« Le budget est l’acte politique par excellence », a déclaré samedi Lucie Castets, devant un amphithéâtre comble pour son passage aux journées d’été des Insoumis. « Comment peut-on imaginer qu’un gouvernement démissionnaire, qui prétend gérer les affaires courantes, soit en train de préparer le budget de l’année qui va commencer ? », a-t-elle lancé sous les applaudissements.
La candidate du Nouveau Front populaire continue de revendiquer Matignon sans concession, suite aux pressions de Jean-Luc Mélenchon pour qu’elle soit nommée Premier ministre. Alors qu’Emmanuel Macron prend le temps des « consultations » à l’Elysée, Lucie Castets dénonce une manière « irresponsable » de « faire traîner le calendrier ».
Un budget « contradictoire » avec celui des Macronistes
Selon elle, le président de la République retarde volontairement sa nomination pour priver le prochain gouvernement de toute marge de manœuvre sur le budget, alors que le projet de loi de finances pour 2025 doit arriver devant les députés au plus tard le 1er octobre. « Il faut avoir de la visibilité », insiste la candidate à Matignon.
Car Lucie Castets entend présenter un budget radicalement différent de celui préparé par le gouvernement démissionnaire. Reconduire à l’identique les crédits 2024 ? Pas pour elle. La haute fonctionnaire entend mettre en œuvre le programme du PFN, qu’elle qualifie de « très ambitieux et très réaliste ». Impossible donc de respecter les « lettres de plafond » envoyées par Gabriel Attal la semaine dernière. « Ce que nous proposons, c’est exactement l’inverse de ce qu’a fait Emmanuel Macron. On ne peut pas faire plus contradictoire », a martelé le député LFI Eric Coquerel, réélu en juillet président de la commission des Finances à l’Assemblée nationale.
Tout en exhortant Emmanuel Macron à lui remettre les clés de l’exécutif au plus vite, Lucie Castets se dit « prête » à présenter un projet de loi de finances cohérent. « Nous n’avons pas attendu pour travailler sur le budget », insiste-t-elle. « Toutes nos nouvelles dépenses seront financées par de nouvelles recettes ». L’occasion aussi de fustiger le bilan du camp présidentiel : « J’ai dit à Emmanuel Macron que contrairement à lui, nous aurions une politique économique responsable, efficace et claire. Puisque ce n’est pas la gauche qui a conduit à l’ouverture d’une procédure de déficit excessif à Bruxelles ».
Dans un exercice de séduction de la base frondeuse, Lucie Castets a déroulé son propre paradigme économique. Selon elle, il faut avant tout « remettre au cœur des débats la question du consentement à l’impôt » car il serait « irresponsable et déraisonnable de ne pas actionner le levier de l’impôt ». Plutôt que de « ne pas toucher à un cheveu des milliardaires », la candidate du NFP promet donc de venir « avec sa tondeuse ».
Régulation financière
L’ancienne agente de renseignement financier a également souligné que les moyens publics sont « très insuffisants » pour lutter contre « la fraude et les schémas d’évasion fiscale internationale ». De manière générale, Lucie Castets affirme : il faut « accepter que le rôle de l’Etat est de réguler » et qu’il n’y a actuellement « pas assez de fonctionnaires pour le faire ».
Mais comment mettre en œuvre un tel programme sans majorité à l’Assemblée ? En réponse, Lucie Castets a souligné « un certain nombre d’ouvertures sur les questions fiscales » de la part de Gabriel Attal dans sa lettre envoyée mi-août à tous les parlementaires. « Il s’est montré ouvert à l’adoption d’un ISF vert, à la conditionnalité des aides aux entreprises, à la réduction des exonérations de cotisations patronales sur les hauts salaires », a-t-elle détaillé tandis que la salle huait l’ancien Premier ministre. « Je lui dis : allons-y, et nous trouverons des compromis sur ce type de texte. »
De son côté, Eric Coquerel a souligné que la plupart des « mesures d’urgence » promises par le Nouveau Front populaire « pourraient être prises par décret » : Smic à 1.600 euros, hausse du point d’indice pour les fonctionnaires, revalorisation des APL et des minimas sociaux, gel du prix des produits de première nécessité. Pour le reste, il veut croire, avec Lucie Castets, que des mesures « consensuelles dans la société », comme l’abrogation de la réforme des retraites ou la taxation des super dividendes, peuvent « trouver une majorité à l’Assemblée ».