Des ouvriers travaillent sur un Boeing 737 MAX dans l’usine de l’avionneur américain à Renton, dans le nord-ouest des Etats-Unis, le 27 mars 2019 (AFP / Jason Redmond)
Grand jour pour Boeing: l’avionneur américain a publié mercredi sa pire perte trimestrielle depuis quatre ans, mais espère la validation d’un nouvel accord social, qui mettrait fin à la coûteuse grève qui paralyse deux usines cruciales depuis mi-septembre .
Pas de surprise : Boeing a annoncé une perte nette de 6,17 milliards de dollars, alourdie par de lourdes charges de cinq milliards dans ses branches Aviation commerciale (BCA) et Défense et espace (BDS) qu’il avait dévoilées le 12 octobre. perte de 6,12 milliards de dollars.
« Ma mission est assez claire. Remettre ce grand navire dans la bonne direction et rétablir Boeing dans la position de leader que nous connaissons et que nous souhaitons », a déclaré Kelly Ortberg, patron de l’avionneur depuis début août, dans des propos accompagnant cette publication des résultats.
Selon un calcul de l’AFP, Boeing a enregistré plus de 31 milliards de dollars de pertes nettes entre début 2020 et fin septembre 2024. Sa plus forte perte trimestrielle a atteint 8,42 milliards de dollars au quatrième trimestre 2020.
La branche BCA souffre du ralentissement de la production, afin de mettre en place des mesures d’amélioration de la qualité après plusieurs années de bizarreries qui ont culminé avec un incident en vol en janvier dernier.
Le programme 777X, le dernier en date de Boeing, retardé par un problème de certification, à Everett dans le nord-ouest des Etats-Unis, le 25 janvier 2020 (AFP / Jason Redmond)
Il souffre également du débrayage de plus de 33 000 ouvriers autour de Seattle (nord-ouest) – où Boeing est né en juillet 1916 – qui paralyse depuis le 13 septembre les deux principales usines du groupe, produisant le 737 (son avion le plus vendu). . ), le 777, le 767 et plusieurs programmes militaires.
La branche locale du Syndicat des machinistes (IAM) a annoncé samedi un accord de principe « digne d’être pris en considération ». Un premier accord, annoncé le 8 septembre, a été massivement rejeté par les syndicalistes, qui ont voté pour une grève immédiate.
Le nouveau projet d’accord prévoit notamment une augmentation salariale de 35 % sur quatre ans (l’IAM réclamait 40 %), le rétablissement d’une prime annuelle majorée, une cotisation patronale majorée au régime de retraite et une prime à la signature majorée.
– Ratification ? –
Les membres de l’AIM votent mercredi. Le résultat est attendu dans la soirée. Si le projet d’accord est ratifié, les travaux pourraient reprendre vendredi.
« Je pense que le vote va être serré », a déclaré mardi sur CNBC Jon Holden, président de la branche locale de l’IAM-District 751.
En cas de rejet, « nous reprendrons les négociations. (…) C’est la seule option, nos membres feront ce choix », a expliqué M. Holden.
La reprise de l’activité est une priorité pour le groupe. En septembre, elle a livré 33 avions, achevés avant la grève, mais les prochains mois devraient être économes.
Jon Holden, président du district 751 de l’IAM, à Seattle dans l’ouest des États-Unis, le 15 octobre 2024 (AFP / Jason Redmond)
Outre le mécontentement des compagnies aériennes, contraintes de revoir leurs programmes de vols depuis 2023, moins de livraisons signifie aussi moins de revenus – environ 60 % du prix est payé à la livraison – et, par conséquent, une trésorerie fragile.
Le géant de l’aéronautique avait déjà du mal à se relever après les crashs d’avions de 2018 et 2019, qui ont fait 346 morts, et la pandémie de Covid-19.
Face au risque d’être déclassé en catégorie spéculative par les agences de notation financière, Boeing a annoncé au fil des semaines des mesures pour préserver sa trésorerie, dont une réduction de 10 % de ses effectifs mondiaux (près de 171 000 salariés fin 2023).
Et, pour se sauver, le groupe a déposé le 15 octobre auprès de l’organisme américain de surveillance des marchés boursiers (SEC) un projet de levée de fonds d’un montant maximum de 25 milliards de dollars, valable trois ans.
Selon les experts, elle devrait débuter par une augmentation de capital de 10 à 15 milliards de dollars fin 2024-début 2025.
L’avionneur a également obtenu une deuxième ligne de crédit de dix milliards de dollars.
Les analystes de TD Cowen ont également évoqué des ventes d’actifs non stratégiques, identifiant un potentiel d’une vingtaine de milliards.
Un panneau « en grève » à l’entrée de l’usine Boeing de Renton dans l’ouest des Etats-Unis, le 13 septembre 2024 (GETTY IMAGES NORTH AMERICA / STEPHEN BRASHEAR)
La branche BDS donne également du fil à retordre à l’avionneur depuis quelques temps, car elle génère des pertes importantes sur les contrats au forfait pour le gouvernement américain et l’agence spatiale américaine (Nasa).
Concernant les crashs, Boeing attend de savoir si un juge fédéral approuve un accord de plaidoyer de culpabilité conclu fin juillet lui permettant d’éviter un procès pénal. Au civil, plus de 90 % des plaintes ont abouti à un règlement à l’amiable à ce stade.
Boeing « est comme un héros grec, un groupe autrefois symbole de la grandeur américaine, un titan de l’industrie aérospatiale et de défense, qui traverse une crise provoquée par ses nombreuses décisions », expliquaient récemment les analystes de Bank of America (BofA). ), estimant qu’il faudrait « au moins une décennie pour retrouver son lustre d’antan ».