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ce témoignage montre l’horreur des femmes privées d’avortement

ÉTATS-UNIS – Contraints de vivre en enfer à cause de la loi. Il y a deux ans aujourd’hui, le 24 juin 2022, les États-Unis subissaient un choc électrique avec l’abrogation du droit fédéral à l’avortement décidée par la Cour suprême américaine. Depuis cette décision donnant aux Etats toute latitude pour légiférer dans ce domaine, une vingtaine ont interdit ou fortement restreint l’accès à l’avortement.

A l’occasion de ce triste anniversaire, France 5 diffuse ce dimanche 23 juin à 21h05 le documentaire « L’avortement aux Etats-Unis : le grand fossé » qui plonge dans la société civile américaine et montre le combat des femmes qui veulent avorter. Mais aussi celle des médecins et soignants en première ligne pour les aider, à la frontière du « États religieux » où l’accès à l’avortement a disparu. Quitte à mettre leur vie en danger.

Le rapport – comprenant HuffPost est partenaire- a lieu dans plusieurs États, comme le Texas qui possède l’une des lois les plus restrictives du pays, le Colorado et l’Illinois où l’avortement reste légal. On y découvre des femmes enceintes désireuses d’avorter et piégées par la législation, tentant d’accéder aux soins dans un État libéral. Quand ils ont assez d’argent pour se le permettre, ce qui est loin d’être le cas de tout le monde. Parfois, elles n’ont d’autre choix que de mener leur grossesse à terme, quitte à frôler la mort ou à finir traumatisées.

Devoir attendre une septicémie pour pouvoir obtenir de l’aide

C’est le cas d’Elisabeth Weller, dont on peut voir le témoignage dans la vidéo en tête d’article, extrait exclusif du reportage de France 5. Vivant au Texas, à Houston, elle est tombée enceinte début 2022 avant de perdre les eaux à 18 semaines, condamnant ainsi sa grossesse. Alors qu’on lui affirme que les chances de survie de son fœtus sont quasiment inexistantes, on lui précise également que les médecins de l’hôpital ne pourront pas la toucher en raison de la loi texane en vigueur.

Cependant, en mai 2022, la Cour suprême n’avait pas encore rendu sa décision fatidique. Mais une autre loi, adoptée en septembre 2021, était déjà appliquée : celle de « loi du battement de coeur  » Ou  » SB8 », qui interdit tout avortement tant que les pulsations sont détectables, soit vers la sixième semaine de grossesse. Sauf si la mère court un grave danger.

Coincée, Élisabeth Weller n’a pas vraiment le choix : puisque son fœtus est en vie, elle doit laisser sa grossesse suivre son cours, sachant qu’en l’absence de liquide amniotique, elle a de très fortes chances de contracter une infection qui pourrait être mortelle. «  Le médecin m’a dit que la seule façon pour moi d’obtenir de l’aide était de revenir suffisamment malade, par exemple en cas de sepsis. « , a-t-elle expliqué au journaliste de France 5. On lui a également indiqué qu’elle devait attendre des signes cliniques précis : fièvre d’au moins 40°C et écoulements jaune vif particulièrement nauséabonds,  » pour te faire vomir « .

Forcée de voir son bébé condamné mourir dans ses bras

Des symptômes qui sont finalement arrivés après plusieurs jours d’attente terrible avec son mari.  » Nous nous sommes embrassés en disant « Merci merci » et c’était un moment d’exaltation, de fête et pourtant c’était aussi le moment le plus horrible de nos vies », raconte la jeune femme en larmes. Elle a finalement pu avorter quelques jours plus tard… mais seulement une fois que le cœur du fœtus a cessé de battre.

En 2023, avec cinq autres femmes, elle poursuit l’État du Texas en justice pour faire annuler cette loi SB8 qui met sa vie en danger. L’une d’elles est Samantha, que l’on peut voir dans le documentaire témoigner à la barre lors de l’audience. Elle a également dû poursuivre sa grossesse alors que son fœtus souffrait d’une malformation crânienne qui ne lui laissait aucune chance de survie.

Faute d’argent pour voyager dans un État libéral, elle a dû donner naissance à une petite fille qui est décédée dans ses bras quatre heures plus tard. En racontant son témoignage, la jeune femme a des haut-le-cœur et vomit à la barre, tant le traumatisme est encore fort.

Préserver l’accès à l’avortement, parfois au péril de la vie des soignants

Une autre femme a également été appelée à témoigner lors de ce procès, mais cette fois-ci en qualité de gynécologue, pour appuyer le côté inhumain de la loi. S’adressant à France 5, Damla Karsan dénonce la zone grise de l’exception médicale qui fait peur aux personnels de santé d’intervenir pour soigner. Car les sanctions sont très, très lourdes en cas d’avortement clandestin : 99 ans de prison, perte du droit d’exercer la médecine et 100 000 euros d’amende.

Une épée de Damoclès qui empêche soignants et cliniques d’agir, parfois même dans des cas dramatiques.  » Je sais qu’il y a des morts, ce n’est qu’une question de temps avant qu’ils soient révélés », assure Damla Karsan.

Dans les États libéraux, même si l’avortement est toujours légal, la situation reste compliquée. Parce que les cliniques qui pratiquent des avortements doivent subir les actions de militants fanatiques « pro-vie ». C’est le cas de Warren Hern, un obstétricien-gynécologue du Colorado. Sa clinique, qui a déjà été la cible d’rafales de balles, dispose de fenêtres blindées et de sas de sécurité. Son ami, le docteur George Tiller, a été assassiné en 2009 après plusieurs tentatives de meurtre parce qu’il pratiquait des avortements thérapeutiques.

Malgré tout, même s’il sait que sa vie est en danger, Warren Hern garde sa clinique ouverte, à toute femme venant du Colorado ou d’un autre État pour demander de l’aide. Un scénario que les Texans anti-avortement veulent aussi interdire aujourd’hui en empêchant les femmes enceintes de prendre l’autoroute.

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Gérard Truchon

An experienced journalist in internal and global political affairs, she tackles political issues from all sides
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