« Ces déchets ont une valeur »… Comment la seconde vie des bouteilles en plastique profite aux clients et limite la pollution
Ce jeudi 19 septembre ressemble au dernier jour de l’été. Sous un soleil radieux, les clients se succèdent devant l’Ecobox sur le parking de l’hypermarché Auchan, à Faches-Thumesnil, dans le Nord. Depuis l’installation de cette machine il y a dix ans, l’une des premières, de nombreux habitants ont pris l’habitude de déposer leurs bouteilles en plastique vides. Sur fond vert, couleur symbolique du recyclage, l’Ecobox promet de réutiliser le plastique pour de nouvelles bouteilles et récompense ceux qui l’utilisent avec un bon de deux centimes par bouteille. Une formule efficace.
Au total, « 265 millions de bouteilles ont été collectées en dix ans », précise Béatrice Javary, directrice RSE d’Auchan, pour qui cette initiative permet de « montrer que les déchets ont de la valeur ». Ces Ecobox sont le fruit d’un partenariat né en 2014 entre l’enseigne de distribution et le groupe Sources Alma, qui produit notamment St-Yorre, Cristaline et Rozana. La société d’eaux minérales a cependant depuis élargi son offre au-delà d’Auchan et propose au total 250 Ecobox en France.
Mettez des paillettes en plastique dans nos vies
Nadine, une cliente, vient déposer ses bouteilles vides chez son mari. Le sexagénaire place soigneusement chaque bouteille à code barre vers le haut, permettant à l’Ecobox de l’identifier. « Il faut vérifier que le produit est bien en PET transparent », explique Agnès Jacquot, directrice RSE de Sources Alma. En effet, le PET foncé n’est pas supporté et, comme ce plastique recyclé sera utilisé pour créer de nouvelles bouteilles d’eau minérale, certains contenants, comme les produits d’entretien, ne sont pas acceptés. Nadine vient une semaine sur deux recycler ses bouteilles puis utilise son bon pour faire ses courses chez Auchan. La sexagénaire se réjouit « d’éviter de remplir ses poubelles de bouteilles » et de « savoir où elles vont ».
Car de l’hypermarché à la première usine de recyclage, il n’y a qu’un pas. Dans le ventre de l’Ecobox, les bouteilles sont broyées et les flocons de plastique stockés dans un immense sac. Lorsqu’un camion de la société Alma vient livrer des bouteilles, il repart avec son stock de paillettes et se rend à une quinzaine de minutes, jusqu’à l’usine Roxpet de Lesquin. Dans le Nord, le chemin pour recycler ces bouteilles fait « en moyenne seulement 80 kilomètres », explique Agnès Jacquot qui assure que l’entreprise essaie de limiter au maximum le transport, l’une des principales sources de pollution de l’eau en bouteille.
Un quart de plastique recyclé
Conscient des critiques adressées à l’eau en bouteille, plus polluante que l’eau du robinet, le groupe Alma consacre beaucoup d’énergie à son recyclage. Les bouteilles de Cristaline, eau de source la plus consommée en France, sont composées à 25 % de plastique recyclé. Un seuil qui sera obligatoire pour toutes les bouteilles à partir de janvier 2025. Dans l’usine Roxpet de Lesquin, les flocons de plastique collectés dans les Ecobox de la région sont nettoyés des morceaux d’étiquettes et des bouchons. Les paillettes sont ensuite décontaminées et fondues en petites boules de plastique. « Chaque année, 15 000 à 16 000 tonnes de granulés sortent et le tout est analysé par un laboratoire pour vérifier que c’est conforme », explique Denis Codron, directeur de l’usine.
A quelques dizaines de kilomètres se trouve la dernière étape de ces bouteilles recyclées. Les boules de plastique voyagent jusqu’au site source Louise. Ici, les granulés sont fondus à 200 voire 300 degrés pour former des « préformes », de petites bouteilles en plastique qui seront ensuite soufflées pour créer de nouvelles bouteilles. Dans les couloirs de l’usine, le bruit est assourdissant. Les machines soufflent les bouteilles qui sont transportées si vite qu’elles deviennent floues. De gare en gare, ils sont remplis, bouchés, étiquetés, collectés en packs puis en palettes.
Mon biberon n’est-il pas « mou » ?
Une bouteille Cristaline de 1,5 litre est composée d’un peu moins de 20 grammes de PET. « Nous avons reçu un peu de critiques avant, de la part de personnes qui nous disaient « votre bouteille est douce » mais avoir une bouteille légère est un avantage, elle utilise moins de plastique », souligne Agnès Jacquot. L’entreprise souhaite bientôt passer à 30 % de plastique recyclé dans ses bouteilles pour être « toujours un peu en avance sur la loi ». Mais pour continuer d’augmenter le taux de plastique recyclé dans ses bouteilles, Alma Sources souhaite miser sur la collecte.
En France, environ 65 % des bouteilles en plastique sont recyclées. Le reste est abandonné dans la nature, perdu dans les poubelles noires ou déclassé au centre de tri. La France et l’Union européenne ambitionnent de porter ce taux à 90 % d’ici 2029. Avec son implantation territoriale et ses chèques, l’Ecobox pourrait bien apporter sa contribution à la construction d’un monde plus circulaire.