Boeing a violé l’accord visant à éviter des poursuites pour deux accidents qui ont tué 346 personnes
Le ministère américain de la Justice a notifié à un juge fédéral, dans une lettre mardi 14 mai, que Boeing n’avait pas respecté certaines conditions d’un accord qui lui évitait d’être poursuivi pénalement pour deux accidents de son 737 Max ayant causé au total 346 morts à fin 2018 et début 2019.
Désormais, « Boeing est passible de poursuites » dans cette affaire, écrit le ministère, qui dit étudier la possibilité de poursuivre, ou non, l’avionneur américain, en pleine tempête après plusieurs incidents récents. « Nous pensons avoir honoré les conditions de cet accord », a répondu Boeing dans un communiqué, se disant prêt à « répondre » sur cette affaire gérée par un juge fédéral du Texas.
Les autorités fédérales « ont déterminé que Boeing avait violé ses obligations » de l’accord « en n’ayant pas planifié, mis en œuvre et appliqué un programme » visant à se conformer aux lois américaines « dans l’ensemble de ses opérations », note la lettre du ministère.
« Pour n’avoir pas respecté pleinement les termes et obligations » de l’accord, « Boeing est passible de poursuites par (le gouvernement fédéral) pour toute infraction pénale » connue du parquet, peut-on encore lire sur ce document judiciaire.
C’est « une immense victoire », a réagi Catherine Berthet, qui a perdu sa fille Camille dans l’accident d’Ethiopian Airlines. « Nous nous battrons pour un procès pour homicide involontaire commis par Boeing et ses dirigeants. » C’est un « bon premier pas », mais « nous devons voir davantage d’actions de la part du ministère de la Justice pour demander des comptes à Boeing », a déclaré Paul Cassell, qui représente les familles des victimes, dans un communiqué.
Accord financier
Le 7 janvier 2021, Boeing a conclu un accord avec les autorités américaines pour un montant de 2,5 milliards de dollars. A travers cet accord financier, le constructeur a reconnu avoir commis une fraude, en échange de l’abandon par le ministère de la Justice de certaines des poursuites le visant depuis les deux accidents mortels qui avaient entraîné l’immobilisation du 737 Max pendant 20 mois.
Dans le détail, le géant de l’aéronautique avait accepté de verser aux Etats-Unis une amende pénale de 243,6 millions, ainsi que 1,77 milliard d’indemnisation aux compagnies aériennes ayant commandé le 737 Max et 500 millions pour un fonds destiné à indemniser les proches des victimes du les deux accidents.
Le 29 octobre 2018, un 737 Max 8 de Lion Air s’est écrasé en mer une dizaine de minutes après son décollage de Jakarta, tuant 189 personnes. Le 10 mars suivant, le même modèle d’Ethiopian Airlines s’écrasait six minutes après le décollage près d’Addis-Abeba, tuant 157 personnes.
Diverses enquêtes avaient notamment mis en cause le logiciel anti-décrochage MCAS et dénoncé une formation insuffisante des pilotes.
» Première étape «
La remise en cause mardi de cet accord intervient dans un contexte compliqué pour Boeing. Depuis début 2023, le constructeur connaît des problèmes de production liés à un mauvais contrôle qualité, affectant ses avions phares, le 737 Max, et le 787 Dreamliner.
La perte en vol d’un butoir de porte, le 5 janvier, sur un nouvel avion d’Alaska Airlines a déclenché un jeu de dominos qui a déjà provoqué la chute de plusieurs dirigeants de Boeing – comme son patron Dave Calhoun, dont le départ est prévu fin 2024. – et la limitation de sa production du 737 Max.