Budget, pénurie d'enseignants… « L'école est poussée au précipice », prévient Sophie Vénétitay du Snes-FSU
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Budget, pénurie d’enseignants… « L’école est poussée au précipice », prévient Sophie Vénétitay du Snes-FSU

Budget, pénurie d’enseignants… « L’école est poussée au précipice », prévient Sophie Vénétitay du Snes-FSU

Un choc des savoirs décrié, un nouveau ministre et récemment d’importantes coupes budgétaires… Ces dernières semaines n’auraient pas pu être plus turbulentes dans le monde de l’éducation. Alors que les vacances de la Toussaint commencent vendredi, 20 minutes fait le point avec Sophie Vénétitay, secrétaire générale du Snes-FSU (premier syndicat des enseignants des collèges et lycées).

Une intersyndicale, dont est membre le Snes-FSU, menace de faire grève pour la rentrée après la présentation du budget, qui prévoit la suppression de 4.000 postes. Où sommes-nous?

L’école est à un tournant, avec un manque flagrant de ressources pour fonctionner. La suppression de 4 000 postes, qui a été reçue comme un « coup dur » et qui suscite beaucoup de colère, va le pousser au précipice avec une dégradation des conditions de travail des enseignants et des conditions d’études des étudiants. Nous refusons que l’Éducation nationale soit une variable d’ajustement. On voit le ministre lundi, qui doit nous donner de vraies réponses. Sans cela nous verrons en effet très vite quelle mobilisation nous pourrons organiser.

Nouveauté critiquée, les groupes de niveaux en mathématiques et en français pour les classes de 6e et 5e semblent s’appliquer de manière très hétérogène. Quels retours avez-vous ?

L’enquête que nous avons menée a montré qu’à fin septembre, 62% des collèges n’avaient pas mis en place les groupes de niveaux comme le souhaitait Gabriel Attal, c’est-à-dire avec faible, moyen et fort. Au lieu de cela, il existe de nombreuses configurations. Ceux qui ont décidé de rester dans les classes sans les mélanger, apportent un peu de soutien. D’autres ont constitué des groupes hétérogènes, c’est-à-dire en nombre réduit mais sans critère de niveau, pour que chacun progresse.

Il y a aussi ceux qui ont pris le temps de mettre cela en place après la Toussaint, mais les contraintes importantes, notamment sur les horaires, pourraient pousser certains à abandonner. Il y a aussi le fait que les enfants sont perdus : ils sont en 6ème A pour l’anglais et l’histoire, puis dans le groupe A en français mais en B en maths… Quant aux professeurs, en français notamment, certains collègues regrettent de ne pas pouvoir le faire. ne pouvant plus mener des projets pédagogiques à long terme, du fait de groupes censés changer régulièrement.

Il y a aussi la question du manque d’enseignants…

Pour former cinq groupes sur quatre classes, il faut davantage d’enseignants, mais les ressources n’ont pas suivi partout. Plus généralement, il manquait au moins un enseignant dans 56 % des collèges et lycées après une semaine de cours, et on sait que tout n’est pas réglé aujourd’hui. Certains remplacements comme les congés maternité n’ont pas été effectués. Début octobre, sur le site de petites annonces du ministère, on comptait 1 811 offres, soit plus que la veille de la rentrée où il y en avait 1 301 !

Comme les trois dernières années, nous sommes au bord d’un retour aux pénuries. Ce devrait être un scandale national que l’État soit incapable de fournir une éducation à tous les étudiants de ce pays. Je vois des petites annonces sur France Travail, sur Facebook, dans les réunions parents-profs… J’ai l’habitude de dire que l’Éducation nationale est la plus grande enseigne de bricolage de ce pays.

Quel regard portez-vous sur les premiers pas de la nouvelle ministre Anne Genetet, déjà très critiquée ?

Elle est arrivée sans aucune connaissance du monde éducatif et avec un besoin de temps pour travailler sur les dossiers, ce qui est assez problématique compte tenu de la situation d’urgence dans laquelle se trouve l’Éducation nationale. Il est certain que répondre d’abord à un Tiktoker avant même de rencontrer les organisations syndicales n’a pas été très bien accueilli, tout comme sa confusion entre le 7 octobre et l’hommage à Dominique Bernard et Samuel Paty…

Lors de notre première rencontre début octobre, elle nous a fait un discours d’écoute, mais n’a pas eu de réponse à nos questions précises. Ce qu’on lui a dit, c’est qu’il fallait augmenter les salaires des enseignants car cela permettrait aussi d’en recruter davantage. Il faut quand même savoir que la France détient le record européen des classes de collège les plus fréquentées ! L’autre urgence, que nous lui répéterons lundi, est d’abandonner le choc du savoir, qui ne doit pas s’appliquer à la rentrée 2025 (qui prévoit notamment la généralisation des groupes de niveaux aux classes de 4e et 3e). . Il existe une attente très forte de rupture politique dans le milieu éducatif.

Le ministre a déjà retardé l’interdiction des téléphones portables, testés par 200 collèges depuis la rentrée. Comment avez-vous reçu cette annonce ?

Le fait qu’elle annonce qu’il n’y aura pas de généralisation imposée en janvier 2025 comme prévu desserre un peu l’étau, même si la question des téléphones mérite mieux que des annonces faites à la hâte. Nous avions déjà souligné ce paradoxe avec Nicole Belloubet : on ne veut plus d’ordinateurs portables dans les collèges alors que certains d’entre eux sont équipés de tablettes dont l’usage est facilement détourné par les étudiants.

La question doit être travaillée avec les familles car pour les cas de harcèlement (scolaire), c’est aussi le soir, la nuit, que les élèves reçoivent des messages. Il faut travailler sur un usage raisonné et pédagogique des écrans.

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