Bruno Retailleau attaque la politique de Manuel Valls


Le nouveau ministre de l’Intérieur entend durcir la « circulaire Valls » de 2012, qui facilitait la régularisation des travailleurs sans papiers, et rétablir le délit de séjour illégal.

Cible prioritaire de ses premières interventions médiatiques, l’immigration clandestine est dans le viseur de Bruno Retailleau. Interrogé par Sonia Mabrouk sur les moyens qu’il compte mettre en œuvre à cet effet, le nouveau ministre de l’Intérieur a déclaré sur CNews qu’il souhaitait « demander (aux préfets) des résultats en matière de régularisations, de naturalisations et d’expulsions » affirmant que grâce à l’intervention de son groupe de sénateurs l’année dernière, « Nous avons changé la loi, j’y ai participé, nous avons des leviers qu’il faut saisir ».

Le nouvel occupant de la place Beauvau évoque ensuite des mesures administratives : « Je n’exclus pas de prendre, notamment par voie réglementaire, des mesures sur la circulaire Valls ; il peut y en avoir d’autres, par exemple sur l’AME. »Bruno Retailleau a finalement estimé qu’une loi sera nécessaire pour imposer d’autres mesures, citant notamment la « le rétablissement du délit de séjour irrégulier, supprimé par François Hollande il y a un peu plus de dix ans »ou encore un contrôle de l’immigration étudiante par exemple.

 » data-script= »https://static.lefigaro.fr/widget-video/short-ttl/video/index.js » >

Confirmant comme il l’avait annoncé lors de sa première interview avec Figaro Lundi après-midi, son objectif est de « mettre un terme aux entrées illégales »Bruno Retailleau a ainsi exprimé son intention de revenir sur deux mesures prises par Manuel Valls, son prédécesseur au ministère de l’Intérieur sous François Hollande.

Resserrement de la « circulaire Valls »

Le premier d’entre eux est le « Circulaire de Valls »Un texte présenté par Manuel Valls le 27 novembre 2012 et envoyé le lendemain à tous les préfets du pays, dans lequel l’ancien ministre de l’Intérieur précisait les critères que devait remplir une personne en situation irrégulière pour obtenir un titre de séjour. L’objectif de ces instructions envoyées à l’administration était de fixer des règles précises pour la régularisation des sans-papiers, conformément à une promesse de campagne de François Hollande qui entendait lutter contre l’arbitraire des décisions préfectorales.

En réalité, cette circulaire a surtout permis d’assouplir les conditions de régularisation des sans-papiers, notamment en permettant d’accorder un titre de séjour aux sans-papiers dont l’enfant est scolarisé en France depuis au moins trois ans, ou à ceux qui résident en France depuis au moins cinq ans, qui ont travaillé au moins huit mois au cours des deux dernières années et qui disposent d’un contrat de travail ou d’une promesse d’embauche. Cette circulaire est toujours en vigueur aujourd’hui. « source gouvernementale » avait indiqué à L’Express L’an dernier, lors des débats sur la loi sur l’immigration, cette circulaire avait permis de régulariser 335 000 sans-papiers en 10 ans (toutes catégories confondues : étudiants, travailleurs, parents d’enfants scolarisés…).

Ce sont donc d’abord les conditions de régularisation prévues par la circulaire Valls que Bruno Retailleau entend durcir, afin de demander aux préfets « réglementer moins » (une instruction que Bruno Retailleau comprend comme le pendant d’un diptyque, la première partie étant « expulser davantage »selon ses propos lundi soir à 20h sur TF1).

En réalité, Bruno Retailleau avait déjà attaqué les critères de la circulaire Valls lors des débats parlementaires sur la loi sur l’immigration, alors que le premier texte présenté par le gouvernement à l’automne 2023 entendait faciliter la régularisation des travailleurs sans papiers sous certaines conditions. Initialement, Bruno Retailleau, alors président du groupe LR au Sénat, avait obtenu des sénateurs le retrait pur et simple de cet article de loi, proposant à la place un durcissement des critères de la circulaire Valls. « Suite au vote du Sénat, les préfets auront désormais l’obligation de vérifier non seulement la réalité et la nature des activités professionnelles de l’étranger (immigré en situation irrégulière qui demande un titre de séjour), mais aussi son intégration sociale et familiale, son respect de l’ordre public, son intégration dans la société française, son adhésion au mode de vie et aux valeurs de la communauté nationale, et son absence de condamnation pénale. »indique un communiqué signé Bruno Retailleau.

