Aux Canaries, ravagées par le surtourisme : « Sur mon île, je ne suis plus chez moi »

Publié le 05 juillet 2024 à 14h40 / Modifié le 06 juillet 2024 à 07h44

« Guanarteme, en danger d’extinction » : c’est ce qu’on peut lire sur le tee-shirt de Lidia Cruz, une institutrice quinquagénaire pleine d’énergie et au sourire désarmant. Guanarteme est le quartier populaire de Las Palmas où elle vit avec sa mère et ses deux filles depuis un demi-siècle dans une modeste maison à l’ancienne au numéro 17 de la rue Luchana. A deux pas, deux immeubles flambant neufs de 12 et 17 étages et un chantier gigantesque qui a coupé la rue en deux, les excavatrices luttant contre la montée des eaux du sous-sol : un complexe hôtelier va y être construit.

« C’était un quartier calme, pour ouvriers, avec des garages, des ateliers et une usine de tabac. Tout cela nous est tombé dessus, personne n’a été consulté. Et aujourd’hui, on a ces monstres de béton, et le bruit, et les camions, et l’épuisement nerveux. Dans ce nouveau chantier, les petits appartements de 35 m² sont annoncés à 900 euros au moins. Qui peut se le permettre ici ? Personne. Les gens partent vers les banlieues insalubres, les jeunes en premier. Le tissu social est mort, je ne reconnais plus personne. Je viens d’une famille canarienne depuis des générations. Les spéculateurs, les constructeurs, les politiques, ils ont réussi à me donner ce sentiment… Soit on met fin à tout ça, soit je ne sais plus quoi vous dire. »