lieu pour le transposer en parc. »

Thérapie et catharsis de l’écriture

« La Boule dans le ventre » s’attarde aussi sur une expérience traumatisante très personnelle dont la scénariste, Estelle Lasic, n’avait jamais parlé auparavant. Elle évoque les problèmes d’hyperphagie d’une mère délaissée et écrasée par la charge mentale.

« Voir mon personnage joué m’a permis de me regarder différemment et de pouvoir ressentir de la compassion. On a souvent le réflexe de condamner, de juger ou de se moquer de la personne qui a un trouble de l’alimentation. J’étais assez dur avec moi-même. L’écriture avait une dimension cathartique », insiste Estelle, pas cinéphile pour un sou.

« J’ai surtout essayé de servir le projet et tout simplement de servir la parole et la voix d’Estelle », avance Lucie Cabon, la réalisatrice. « J’ai beaucoup aimé l’aspect psychologique du scénario d’Estelle. Il n’y a pas de violence physique directe montrée. C’est beaucoup plus insidieux. J’ai trouvé intéressant de mettre en lumière cette violence invisible pour les autres et pourtant extrêmement paralysante pour les victimes, et de la présenter comme un trouble et non comme une simple fêlure », poursuit-elle.

Cette fiction, qui sonne comme un témoignage, est aussi là pour venir en aide aux femmes victimes. « Même entouré, on se sent toujours très seul dans ces situations. Les montrer, en parler est super important. Quand on est dedans, on a l’impression que ça ne s’arrêtera jamais, mais on peut s’en sortir », rassure Estelle Lasic.

Ces cannoises qui n’étaient pas présentes au Festival pourront enfin juger sur place. Une participation utile, nécessaire et directe, animée par le désir que leur histoire puisse permettre à d’autres femmes d’affronter plus sereinement la violence du monde.


Grb2

Toutes les actualités du site n'expriment pas le point de vue du site, mais nous transmettons cette actualité automatiquement et la traduisons grâce à une technologie programmatique sur le site et non à partir d'un éditeur humain.

Cammile Bussière

One of the most important things for me as a press writer is the technical news that changes our world day by day, so I write in this area of technology across many sites and I am.
Bouton retour en haut de la page