À plus de 3 000 mètres de profondeur, dans le détroit qui sépare le Groenland de l’île norvégienne du Svalbard, des scientifiques ont découvert un surprenant champ de sources hydrothermales. Les fluides qui s’échappent des entrailles de la Terre atteignent des températures de plus de 300 °C. Leur analyse devrait permettre de comprendre la composition chimique de l’océan.
Des températures proches de 0°C, une obscurité perpétuelle et très peu nutrimentsnutrimentsLes plaines abyssales, situées à plus de quatre kilomètres sous la surface des océans, sont des milieux particulièrement hostiles. Pourtant, des oasis de vie y existent. On les trouve au niveau de grandes étendues d’eau. cheminéescheminées sources minérales d’où s’échappent des fluides chauds pouvant atteindre des températures supérieures à 300°C. Ce sont des sources hydrothermales.
Cheminées hydrothermales actives. © Ifremer (2013)
D’étranges oasis de vie au milieu des océans
On les trouve généralement le long des dorsales océaniques, ces grandes chaînes de volcans sous-marins qui parcourent le milieu de tous les océans du monde et au niveau desquelles se produit la croûte océanique. Découvertes à la fin des années 1970, les sources hydrothermales sont aujourd’hui considérées comme des sites majeurs, étudiés autant pour écosystèmesécosystèmes extrêmophilesextrêmophiles qu’ils hébergent uniquement pour leur rôle sur le chimiechimie océans. L’eau de mer, qui s’infiltre dans la croûte au niveau des dorsales, se réchauffe en profondeur du fait de la proximité de la source magmatique qui donne naissance à la nouvelle croûte océanique.
Au contact des roches, il se charge également de minérauxminéraux et en gazgaz dissous. Remontant à la surface par les nombreuses fractures qui affectent la croûte, ce fluide sera recraché au fond de l’océan par des cheminées. Là, certains éléments précipiteront, conduisant à la constructionconstruction de grandes cheminées sur lesquelles vont se développer de nombreuses communautés d’organismes chimiosynthétiques.
Il est désormais connu que cette activité hydrothermale est étroitement associée à l’activité tectono-magmatique des dorsales océaniques. De nombreux champs hydrothermaux ont ainsi été découverts au fil des années, sur toutes les dorsales du monde.
Coupe transversale au niveau d’une dorsale rapide montrant des phénomènes hydrothermaux. © Ifremer
Enfin presque. Car jusqu’à présent, aucune activité de ce genre n’avait été détectée sur la dorsale de Knipovitch. Elle se situe entre le Svalbard et le Groenland, en bordure de l’océan ArctiqueArctiqueElle marque la frontière entre les plaques nord-américaine et européenne et contribue à l’ouverture de la mer du Groenland.
Carte montrant l’emplacement de la dorsale de Knipovitch et du champ hydrothermal de Jøtul. © Bohrmann et al. 2024, Scientific Reports
Fluides riches en méthane
Dans cette région située près du pôle, l’océan s’ouvre très lentement. La nouvelle croûte y est produite à un rythme inférieur à 2 cm/an. La dorsale est donc peu magmatique, très segmentée, l’axe difficile à identifier et souvent recouvert de sédimentssédimentsDans ce contexte, il est difficile de trouver des sources hydrothermales. Cependant, les données acquises en 2021 ont permis d’identifier pour la première fois des sources hydrothermales actives sur la dorsale de Knipovitch. Ces résultats ont été présentés dans la revue Rapports scientifiques.
Source hydrothermale crachant du liquide chaud au fond de l’océan à Yggdrasil (champ hydrothermal de Jøtul). © MARUM – Centre des sciences environnementales marines, Université de Brême
Baptisé Jøtul, ce nouveau champ hydrothermal est situé à 3 020 mètres de profondeur et crache des fluides pouvant atteindre des températures allant jusqu’à 316 °C. L’analyse de la composition de ces fluides s’est révélée riche en sulfures de fer et de cuivre mais aussi en méthane. Ce gaz serait le produit de l’interaction entre les magmamagma émis au niveau de la dorsale et des épais sédiments recouvrant le fond océanique dans cette zone.
Cette découverte devrait donc permettre de mieux comprendre l’impact des sources hydrothermales, notamment celles situées sur les dorsales ultra-lentes, sur la composition chimique des océans, mais aussi de laatmosphèreatmosphèreUne nouvelle expédition devait donc débuter cet été pour étudier plus en détail ce champ hydrothermal.