Cessez-le-feu à Gaza : Netanyahou sous pression maximale
« Sommet de la dernière chance », « accord ou guerre régionale » : c’est ainsi que les médias israéliens résument l’importance du sommet de Doha, auquel participent les Américains, les Egyptiens, les Qataris et une délégation israélienne. L’enjeu est triple : obtenir un cessez-le-feu dans la bande de Gaza après 313 jours de guerre, libérer par étapes 115 otages détenus par le Hamas et éviter qu’un échec des négociations ne donne à l’Iran et au Hezbollah un prétexte pour attaquer Israël et déclencher une guerre régionale.
Sur le papier, les chances de succès semblent plutôt minces. Le Hamas a boycotté la réunion. Mais le mouvement islamique palestinien est en communication constante avec les responsables qataris et égyptiens. Côté israélien, la délégation comprend David Barnea et Ronen Bar, respectivement chefs du Mossad, le service de renseignement extérieur, et du Shin Bet, le service de sécurité intérieure chargé de la lutte contre le terrorisme. Selon les médias, ces négociateurs ont obtenu de Benjamin Netanyahu un mandat leur laissant une marge de manœuvre, qui pourrait toutefois ne pas être suffisante pour conclure.
Trafic d’armes
Les discussions, menées par le chef de la CIA William Burns, le chef des renseignements égyptiens Abbas Kamel et le Premier ministre qatari Mohammed Al-Thani, doivent se poursuivre vendredi. L’ordre du jour porte essentiellement sur un projet d’accord présenté fin mai par Joe Biden. Il prévoit initialement un cessez-le-feu de six semaines, la libération des otages détenus par le Hamas depuis le 7 octobre et un retrait partiel de l’armée israélienne des zones les plus densément peuplées de la bande de Gaza.
Benjamin Netanyahu est en effet à l’origine de ce projet d’accord. Mais une fois que le président américain s’en est emparé, le Premier ministre a voulu lui imposer une série de « modifications ». Le Premier ministre exige que l’armée israélienne continue de contrôler la frontière entre la bande de Gaza et l’Egypte pour empêcher le trafic d’armes par des tunnels, ainsi qu’un corridor qui coupe l’enclave en deux, pour empêcher les membres de la branche armée du Hamas de revenir dans la partie nord de la bande de Gaza et de menacer le territoire israélien.
Concernant les otages, Netanyahou exige la libération de 33 d’entre eux encore en vie, des femmes dont des femmes soldats, des enfants, des personnes âgées, en échange de 990 Palestiniens détenus par Israël. Le Hamas a rejeté ces demandes et exigé un retrait de l’armée israélienne de la bande de Gaza et la mise en œuvre du plan américain. « L’occupation (NDLR : Israël) veut continuer les négociations pour commettre de nouveaux crimes », a accusé Sami Abou Zuhri, un responsable du Hamas.
Des pressions de toutes parts
Pour l’instant, le Premier ministre israélien est sur la défensive. Il est la cible de pressions de toutes parts pour céder du terrain. Joe Biden ne cesse de répéter qu’il est grand temps de conclure. Donald Trump s’y est mis. Benjamin Netanyahu et l’ancien président ont eu une conversation téléphonique mercredi. Selon le site d’information américain Axios, le candidat républicain à la Maison Blanche a également poussé son interlocuteur à accepter le « deal » qui est sur la table.
En Israël, le général Herzi Halevi, le chef d’état-major, a pris le contre-pied du Premier ministre, assurant que l’armée israélienne n’avait pas forcément besoin d’être déployée en permanence le long de la frontière entre l’Egypte et la bande de Gaza. Les chefs du Mossad et du Shin Bet, ainsi que Yoav Gallant, le ministre de la Défense, sont également favorables à l’adoption du plan américain, tout comme le lobby des familles d’otages, qui a organisé des manifestations à Jérusalem et Tel-Aviv jeudi.
40 000 morts
Un autre argument de poids est désormais de plus en plus avancé : parvenir à un accord pourrait permettre d’éviter des représailles massives de l’Iran et du Hezbollah après l’assassinat le mois dernier du leader politique du Hamas Ismaïl Haniyeh à Téhéran, attribué à Israël, et du chef militaire du Hezbollah à Beyrouth Fuad Shukr.
Pour dissuader Israël, les Etats-Unis ont apporté leur soutien à la situation en déployant d’importants renforts aériens et maritimes dans le Golfe. En attendant, les combats se poursuivent sans relâche. L’armée israélienne a attaqué 30 cibles dans la bande de Gaza en 24 heures, faisant plusieurs dizaines de morts parmi les membres de la branche armée du Hamas. Selon le ministère de la Santé du Hamas, le nombre de morts palestiniens a franchi jeudi la barre des 40 000, dont 70 % sont des femmes et des enfants.