Moins d’un an après un mouvement d’ampleur historique, l’alliance majoritaire en France FNSEA-JA a appelé à des actions nationales une fois les semailles d’hiver terminées, « à partir de la mi-novembre » mais plus probablement la semaine du 18 novembre, date à laquelle débutera le G20 en 2017. Brésil.
La Coordination rurale, 2e syndicat agricole du pays qui a gagné en visibilité avec des actions de grève l’an dernier et dont certains cadres affichent leur proximité avec l’extrême droite, promet « une révolte agricole » à partir du 19 novembre, avec un « blocage du fret alimentaire ». .
Quant à la Confédération paysanne, 3e force syndicale et héritière des luttes altermondialistes, elle prévoit cette semaine des actions contre les « accords de libre-échange » ou « l’accaparement des terres par les énergéticiens ».
Le climat est tendu. Aux trésors exsangues s’ajoutent la crainte de voir l’accord de libre-échange de l’Union européenne avec le Mercosur (Argentine, Brésil, Uruguay, Paraguay et Bolivie) se concrétiser à Rio et la crainte de voir augmenter les taxes aux frontières chinoises. et américain.
» Obsession «
Sur le terrain, les syndicats se mesurent à l’approche de leurs élections professionnelles (en janvier) qui détermineront leur représentativité et donc les ressources publiques qui seront versées à chacun.
Depuis début octobre, les actions se multiplient en région : une génisse éventrée par un loup abandonnée devant une sous-préfecture du Doubs (est du pays), une veillée funèbre organisée en « mémoire de l’agriculture française » en Corrèze. (sud) , chrysanthèmes disposés au pied de la croix symbolisant les éleveurs vosgiens abandonnés par le groupe laitier Lactalis…
Parti l’an dernier d’un Tarn (sud) assoiffé, la mobilisation prend cette fois sa source dans une campagne horriblement humide. En raison d’un excès d’eau, la France, première puissance agricole de l’Union européenne, a connu en 2024 sa pire récolte de blé depuis 40 ans et a vu sa récolte chuter d’un quart.
Des Pyrénées à la frontière belge, les troupeaux de vaches et de moutons subissent une vague d’épidémies dévastatrices qui menacent la fertilité des animaux survivants et donc la production future. « Sans réponse structurelle, la crise ne s’est jamais arrêtée et elle s’est fortement aggravée en raison des aléas climatiques », souligne Laurence Marandola, porte-parole de la Confédération paysanne.
Mais depuis janvier, le gouvernement a multiplié les engagements, débloqué des centaines de millions d’euros d’aides, mis en branle une loi d’orientation agricole et s’est attaqué au millefeuille administratif dénoncé par les agriculteurs. La ministre de l’Agriculture Annie Genevard parle seulement de son « obsession » à honorer les engagements pris, comme un « contrôle administratif unique » annuel des exploitations ou des « prêts garantis par l’État ».
Mais paradoxalement, la situation est plus explosive que l’année dernière. Les céréaliers ont moins de blé et le vendront moins cher en raison de la baisse des prix internationaux, les sélectionneurs ont le sentiment d’une « chute sans fin ».
« Pronostic vital engagé »
En Haute-Garonne, Jérôme Bayle, figure de la mobilisation de l’hiver dernier dans le Sud-Ouest, estime que la signature de l’accord UE-Mercosur sera l’élément « qui fera exploser la colère ».
A la FNSEA, qui défend la vocation exportatrice de la France dans le blé et le cognac, Arnaud Rousseau appelle Paris à opposer son veto à ce traité. « C’est une ligne écarlate », « un combat existentiel », a-t-il répété.
A la Coordination rurale, Véronique Le Floch prévient que si le Mercosur entrait en vigueur, il ne servirait « plus de parler de loi d’orientation agricole », car il deviendrait inutile d’installer des jeunes dans une France qui aurait « conçu la souveraineté alimentaire dès importations ».
La Confédération paysanne, qui lutte depuis des années contre cet accord, estime qu’« aucune mesure de réciprocité ne pourra jamais compenser les importations massives » qui en résulteraient.
Dans un climat économique morose, chacun avance ses pions. Une source syndicale reconnaît une « tentation de surenchère » entre organisations concurrentes, mais aussi du côté de la classe politique.