C’est un tremblement de terre. Selon nos informations, le ministère des Armées a retenu la proposition d’Airbus Defence & Space au détriment de celle de Dassault Aviation pour le programme d’avions de patrouille maritime (Patmar). La décision a été communiquée aux deux constructeurs. Ce programme vise à renouveler la flotte composée de 18 Atlantic 2 après 2030. C’est la première fois qu’Airbus remporte un concours en France face au constructeur du Rafale, qui comptait beaucoup sur ce programme. « Nous sommes les seuls en Europe à avoir une expérience depuis 1958. Nous sommes sur le Patmar depuis longtemps »avait d’ailleurs rappelé le PDG de Dassault Aviation en mai 2023 au Sénat. Finalement, le dérivé de l’A321XLR (pour eXtra Long Range, très longue portée, soit 11 heures de vol), qui a obtenu sa certification en juillet dernier, a remporté la compétition contre le Falcon 10X.
« Nous avons une grande confiance en nos capacités à remplir cette mission que de nombreux pays accomplissent avec des avions souvent assez anciens. Comme le P8 qui ne durera pas éternellement», a expliqué Jean-Brice Dumont dans un entretien à La Tribune en novembre 2023.
Ce qui semble avoir séduit le ministère des Armées, c’est qu’Airbus propose un avion de la famille A320 doté d’une grande capacité de charge utile. En ouvrant le ventre de l’avion, cela permet d’embarquer de nombreux équipements pour répondre au large spectre des missions de patrouille maritime. Très clairement, les deux avions font ce que l’autre ne fait pas : il y en a un qui ira plus vite et plus agile (Falcon 10X), l’autre qui aura une plus grande capacité d’emport de munitions (A321XLR). Pour le ministère, l’A321XLR est l’avion le plus adapté aux missions de l’armée française et de la Marine nationale. Mais c’est aussi le plus cher. Cela n’a pas freiné le ministère, qui a préféré s’en tenir aux missions de la Marine nationale. Le ministère a engagé actuellement 89 millions d’euros, dont huit millions en 2025, dans ce programme.
Deux études, un gagnant
En janvier 2013, la Direction générale de l’armement (DGA) mettait en concurrence les deux avionneurs en lançant deux études architecturales du futur avion de patrouille maritime, l’une adressée à Airbus, l’autre à Dassault. Aviation. Une étude qui visait à proposer une solution économiquement attractive répondant aux besoins opérationnels de la Marine nationale pour l’horizon post-2030. Les solutions proposées par les deux avionneurs devaient rester « ouvert à la coopération avec d’autres partenaires européens potentiellement intéressés ». Les innovations étudiées lors de ces études devaient porter sur l’amélioration des capteurs, des moyens de communication, la place de l’intelligence artificielle ou encore l’intégration de l’armement, notamment le futur missile anti-navire.
En matière de coopération européenne sur le Falcon 10-X, Dassault Aviation a défendu la place de Rolls-Royce en tant que motoriste de l’avion. Au Sénat, Eric Trappier a rappelé que l’équipe qui a conçu le moteur 10-X était « exclusivement une équipe allemande » que ce soit dans le domaine des affaires, du design, de la fabrication ou des bureaux d’études. Quant à Airbus, l’avionneur européen dispose déjà de tout un écosystème industriel en France et en Espagne pour produire cet avion.