Bruno Le Maire, un septennat à Bercy terni par la dérive des finances publiques
Après sept ans à la tête de l’économie française, Bruno Le Maire quitte Bercy avec une longévité record et un bilan terni par la dérive des finances publiques de la France.
Nommé samedi soir, son successeur Antoine Armand aura la difficile tâche de tenter de réduire une dette et un déficit publics considérables, où le ministre sortant n’a pas réussi à trouver de remède.
Il pourra s’appuyer sur Laurent Saint-Martin, nommé ministre du Budget et des Comptes publics, en remplacement de Thomas Cazenave.
Signe de l’importance que le gouvernement accorde à la question brûlante de l’ampleur du déficit,
Face à la menace d’un nouveau dérapage du déficit public, le nouveau ministre des Finances devra piloter le budget pour 2025.
Il s’agit d’un casse-tête arithmétique quant à l’ampleur des efforts à fournir, entre réduction des dépenses et augmentation des impôts, et d’un défi politique quant au soutien à trouver au Parlement.
Pendant sept ans, Bruno Le Maire, 55 ans, a piloté le « doublure » Bercy et l’économie française ont traversé les crises, avec des aides massives, avant que la France ne devienne un mauvais élève européen – au point d’être épinglée par Bruxelles pour déficit excessif et de voir sa note dégradée.
Il a battu le record de longévité à Bercy sous la Ve République – Valéry Giscard d’Estaing a fait mieux, certes par intermittence – mais la défaite du camp présidentiel aux législatives anticipées cet été a sonné la fin de la partie.
Tête à droite
En se dirigeant vers la droite, Bruno Le Maire a déployé la politique de l’offre d’Emmanuel Macron et son cortège de baisses d’impôts pour les entreprises et les ménages.
Défendant les réformes contestées des retraites et de l’assurance chômage, il a fait du plein emploi et de la réindustrialisation de la France des priorités, conditions nécessaires selon lui à une croissance durable et à un pays attractif.
Partisan d’un État moins gaspilleur, il ouvre pourtant grand les cordons de la bourse face au Covid, à l’inflation et à la flambée des prix de l’énergie, avant d’amorcer un virage vers l’orthodoxie budgétaire, fustigeant la culture française de la dépense et tentant tant bien que mal de sortir progressivement de la « quel qu’en soit le prix ».
Au crédit du ministre, Olivier Redoulès, directeur des études chez Rexecode, cite « la réduction massive des impôts sur la production » Et « créer un récit autour de l’industrie et de la souveraineté ». « Mais il n’a pas réussi à créer un consensus politique, y compris dans son propre camp, autour de l’objectif d’assainissement des finances publiques. »
Son aspiration à la vertu budgétaire n’a pas été concrétisée.
Après la reprise post-Covid de l’économie, la croissance ralentit, le déficit public glisse (5,5% en 2023) et la dette explose (près de 3 160 milliards d’euros et 111% du PIB à fin mars).
« Nous sommes toujours responsables de nos actes lorsque nous sommes au gouvernement »estime le premier président de la Cour des comptes, Pierre Moscovici.
Bruno Le Maire « Il s’est vraiment consacré au pays et il a connu une période très réussie »ajoute-t-il sur France Inter. Mais « collectivement »malgré la fin annoncée de la « quel qu’en soit le prix », « Nous avons continué à dépenser, beaucoup dépenser ».
« Le meilleur possible »
Se voir offrir le portefeuille de l’Économie et des Finances en 2017 lui a permis de renaître politiquement, après son échec cuisant à la primaire de la droite.
Un choc dans le parcours jusque-là lisse de cet élève brillant issu des banlieues aisées, diplômé de l’École normale supérieure et de l’École nationale d’administration, qui fut le directeur de cabinet de Dominique de Villepin à Matignon avant d’être élu député UMP en 2007.
Défenseur du patriotisme économique, l’ancien secrétaire d’Etat aux Affaires européennes (2008-2009) et ministre de l’Agriculture (2009-2012) sous François Fillon fait campagne à Bruxelles pour intensifier la coopération industrielle européenne face à la Chine et aux Etats-Unis.
Sur la scène internationale, il promeut la taxation des milliardaires.
Bruno Le Maire, dont on disait régulièrement qu’il nourrissait des ambitions à Matignon ou à l’Elysée, a décidé de tourner la page de la politique, au moins temporairement. Cet ancien professeur de lettres, auteur d’une quinzaine d’ouvrages, revient à l’enseignement, cette fois d’économie et de géopolitique, à Lausanne (Suisse).
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