Son nom évoque celui d’un Pokémon et son apparence celle d’un mille-pattes, le ver de feu se multiplie en Méditerranée. En cause : le réchauffement des eaux. Envahissant, charognard et extrêmement urticant, il prolifère déjà en Italie. Alors, a-t-on des raisons de s’inquiéter sur le littoral du Languedoc-Roussillon ?
La présence de vers de feu n’est pas nouvelle en Méditerranée, mais ils étaient autrefois beaucoup moins nombreux et n’étaient observés en Sicile qu’en été.
Avec le réchauffement climatique, les eaux se réchauffent, devenant un habitat idéal pour ces vers, qui deviennent plus nombreux d’année en année, et sont présents toute l’année.
, Alfonso Barone, 34 ans, qui pêche au large de la Sicile depuis son enfance, a raconté à nos confrères de l’AFP.
Il connaît bien ces créatures ressemblant à des mille-pattes, et lorsqu’il ramène sa prise sur le bateau, le résultat est clair. Alfonso Barone retire un long ver rouge frétillant d’un maquereau sans tête à bord de son bateau.
Les vers attaquent les poissons dès qu’ils sont pris dans les filets et peuvent dévorer jusqu’à 70 % des prises. Également appelés vers barbelés, ils « manger la tête, le corps entier et l’éviscérer »explique le pêcheur en remontant une dorade mutilée au large du village de Marzamemi, une station touristique réputée à la pointe sud-est de la Sicile.
Hermodice caronculéeCommunément appelé Ver de feu barbu Ou Ver barbeléest un ver annelé marin de la famille de la amphinomycètes, originaire de laocéan Atlantique tropical et mer Méditerranée. À première vue, le ver de feu ressemble à un type de Mille-Pattes ou chenille processionnaire avec son aspect allongé et aplati, ses multiples segments et ses soies blanc.
Ses couleurs sont variées et vont du vert, jaune, rouge, gris au blanc avec des reflets nacrés. Elles mesurent généralement entre 15 et 30 cm, mais peuvent atteindre jusqu’à 50 cm. Si on la coupe en deux, Le ver de feu a la capacité de se régénérer et de repousser. Côté tête mais aussi sur le côté de sa partie arrière. Le ver de feu a besoin en moyenne 22 jours pour se refaire une beauté. Une sorte de super-héros ou plutôt de super-vilain tout droit sorti de Marvel.
LE nom héroïque de ver de feu fait référence à la sensation de brûlure intense ressentie au toucher de l’animal. Elle est provoquée par ses poils blancs, qui constituent un moyen de défense efficace.
Les bouquets sont plus ou moins visibles selon l’état de stress de l’animal. Les soies sont protractiles, rigides et cassantes au toucher, un peu comme les aiguilles des figues de Barbarie. LE poils blancs avec un venin urticant se détachent au moindre contact et pénètrent dans la peau, procurant une vive sensation de brûlure.
Le ver de feu raffole de tout, du corail aux poissons capturés dans les filets de pêche. opportuniste et invasifLe ver de feu est à la fois un prédateur et un charognard et peut vivre de la surface jusqu’à environ 40 mètres de profondeur et dans une grande variété d’habitats, des infrastructures portuaires aux coraux qu’il grignote ou même dans la boue.
Alors que hausse des températures des eaux méditerranéennes, en raison du changement climatique, il favorise la multiplication des amphinomidae, sa prolifération sur les côtes italiennes inquiète aussi bien les pêcheurs obligés de jeter leurs prises dévorées que les baigneurs inquiets d’être piqués.
En pleine saison estivale, une question hante nos esprits, souvent peu conquérants en milieu aquatique, alors que la musique de John Williams et son légendaire thème de requin nous accompagnent à chaque fois que nous mettons un orteil dans l’eau… Le ver de feu serait-il présent chez nous ?
Nous sommes allés poser la question à Pascal Romans, conservateur du Biodiversarium et responsable du Service d’Aquariologie Partagée de l’Observatoire Océanologique de Banyuls sur Mer. Et la réponse est NON !
Il n’y a pas lieu de s’alarmer. A ma connaissance, il n’y en a pas dans la région. Je n’ai pas reçu de signalement de personnes mordues. Quelques individus avaient été observés près de Marseille et des Alpes-Maritimes, mais ce n’était pas hier.
Pascal Romans, conservateur du Biodiversarium et responsable du service de l’Aquarium de Banyuls-sur-Mer
Spécialiste des espèces invasives, Pascal Romans se veut rassurant sur la présence du ver marin sur notre littoral. Rassurant mais vigilant. « Nous ne sommes pas à l’abri de les voir arriver. Ils sont en train de remonter la botte italienne, nous avons toujours des étés de plus en plus chauds, des hivers de moins en moins froids, donc il n’y a aucune raison pour qu’ils ne s’installent pas ici aussi. Il faut les surveiller. »
Le facteur déterminant dans l’établissement de cette espèce est le réchauffement de la mer. Un hiver moins froid signifie qu’il n’y a pas de nettoyage hivernal, mais l’équilibre de la biodiversité marine locale est tout aussi important.
S’il y a un déséquilibre dans le milieu, s’il y a un manque de prédateurs, d’équilibre environnemental, ces animaux trouvent leur place pour se développer comme l’a fait le crabe bleu à Canet-en-Roussillon.
Le biologiste poursuit en expliquant que « Lorsqu’une espèce exotique envahissante arrive, cela signifie qu’il y a un problème dans l’environnement. »
Banyuls-sur-Mer et toute la Côte Vermeille sont également concernées par la présence d’une espèce non indigène. Un cas concret qui porte le nom de Labre paonPoisson d’apparence tropicale naturellement présent en Méditerranée près de Marseille, en Corse, en Espagne et jusqu’au Cap de Creus.
Son implantation dans les Pyrénées-Orientales est cependant très récente, conséquence aussi d’hivers plus doux. « Jusqu’à présent, ils venaient sur la côte catalane en été mais pas en hiver. » Mais depuis deux ans, le labre paon a décidé d’arrêter de jouer le rôle de simple touriste et a choisi d’établir sa résidence principale sur le littoral catalan, été comme hiver.
CONTRECette espèce qui n’a pas trouvé sa place au Pays Catalan fait désormais partie de son paysage marin. Mais la présence du napoléon ne pose aucun problème, aucun déséquilibre de la biodiversité indigène, sans compter qu’il pourrait bien partir aussi vite qu’il est venu. « Il suffit d’un hiver froid et elle repart« .
Un peu comme le crabe bleu qui grouillait dans l’étang de Canet/Saint-Cyprien/Saint-Nazaire mais la sécheresse et la salinité exceptionnelle de l’année dernière « assommé ».Quelle que soit l’espèce, invasive ou non, charmante ou venimeuse, il est donc difficile de faire des prédictions sur qui viendra peupler notre milieu marin dans les années à venir. Ce qui est sûr, c’est que ce monde est fragile et que la rigueur des hivers reste un facteur déterminant pour le bon équilibre de la faune et de la flore endémiques.