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Baisse des taux : qui perd, qui gagne ?

Baisse des taux : qui perd, qui gagne ?

Bonne nouvelle pour la croissance, les emprunteurs et les Etats, mais grimace pour les épargnants: la baisse des taux d’intérêt annoncée jeudi par la Banque centrale européenne (BCE), la deuxième en trois mois, a plusieurs conséquences sur l’économie.

Un soulagement pour les emprunteurs

Les banques commerciales obtiennent des liquidités de la BCE. En échange, elles doivent payer des intérêts, calculés sur la base du taux de refinancement, l’un des trois taux d’intérêt directeurs de la BCE.

Par un effet domino, les institutions bancaires répercutent ces coûts sur leurs clients.

Par exemple, la séquence de hausses de taux opérée par la BCE depuis deux ans pour lutter contre l’inflation a propulsé le taux moyen des crédits négociés en France de 1,07% en janvier 2022 à un pic de 4,21% en novembre 2023, selon l’Observatoire CSA de Crédit Logement.

En baisse lente depuis lors, le taux moyen s’est établi à 3,62 % en août, le crédit devenant moins cher lorsque les prêteurs constatent – ou anticipent – une baisse de son coût.

Croissance en vue ?

La nouvelle baisse de 0,25 point du principal taux d’intérêt de la BCE (le taux de dépôt) devrait assouplir les conditions de crédit pour les ménages et les entreprises. Ceux-ci pourront emprunter à un coût légèrement inférieur, et donc consommer et investir davantage, stimulant ainsi la croissance économique.

Un coup de pouce bienvenu pour l’économie de la zone euro, enlisée dans la stagnation depuis plusieurs mois. La BCE a abaissé jeudi sa prévision de croissance pour la zone euro cette année à 0,8%, contre 0,9% auparavant.

« Les ménages européens ont des économies et sont prêts à dépenser beaucoup d’argent, mais ils restent prudents. Une baisse des taux peut aider à rétablir la confiance. »a expliqué Julien-Pierre Nouen, directeur des études économiques chez Lazard Frères Gestion.

Cependant, « Ce n’est ni immédiat ni automatique, il faut souvent attendre jusqu’à douze mois pour voir les effets de l’assouplissement monétaire sur la croissance »a déclaré à l’AFP l’analyste de Saxobank, Andréa Tueni.

Une bonne affaire pour les États endettés

Tout comme les ménages et les entreprises, le prix auquel les États se financent est étroitement lié à la politique des banques centrales. Une baisse des taux permet un assouplissement des conditions de crédit pour les emprunts publics.

Avec le premier assouplissement de la BCE en juin, le taux auquel la France emprunte sur le marché obligataire à 10 ans pour se financer est passé de 3,28% le 1er juillet à 2,90% début septembre. Le taux allemand pour la même maturité, qui fait référence en Europe, est passé de 2,60% à 2,11%.

Un soulagement bienvenu à l’heure où la dette publique des pays européens devient de plus en plus préoccupante. Sept Etats membres, dont la France, sont soumis à une procédure européenne pour déficit excessif.

Le taux d’emprunt ne dépend toutefois pas uniquement de la BCE, car il prend également en compte la situation individuelle de chaque pays.

Pour la France, même avec une baisse des taux directeurs, « On peut craindre un effet à long terme, avec des marchés estimant de plus en plus que la dette n’est plus soutenable »tandis que le « La prime de risque des emprunts français augmente tranquillement depuis des années »selon Christopher Dembik, conseiller en investissement chez Pictet AM.

Les épargnants sont moins bien payés

Les banques commerciales détiennent des liquidités sur des comptes auprès de la BCE, rémunérées selon le taux de rémunération des dépôts de l’institution monétaire.

Les banques commerciales répercutent ces intérêts sur les comptes de leurs clients.

Les épargnants ont donc été les grands gagnants des hausses de taux opérées entre 2022 et 2024. La rémunération du Livret A, produit d’épargne le plus populaire en France, est passée de 0,50% en 2022 à 3% actuellement.

La baisse des taux prévue jeudi pourrait ainsi les pénaliser. Le 1er août, le compte d’épargne populaire avait déjà perdu un point de rendement, dans le sillage du premier assouplissement monétaire de la BCE, avec un taux ramené de 5% à 4%.

New Grb1

Gérard Truchon

An experienced journalist in internal and global political affairs, she tackles political issues from all sides
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