En envisageant d’augmenter d’un milliard d’euros une taxe aérienne, le gouvernement risque de fragiliser les entreprises françaises. Explications.
« Mayday, Mayday, Mayday »… Pour renflouer les caisses de l’État, le gouvernement envisage de prélever un milliard d’euros supplémentaires sur le transport aérien l’année prochaine. Selon le journal Les échosBercy envisagerait en effet de tripler la taxe dite de solidarité sur les billets d’avion (TSBA). Du jamais vu auparavant.
Également appelée « taxe Chirac », cette contribution est entrée en vigueur en 2006, et aujourd’hui, seule la France l’applique. Cela concerne tous les vols au départ de la France. En effet, le taux de cette taxe dépend de deux facteurs : la destination et la classe de voyage.
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Il s’agit par exemple d’environ 3 € par passager en classe économique pour un vol vers un pays de l’UE ou dont la distance n’excède pas 1 000 km. En classe affaires et en première classe, il passe à 20 €. Pour les autres vols, le montant passe à 7,50 € en « éco » et 63 € pour les autres catégories de sièges.
Si le gouvernement agissait, le prix des billets d’avion s’envolerait littéralement. Les passagers devraient payer 140 € de plus pour un vol long-courrier en classe affaires, et 50 € de plus pour un siège en classe économique.
Une augmentation pour quoi faire ?
A l’origine, cette taxe a été instaurée pour aider l’organisation internationale Unitaid à lutter contre trois pandémies majeures : le sida, la tuberculose et le paludisme. Une intention louable que les acteurs du transport aérien n’ont jamais contestée. En revanche, l’éco-contribution ajoutée à cette taxe par le gouvernement français en 2020 ne fait pas l’unanimité. Et pour cause, cette écotaxe vise à développer les infrastructures ferroviaires de manière à proposer une alternative à l’avion. En clair, l’air est sollicité au secours… du train.
On ne sait pas encore à quoi servirait la nouvelle augmentation potentielle du TSBA. « J’espère que sa finalité sera clairement identifiée, explique Jean-François Dominiak, conseiller spécial à la présidence du Syndicat des compagnies aériennes autonomes (Scara). Si cela sert à aider le secteur à accélérer sa transition écologique, je pourrais comprendre. Mais si c’est uniquement pour réduire le déficit public, cela n’aurait aucun sens. J’ai envie de dire au gouvernement : ‘Attention au transport aérien qui est fragile !' »
La compétitivité des entreprises françaises menacée
Les entreprises françaises, Air France en tête, seraient les plus impactées par cette mesure. Ils opèrent un grand nombre de vols depuis la France, et notamment des vols long-courriers qui sont plus taxés que les vols courte distance. L’année dernière, la taxe de solidarité a permis à l’État de récolter 462 millions d’euros. La compagnie nationale et Transavia ont participé à hauteur de 30 %.
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Afin de maintenir leur compétitivité face aux compagnies étrangères, les transporteurs français pourraient choisir de ne pas répercuter la totalité de la taxe sur leurs passagers. Ils devraient alors réduire leurs marges déjà minimes. « La France est l’un des pays d’Europe, voire le pays d’Europe, qui taxe déjà le plus lourdement son secteur aérien » regrette Pascal de Izaguirre, le président de la Fédération nationale de l’aviation et de ses métiers (FNAM).
Le groupe Air France – KLM a payé l’année dernière quelque 3 milliards d’euros d’impôts à la France. Une pression fiscale supplémentaire pourrait faire perdre leur position aux entreprises françaises. Bien attachés à leur siège, ils attendent avec enthousiasme les annonces du gouvernement. La présentation du budget 2025 est fixée au jeudi 10 octobre prochain.