Boeing a soumis sa « feuille de route » pour assainir son processus de production
L’avionneur Boeing a soumis jeudi au régulateur américain de l’aviation (FAA) un « feuille de route » pour résoudre ses problèmes de production, mis en évidence par un incident en vol début janvier.
« En fin de compte, il s’agit d’un changement systémique. Il y a beaucoup à faire « a indiqué Mike Whitaker, patron de la FAA, à la presse après une réunion de trois heures avec des dirigeants de l’avionneur.
Ils ont présenté le « plan d’action global » exigée par la FAA après l’incident survenu le 5 janvier sur un 737 MAX 9 d’Alaska Airlines.
Le nouvel avion, livré en octobre, a perdu ce jour-là un support de capuchon – un couvercle bloquant une sortie de secours redondante – en vol, causant seulement quelques blessés légers.
Dans la foulée, le régulateur a cloué au sol les 171 exemplaires ainsi configurés et a enquêté sur Boeing, qui a connu des problèmes de production tout au long de l’année 2023 sur le 737, son modèle phare, et sur le 787 Dreamliner.
Selon un rapport préliminaire de la Transportation Safety Agency (NTSB), plusieurs boulons fixant le support du capuchon manquaient.
Le 28 février, la FAA a demandé à Boeing de soumettre un plan dans les 90 jours. « pour résoudre ses problèmes systémiques de contrôle de qualité afin de respecter les normes de sécurité non négociables de la FAA ». Des mises à jour d’avancement ont été effectuées à trente puis soixante jours.
Indicateurs clef
Ce « feuille de route » comprend notamment « six indicateurs clés de performance bien distincts qui nous permettront de suivre en temps réel » la qualité de la production.
Ces indicateurs (KPI) « constituera notre tableau de bord pour voir ce qu’ils font en termes de sécurité »a affirmé le responsable du régulateur, laissant à Boeing le soin de fournir d’éventuels détails.
Ces KPI permettront d’évaluer en continu la production, d’alerter très tôt sur l’émergence de risques qualité et sécurité et de suivre les améliorations, a expliqué le groupe dans une synthèse du plan, en onze pages, publiée en début de soirée.
Selon Stephanie Pope, responsable de la branche aviation commerciale de Boeing depuis fin mars, ce plan s’articule autour de quatre catégories : « des investissements importants » dans la formation du personnel, « simplification » du processus industriel, en renforçant la culture de sécurité et de qualité » ainsi que « mesures spécifiques » contrôle et gestion de l’état du système de production.
« C’est un début, nous allons continuer à agir »a-t-elle déclaré, dans un message adressé plus tôt aux salariés.
Le directeur général Dave Calhoun, qui doit partir d’ici la fin de 2024, a parlé du » confiance « dirigeants et a assuré que Boeing assumerait « sa responsabilité envers les passagers de continuer à fournir des avions sûrs et de haute qualité ».
Des réunions hebdomadaires et trimestrielles sont prévues entre Boeing et la FAA, qui va renforcer ses inspecteurs qualité dans les usines de l’avionneur et de son principal fournisseur, Spirit Aerosystems.
Ce plan devait intégrer les conclusions de l’audit de la FAA ainsi que les 53 recommandations d’une commission d’experts indépendants qui ont conclu que le système de sécurité de Boeing présentait des déficiences.
Des poursuites ?
Ce panel, nommé par la FAA, a enquêté entre mars 2023 et février 2024. Sa mission découle d’une loi de 2020 adoptée après deux accidents de Boeing 737 MAX 8 en 2018 et 2019, qui ont fait 346 morts.
Dans cette affaire, le fabricant a conclu en 2021 un accord de poursuite différée (DPA) avec le ministère américain de la Justice.
Elle s’est engagée, entre autres, à renforcer son programme de conformité, avec une période de suivi de trois ans. Jusqu’au 7 janvier 2024.
Le ministère estimait mi-mai que Boeing n’avait pas « n’a pas rempli ses obligations » et a fait l’objet de poursuites pénales devant un tribunal fédéral du Texas. L’avionneur doit répondre avant le 13 juin.
Un dossier de plus à gérer pour la nouvelle équipe à la tête du constructeur depuis le 25 mars : remplacement immédiat du président du conseil d’administration et du chef de la branche aviation commerciale, et annonce du départ prochain de Dave Calhoun.
Administrateur de Boeing depuis 2009, ce dernier a été nommé directeur général début 2020 pour redresser la situation financière et assainir la production du groupe après les deux crashs, dus à un problème de conception.
L’avionneur a également souffert de la pandémie et des pénuries d’approvisionnement et de personnel qui en ont résulté.
Pour se renflouer, Boeing comptait surtout augmenter la cadence de production du 737, jusqu’à cinquante exemplaires par mois en 2025-2026.
Mais, fin février, le régulateur l’a gelé au niveau de fin 2023 -38 exemplaires mensuels-, jusqu’à ce que la production soit impeccable.
« Je ne pense pas que cela arrivera dans les prochains mois »a noté M. Whitaker jeudi, précisant que la FAA certifiait désormais chaque 737 MAX avant sa mise en service. « Et nous continuerons à le faire ».