Finalement, après de nombreuses négociations avec la droite sénatoriale, le gouvernement a obtenu le maintien de l’article sur la régularisation des travailleurs sans papiers dans certaines professions en tension, et cet article, qui ne prévoyait donc pas clairement un retour à la circulaire Valls, a survécu à la censure du Conseil constitutionnel.

Rétablissement du délit de séjour irrégulier

Ce n’est pas le cas en revanche d’une autre mesure négociée par Bruno Retailleau, et reprise dans le texte final de la loi sur l’immigration : le rétablissement d’un délit de séjour irrégulier, passible d’une amende. Cette mesure a été purement et simplement retirée par le Conseil constitutionnel au motif qu’elle constituerait une « cavalier législatif »c’est-à-dire qu’elle serait sans rapport avec l’objet principal de la loi.

Il s’agit là d’une énième mesure qui vise à abroger une décision de François Hollande et qui figure dans le « Loi Valls » du 31 décembre 2012. C’est en effet par cette loi portée par l’ancien ministre de l’Intérieur que le séjour irrégulier en France a cessé d’être une infraction pénale, empêchant ainsi la police de placer en garde à vue toute personne en situation irrégulière. Cette même loi Valls a également affaibli la répression de l’aide à l’entrée et au séjour irréguliers, en empêchant les juges de sanctionner les membres d’associations ayant proposé des conseils juridiques ou un hébergement à des clandestins entrés illégalement sur le territoire. Au lieu de poursuites pénales, la loi a prévu la possibilité d’une détention administrative des clandestins, et l’entrée irrégulière sur le territoire français est restée une infraction pénale.

Bruno Retailleau considère donc que cette infraction pénale de séjour irrégulier doit être rétablie, contrairement à plusieurs décisions de la Cour de justice de l’Union européenne prises en 2010 et 2011 en application de la « directive de retour » Adopté par l’Union européenne en 2008, et confirmé en juin 2012 en France par un arrêt de la Cour de cassation. Dans l’amendement proposé par les sénateurs LR en 2023, le délit de séjour irrégulier aurait été passible d’un an d’emprisonnement et de 3 750 € d’amende. Depuis 2012, Marine Le Pen et Éric Zemmour, mais aussi Éric Ciotti ou encore Rachida Dati avaient également proposé le rétablissement du délit de séjour irrégulier. Fin 2023, Gérald Darmanin a donné son assentiment aux députés du camp présidentiel pour accepter cette demande des Républicains lors de l’examen de la loi en commission mixte paritaire.

hd1

Gérard Truchon

An experienced journalist in internal and global political affairs, she tackles political issues from all sides

Recent Posts

La Chine procède à un test rare de missile balistique intercontinental dans le Pacifique

La Chine a procédé mercredi 25 septembre à un rare essai de missile balistique intercontinental dans le Pacifique, a annoncé…

5 secondes ago

Hommage personnel de Karim Benzema à Raphaël Varane (retraite de Varane)

L'élégance de Raphaël Varane, sur et en dehors du terrain, le méritait. Après avoir annoncé sa retraite, l'ancien défenseur des…

43 secondes ago

Lady Gaga tourne un clip au Louvre pour lancer l’exposition « Figures du fou » et le film « Joker »

Ce clip annonce l'exposition consacrée aux "figures du fou" au musée du Louvre et la sortie du film "Joker :…

2 minutes ago

Starbucks débarque plus tôt que prévu au Mans : à quoi faut-il s’attendre pour l’ouverture ? – Ouest-France

Starbucks arrive plus tôt que prévu au Mans : à quoi faut-il s'attendre pour l'ouverture ?Ouest de la France

3 minutes ago

Décès d’un homme criblé de balles dans un trafic de drogue

Six personnes sont poursuivies en lien avec cet «homicide en bande organisée» survenu le 30 août dans un appartement situé…

4 minutes ago

« C’est à nous de développer notre arsenal juridique pour protéger les Français », a déclaré le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau.

Le nouveau pensionnaire de la place Beauvau et cadre du parti Les Républicains a réagi sur le réseau social X…

5 minutes ago