« Cela a commencé par la peur. » Originaire de Perros-Guirec (22), Jean
est arrivé à Nouméa, en Nouvelle-Calédonie, dimanche 12 mai. Dans le cadre de son travail, il a dû y rester deux semaines. Cependant, dans la nuit du 13 au 14 mai, de violentes émeutes éclatent un peu partout dans la ville. « Depuis mon hôtel, j’ai entendu des coups de feu et des explosions. C’était vraiment impressionnant », se souvient-il. « Le matin, il y avait une forte odeur de brûlé dans la rue. » Si les premières nuits ont été « très intenses », le calme est progressivement revenu autour de son hôtel, situé au sud de Nouméa. « Les émeutes se limitent actuellement au Nord. » Depuis lundi, Jean a de nouveau le droit de sortir en journée pour se rendre sur son lieu de travail « mais à 18 heures, je dois rentrer car il y a un couvre-feu. » Le midi, il déjeune à proximité, dans des restaurants qui ont réussi à s’approvisionner.
«Nous essayons de partager le peu d’informations dont nous disposons»
Récemment, « la colère et la frustration ont remplacé la peur », car, avec la fermeture de l’aéroport, ce père de trois jeunes enfants ne sait toujours pas quand il pourra retourner auprès des siens. « Je viens d’apprendre que mon vol était annulé pour la troisième fois, c’était dur à supporter », déplore-t-il. Les autorités viennent d’annoncer que l’aéroport de Nouméa sera fermé jusqu’au 28 mai. « Mon vol n’a toujours pas été reprogrammé et nous n’avons absolument aucune visibilité. A l’aéroport, les guichets sont fermés et personne ne nous répond. »
Petit à petit, il parvient à nouer des liens avec une dizaine de Français coincés dans le même hôtel que lui. « Nous essayons de partager le peu d’informations dont nous disposons. » Récemment, le sentiment d’abandon s’est renforcé lorsque les Australiens et les Néo-Zélandais ont été rapatriés par des avions militaires. « Les Australiens eux-mêmes ne comprennent pas pourquoi ils peuvent partir et nous, Français, restons à quai. »
Coincé encore plusieurs semaines ?
La goutte d’eau est tombée jeudi, lors de la visite du président Emmanuel Macron. « Il est resté une journée. Il arrive et repart sans nous dire un mot. »
Désormais, Jean espère recevoir enfin des instructions de l’État français et ne plus être livré à lui-même : « On finit par se demander quand allons-nous enfin être pris en charge ? », s’alarme-t-il. « On entend de plus en plus de rumeurs. Certains disent que nous devrons rester des semaines, voire un mois de plus », s’inquiète-t-il. « Dégager les voies d’accès à l’aéroport est une chose, mais encore faut-il que le personnel puisse retourner au travail. Beaucoup d’entre eux ont vu leur quartier brûler. »