Avec son « pacte législatif », Wauquiez déroule sa liste de courses et refuse une coalition – Libération
Double jeu à la sauce Wauquiez. De retour sur le devant de la scène après la dissolution, le député de Haute-Loire peaufine sa stratégie parlementaire, quelque peu ambiguë. D’un côté, il a négocié ces derniers jours avec Gabriel Attal, le Premier ministre démissionnaire, la répartition des postes stratégiques à l’Assemblée. « C’est le voleur du siècle » note un député Liot, en allusion aux deux vice-présidences et au poste de questeur obtenu par lui. En revanche, l’ancien ministre rejette toujours l’idée d’une coalition prônée par le chef de l’Etat après la défaite de son camp aux législatives. Pour pimenter sa position, Laurent Wauquiez a dévoilé ce lundi 22 juillet les contours de son projet de loi. « pacte législatif », un paquet de mesures mis sur la table du pouvoir macroniste.
Ragoût parlementaire
« Pour tout exécutif qui s’approprie ce pacte législatif, nous nous engageons, pour notre part, à voter les lois qui y figurent », a déclaré le député lors d’une conférence de presse à l’Assemblée, aux côtés du chef de file des sénateurs LR, Bruno Retailleau. Et Wauquiez de préciser, soucieux d’écarter la « fantasmes » : « Ce n’est pas une coalition gouvernementale et ce ne sera pas une coalition gouvernementale. (…) Nous sommes indépendants et nous le resterons. » Une manière de couper court aux spéculations de ceux qui l’ont vu, la semaine dernière, échanger avec Attal dans les couloirs du Palais-Bourbon pour les positions de l’institution, une scène vue comme le début d’un rapprochement entre le parti de Macron et les 47 députés de la « Droite républicaine ».
Voter des textes selon les intérêts de son camp, poser des questions « lignes rouges »… La méthode ressemble à celle appliquée par la droite depuis 2022. Replongé dans le bourbier parlementaire, Wauquiez, lui, ne jure que par le sérieux de sa démarche. Esquissant une « situation politique bloquée », l’élu refuse « être du côté de ceux qui bloquent ou qui jouent la politique du pire. » Son pacte est basé sur « une priorité absolue, la revalorisation de la France qui travaille et qui a travaillé toute sa vie. » Dans les vêtements de Sarkozy, il veut « trouver un réel écart de reconnaissance, de salaire net, entre ceux qui travaillent et ceux qui ne travaillent pas. » L’ancien ministre croit fermement à la pertinence de son observation faite il y a une quinzaine d’années, à l’époque critiquée même dans son propre camp, sur une « Un système de protection sociale qui nous coûte de plus en plus cher. »
« Tout est une question d’apparence »
Sa feuille de route s’articule autour « autorité »la relocalisation de la production industrielle et agricole et des services publics. Sa version législative comprend treize projets de loi, déjà dans les placards de la droite parlementaire. En matière régalienne, de purs classiques à droite : retour des peines plancher, présomption de légitime défense pour les policiers ou encore suppression des allocations familiales pour les parents de jeunes délinquants. Toutes les mesures de la loi sur l’immigration censurées par le Conseil constitutionnel devraient également être reprises. Pour le volet relocalisation, l’ancien ministre défend la baisse des impôts de production, la « préférence locale » dans les commandes publiques ou un moratoire sur les nouvelles normes. Pour le travail, sa priorité, Wauquiez met en avant la défiscalisation des heures supplémentaires, une réforme de l’assurance chômage ou encore la mise en place d’une aide sociale publique « plafonné à 70 % du salaire minimum ». Sans oublier, dans le volet services publics, le renforcement de l’autonomie des établissements d’enseignement ou la territorialisation des études de médecine.
Dans l’opposition, le groupe de Wauquiez menace de déposer une motion de censure si le futur gouvernement augmente les impôts ou touche aux retraites des retraités. « programme national d’urgence »Wauquiez attend désormais le camp présidentiel « postes »Le ministre de l’Intérieur démissionnaire, Gérald Darmanin, également en lice pour 2027, a déjà fait un pas en avant, évoquant la semaine dernière « propositions très intéressantes »En face, Wauquiez jongle entre son ambition pour l’Elysée, sa volonté de garder ses distances avec le parti de Macron et la carte de l’opposant responsable. Et il s’attire déjà les critiques. Aurélien Pradié, député qui a rompu avec LR et siège en tant que député non inscrit, estime que « Le pacte législatif n’est qu’une apparence. » Pour Wauquiez, dit-il, « Rien ne pourra vraiment réussir d’ici 2027. » « Entrer dans un gouvernement, c’est se lier les mains, c’est signer un chèque en blanc, c’est cautionner tout ce qui a été fait depuis sept ans », L’intéressé s’est défendu lundi. Dans le même temps, Eric Ciotti, le chef du parti attaqué en justice, l’a accusé dans une lettre envoyée aux membres de LR de construire une « alliance avec Emmanuel Macron ». Un double piège.