Ce film de John Wayne a fait des dizaines de victimes – Actus Ciné
Sorti en 1956 avec un improbable John Wayne déguisé en Gengis Khan, « Le Conquérant » est passé à la postérité avant tout pour des raisons absolument dramatiques. La raison ? Un certain Dirty Harry. Et ce n’est pas le personnage joué par Clint Eastwood…
Visage carré, mâchoire serrée, posture virile, il incarnait le héros intrépide et irréprochable de l’âge d’or d’Hollywood. John Wayne, surnommé The Duke, était l’acteur emblématique et favori des cinéastes Howard Hawks et John Ford, presque toujours l’archétype du cow-boy téméraire investi dans le désir de faire triompher la loi.
Mais John Wayne, c’est aussi l’improbable Conquérant, long-métrage dans lequel l’acteur incarne le leader mongol Gengis Khan.
Sorti en salles en 1956, John Wayne incarne dans ce film Temujin, un combattant qui deviendra Gengis Khan, fondateur, au début du VIIIe siècle, de l’empire mongol. Réalisée par Dick Powell, l’œuvre, critiquée par la critique, se distingue par une qualité d’acteur douteuse et par l’erreur flagrante de casting de son personnage principal.
Mais si le film reste dans les mémoires pour l’incongruité de son casting, il l’est davantage pour des raisons absolument dramatiques. L’équipe du film a été victime collatérale des retombées radioactives d’un site d’essais nucléaires de l’armée américaine…
Dirty Harry n’est pas seulement un personnage joué par Clint Eastwood
19 mai 1953, désert du Nevada. Dans la zone militaire de Yuccat Flat, le Laboratoire National de Los Alamos, créé dans le cadre du Projet Manhattan pendant la Seconde Guerre mondiale, a procédé à un nouvel essai d’explosion nucléaire. Nom de code : Harry.
D’une puissance de 32 kilotonnes, l’explosion atmosphérique est redoutable. Sauf un détail. En raison d’une erreur de calcul et d’un changement de direction du vent, les retombées radioactives de l’explosion se sont propagées dans plus de 3 000 comtés du pays…
Des retombées aux conséquences sanitaires dramatiques, qui valent à cet essai nucléaire le surnom de « Dirty Harry ».
Deux ans après l’explosion, Howard Hughes envoie son réalisateur Dick Powell tourner non loin du site, à Saint George dans l’Utah, son nouveau film, Le Conquérant. John Wayne hérite donc du rôle-titre de Gengis Khan.
Toujours inquiet de la proximité de la zone d’essais nucléaires et d’éventuelles radiations, Howard Hughes a contacté la Commission américaine de l’énergie atomique pour obtenir des conseils. La réponse ? Pas de problème, le site est parfaitement sécurisé…
L’équipe de tournage est ainsi exposée pendant trois mois à des radiations 400 fois supérieures à la dose normale communément admise. Elle totalise 220 personnes et parmi ce nombre, 91 ont développé une forme de cancer avant 1981 et 46 en sont décédées, dont John Wayne.
Si l’intéressé était un gros fumeur (entre 4 et 6 paquets par jour, puis deux après le film Alamo) il développa un cancer du poumon en 1964, puis un cancer de l’estomac. Wayne a même amené ses deux fils, Patrick et Michael, sur le lieu du tournage : tous deux ont également développé un cancer par la suite.
Petite anecdote glaçante supplémentaire : un compteur Geiger, pour mesurer la radioactivité, a même été apporté sur le lieu de tournage par Wayne. Le compteur est devenu tellement fou que l’acteur a pensé qu’il était en panne…
Ce qui reste de cette séquence est un plan célèbre, qui est le suivant :
Depuis 1990, un fonds de soutien créé par le Congrès américain, destiné à aider les populations touchées par les retombées de Dirty Harry, a versé plus de 2 milliards de dollars d’aide sous diverses formes. A Saint George, le taux de cancer reste encore, 71 ans après l’explosion, anormalement très élevé.