Ces décisions « impératives » de la Fondation Abbé Pierre après les nouvelles accusations contre son fondateur
Alors que 17 nouveaux témoignages accusent l’abbé Pierre de violences sexuelles, les organisations qui ont hérité du religieux ont annoncé prendre plusieurs décisions radicales et marquantes, dont un changement de nom.
C’est une nouvelle vague de témoignages qui s’abat sur l’abbé Pierre. Sept semaines après les premières révélations sur les accusations de violences sexuelles visant le prêtre, 17 nouveaux témoignages s’ajoutent à la liste selon un rapport du cabinet Egaé, mandaté par Emmaüs et la Fondation Abbé Pierre depuis le 17 juillet pour recueillir de potentiels nouveaux témoignages. Les différentes accusations évoquent des « contacts non sollicités sur les seins ou des baisers forcés », des « contacts sexuels répétés sur une personne vulnérable », des « actes répétés de pénétration sexuelle sur une personne de plus de 18 ans, ainsi que des propos à caractère sexuel, des baisers forcés et autres contacts sexuels sur un enfant » selon le rapport.
Le mouvement Emmaüs et la Fondation Abbé Pierre, qui avaient déjà choisi de rendre publiques les accusations contre leur fondateur en juillet dernier, ont réitéré ce choix, estimant « qu’il était de leur devoir de rendre publics ces faits, de les dénoncer, d’en tirer les leçons et de prendre des décisions devenues indispensables et encore plus urgentes ». Dans un communiqué, la Fondation Abbé Pierre précise en effet que « la violence et l’extrême gravité de certains de ces nouveaux témoignages ont provoqué un choc au sein de nos organisations ». Lesquelles se sont accordées sur plusieurs décisions significatives « concernant l’héritage de l’abbé Pierre » et « sa place au sein des organisations ».
La Fondation Abbé Pierre change de nom, mais pas seulement
Le nom de la Fondation Abbé Pierre avait déjà été évoqué lors des premières révélations sur les accusations contre le prêtre. Cette fois, une décision a été prise et l’organisation a choisi de changer de nom. Elle indique avoir déjà « entamé les démarches » pour que le changement soit mis en œuvre « dans les meilleurs délais ». Le logo d’Emmaüs France pourrait également être prochainement modifié puisqu’il sera proposé de supprimer la mention « fondateur abbé Pierre » lors d’une assemblée générale extraordinaire qui se tiendra en décembre.
L’association héritière de l’abbé Pierre a également décidé de fermer définitivement le lieu de mémoire dédié à l’abbé Pierre à Esteville. « L’avenir du centre fera l’objet d’un travail collectif entre ses différentes associations membres au cours des prochaines semaines », précise-t-elle dans son communiqué. Ces mesures, hautement symboliques, sont « impératives » par « respect pour les victimes qui ont pris la parole » mais aussi pour toutes les personnes impliquées dans la Fondation et dont l’action « serait entachée d’un profond malaise si rien ne changeait », estime l’association.
Enfin, Emmaüs et la Fondation Abbé Pierre indiquent qu’une « commission d’experts indépendants sera mise en place, notamment pour comprendre et expliquer les dysfonctionnements qui ont permis à l’abbé Pierre d’agir comme il l’a fait pendant plus de 50 ans ».
« Un avant et un après pour notre histoire »
Les révélations sur les accusations de violences sexuelles contre l’abbé Pierre ternissent inévitablement la mémoire de l’homme et pèsent également sur les organisations qu’il a fondées. Le mouvement formé par Emmaüs et la Fondation Abbé Pierre dit savoir « ce qu’il doit à l’abbé Pierre ». « Il a inspiré nos organisations et les a incarnées pendant de nombreuses années. Il a porté une voix, un élan, qui a suscité des ondes de solidarité. L’importance de son action constitue un fait historique » peut-on également lire dans le communiqué.
Mais ces accusations « marquent clairement un avant et un après dans notre histoire », écrit Adrien Chaboche, délégué général d’Emmaüs International. « Il nous appartient désormais d’en tirer toutes les leçons et de prévoir les mesures nécessaires pour poursuivre nos combats, notamment dans la lutte contre les violences et pour l’égalité des droits », ajoute-t-il. Le mouvement voulant combattre toutes les formes de violences, il estime devoir « dénoncer tous les actes intolérables, quels qu’en soient les auteurs ».
La Fondation Abbé Pierre et le mouvement Emmaüs réaffirment leur « soutien total aux victimes » : « Nous saluons leur courage et les remercions de leur confiance. Nous les croyons et nous sommes à leurs côtés. » Les organisations assurent également que leurs combats « restent essentiels pour répondre à l’urgence sociale » et qu’elles poursuivront « plus que jamais (ses) missions de lutte contre la pauvreté, le mal-logement, l’exclusion et l’indifférence.
GrP1