A l’occasion de la Journée mondiale de la santé mentale ce jeudi 10 octobre, il faut rappeler plusieurs signes méconnus de la dépression, bien éloignés des symptômes communément admis dans l’imaginaire collectif.
En cette Journée mondiale de la santé mentale, jeudi 10 octobre, le Premier ministre Michel Barnier est en déplacement à Vienne. Accompagné de la ministre de la Santé Geneviève Darrieussecq, le chef du gouvernement compte échanger avec les professionnels de santé et les patients, sur le sujet dont il dit vouloir faire la grande cause nationale de l’année 2025.
De nombreuses idées reçues existent sur la dépression et ses signes. Lorsqu’on en parle, on pense inévitablement à la tristesse, à l’isolement, aux larmes et à la négligence.
Mais certains symptômes se manifestent à l’opposé des signaux communément acceptés. Ils sont alors difficiles à détecter par des personnes non conscientes, qui passent parfois à côté du mal-être d’un proche.
UN CHANGEMENT SOUDAIN DE COMPORTEMENT
De nombreux troubles dépressifs ne sont pas visibles dans le processus qui mènera une personne à cet état. Et pour cause, les changements se produisent progressivement au fil des semaines et des mois, les rendant moins visibles. «Les proches peuvent très vite culpabiliser de ne pas s’en être rendu compte plus tôt», constate la psychologue Hélène Romano.
La difficulté réside aussi dans le fait que les personnes en dépression vont rarement chercher de l’aide dans un premier temps, alors qu’elles pourraient être prises en charge lorsqu’elles sont encore au stade de troubles dépressifs (NDLR : à ne pas confondre avec la dépression, elles refusent l’aide, banalisent leur état et sont dans le déni).
« Quand on les voit en consultation, c’est souvent à la demande de proches, ou parce qu’ils ont passé à l’acte (tentative de suicide, ivresse…) », selon la psychologue. .
« JEU TRAUMATIQUE » CHEZ LES ENFANTS
Le jeu, en tant qu’indicateur de l’état psychologique d’un enfant, est peu connu des parents et des professionnels. Cependant, regarder un enfant jouer donne de nombreuses informations sur son niveau de développement et sa manière d’interagir.
Le jeu traumatisant fait partie des signaux qui peuvent alerter l’entourage d’un enfant. L’enfant déprimé ne joue plus ou joue à des jeux déroutants ou tristes, de manière répétitive et compulsive.
« L’un de mes patients était un enfant de première année dont la mère est décédée d’un cancer. Lors d’un anniversaire, elle a proposé à ses camarades de classe de jouer à la chimio. Il y avait donc une poupée Barbie, dont les cheveux devaient être coupés et enterrés », se souvient Hélène Romano.
« Cette petite fille essayait de gérer sa souffrance et son chagrin suite à la perte de sa mère, face au déni d’une famille qui niait sa douleur psychologique, pensant à tort qu’elle était trop jeune et qu’elle « ne comprenait pas ». ce qui s’est passé », a-t-elle poursuivi.
Les enfants utiliseront parfois le jeu pour tenter d’intégrer un événement ou une situation traumatisante qui les submerge. Ils vont alors reconstituer ces événements dans lesquels ils sont coincés.
Les excès
En psychologie, on parle de comportements d’isolement intériorisés – les plus communément admis – et de comportements d’isolement externalisés.
Ils se manifestent alors par des excès (fêtes, courses, jeux, etc.), beaucoup plus bruyants et voyants, mais dont on ignore la dimension dépressive : « Cela peut masquer l’attention qu’on va porter à la personne, car on la voir très excitée, décomplexée par ce qu’elle a ingéré, etc. C’est la raison pour laquelle les signes ne sont pas toujours ceux qu’on connaît comme la tristesse, la tristesse, la douleur », indique la psychologue Hélène Romano.
D’autres personnes feront des achats excessifs, ou par exemple multiplieront les opérations de chirurgie esthétique, dans des comportements dysmorphophobes, derrière lesquels se cache souvent une dépression grave. On est alors loin de l’image commune de la personne déprimée qui n’est plus capable de prendre soin d’elle-même.
Dépendances
« Les gens se retirent des autres et de la vie, mais parfois paradoxalement, le sevrage peut se manifester par des comportements addictifs, par la prise de toxines diverses et variées, qui peuvent donner l’impression que la personne a une vie très heureuse », selon Hélène Romano.
Comme les excès, ces comportements ne sont pas perçus comme un isolement délibéré, mais peuvent, à long terme, conduire une personne déprimée vers une situation de rupture sociale.
Sous-investissement ou surinvestissement dans l’école
On a souvent tendance à penser que les enfants déprimés ne travaillent plus ou ne sont plus scolarisés. Même si cela peut être vrai pour certains enfants, d’autres prendront la direction opposée.
Des notes scolaires en baisse ne sont pas toujours un signe de dépression, et certains enfants déprimés surinvestissent dans l’école pour combattre leurs pensées noires.
« Ils vont être très impliqués car cela leur permet de lutter contre un effondrement. Mais quand on les interroge sur leurs projets, il n’y a aucun plaisir. Ils n’aiment pas l’école, mais peuvent être très bons scolairement », explique Hélène Romano.
« Cela peut être une passerelle pour les enseignants car il existe souvent un écart entre les résultats scolaires et les relations. Ils sont à proximité », a-t-elle conclu.