Nouvelles locales

Ces scandales massifs de fraude aux crédits carbone font la une des journaux du monde entier



Un scénario idéal pour une saison 2 de la série « D’argent et de sang » (Canal+) ? Après « l’arnaque du siècle » qui a vu une bande d’escrocs détourner entre 2008 et 2009 plusieurs milliards d’euros de TVA sur les quotas d’émission de CO2 – autrefois vendus par les entreprises les moins polluantes à celles qui polluent beaucoup sur un marché opaque –, il semblerait qu’un autre outil financier censé protéger la planète soit aussi l’objet du plus sombre des trafics.

Les autorités allemandes ont ainsi invalidé quelque 215 000 crédits carbone d’une valeur d’environ 18 millions d’euros en raison « irrégularités » découverts suite à une enquête récente, et 17 directeurs généraux ou employés d’organismes d’audit chargés de suivre les projets sont soupçonnés d’avoir « fraude commerciale » par le procureur de Berlin, rapporte Bloomberg (6 septembre 2024).

« De graves incohérences juridiques et techniques » en Chine

Les mauvaises pratiques identifiées par l’Agence fédérale allemande de l’environnement concernent « réductions des émissions en amont » (UER), un type de crédit carbone que les entreprises peuvent utiliser pour se conformer à une loi paneuropéenne visant à plafonner les émissions de leurs carburants, expliquent nos confrères.

Ces crédits sont générés par des projets qui réduisent les émissions de combustibles fossiles en amont, c’est-à-dire avant le raffinage du pétrole. Par exemple, en arrêtant le torchage du gaz naturel dans les opérations pétrolières (combustion volontaire de gaz sans production d’énergie). Chaque crédit UER équivaut à une tonne d’équivalent CO2 non émise dans l’atmosphère.

La décision d’invalider ces crédits carbone concerne huit projets différents en Chine (sur un total de 75 projets EBU menés dans le monde, ndlr), a précisé l’agence allemande, qui en examine actuellement 13 autres. Parmi les huit pointés du doigt, opéré par « grandes entreprises internationales »sept présentés « de graves incohérences juridiques et techniques ».

Selon Argus Media, les crédits carbone UER se négocient actuellement à environ 85 € la tonne d’équivalent CO2 – après avoir atteint un prix record de 440 € la tonne en 2022.

Des cuisinières gratuites en Afrique… mais à quel prix ?

En Afrique, c’est un autre type de crédit carbone qui commence à sentir – littéralement – ​​mauvais. La société C-Quest Capital prétendait améliorer le quotidien des habitants tout en protégeant la planète grâce à des cuisinières moins polluantes, « expédiés par millions » à travers le continent. Mais sa promesse a été trahie, révèle une enquête du Washington Post (1er septembre 2024).

Gratuits, ces poêles ont été présentés comme une avancée par rapport aux méthodes de cuisson traditionnelles utilisant le bois et le charbon de bois, offrant ainsi « des solutions aux problèmes massifs de la déboisement et la pollution par la fumée. Responsable de 2 % des émissions mondiales, la cuisson au feu – pratiquée par près de 4 ménages africains sur 5 – cause des millions de décès prématurés.

Mais lorsque les nouveaux réchauds ont été distribués au Mozambique en 2021, Victoria Jose Arriscado, une bénéficiaire interrogée par nos confrères, a été immédiatement surprise. « J’ai été frappé par leur aspect bon marché : quelques pièces métalliques sur des briques d’argile et de terre. » Puis, quand elle a utilisé le sien, « Sa maison s’est remplie de fumée et ses yeux ont commencé à pleurer. »

L’enquête montre ainsi « Comment, dans cette région du Mozambique, la pression pour produire des crédits carbone à bas coût a conduit l’entreprise à prendre des raccourcis qui se sont finalement retournés contre les personnes qu’elle essayait d’aider ». Parce que vu la fragilité des nouveaux fourneaux face à la pluie, certains villageois, qui cuisinaient à l’extérieur avant le projet, ont placé leurs appareils à l’intérieur, « augmentant probablement leur exposition à la pollution de l’air. »

Aucune garantie d’efficacité

De plus, C-Quest n’a pas « n’a pas pris les mesures nécessaires pour garantir que ses poêles (…) étaient largement utilisés et fonctionnaient correctement »qui est néanmoins « essentiel pour garantir que le projet réduise les émissions de gaz à effet de serre et la déforestation »Le Washington Post le démontre. Un dirigeant communautaire témoigne :

Ils sont venus, ils ont laissé les kits et ils ne sont jamais revenus.

Assurant d’abord qu’il s’agissait d’un cas isolé et d’un « mauvais exemple » de son travail, C-Quest a finalement admis des actes « répréhensible »…qu’elle impute à son ancien PDG. Après avoir signalé ces dysfonctionnements à la police fédérale américaine ainsi qu’à Verra, un organisme externe qui certifie les projets de crédits carbone, l’entreprise assure qu’elle annulera les crédits émis de manière excessive. Et promet une « une rupture nette avec (ses) pratiques antérieures. »

L’organisme de certification a annoncé la suspension de 27 projets de foyers de cuisson, dont celui de C-Quest au Mozambique. Selon la société financière MSCI, les crédits carbone associés se vendaient en moyenne 6,27 dollars (5,66 euros) par tonne d’équivalent CO2. Mais en raison de doutes récents sur son efficacité, le crédit moyen pour un foyer de cuisson se vend désormais à moins de 3 dollars.

Selon une étude précédente, le financement de modes de cuisson plus écologiques s’avère bien moins efficace qu’annoncé (GEO avec AFP). Les méthodologies utilisées pour déterminer le nombre de crédits surestiment ainsi jusqu’à dix fois les émissions de CO2 évitées, en raison notamment d’un taux de conversion trop important « flexibilité » critères. Dans les enquêtes sur le terrain, les participants répondent « ce qu’ils pensent que les personnes qui mènent le questionnaire (embauchées par les développeurs du projet) attendent d’eux » – gonflant ainsi les chiffres d’utilisation de l’appareil fourni.

GrP1

Ray Richard

Head of technical department in some websites, I have been in the field of electronic journalism for 12 years and I am interested in travel, trips and discovering the world of technology.
Bouton retour en haut de la page