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«Aujourd’hui, on lève les yeux au ciel et on dit ‘Oh non, encore un’»… En entreprise, la résurgence des discours LGBTphobes

 » C’est ça le problème avec vous les homos et les gouines, vous voulez nous éliminer par la force. » »

Avant cette année, Sophie* n’avait jamais subi le moindre commentaire homophobe en une décennie d’open space. «Mais avec le débat actuel sur GPA, les gens ont commencé à me dire que c’était la goutte d’eau qui faisait déborder le vase, qu’il fallait arrêter mon ‘lobby’, que ‘nous’ voulions de plus en plus, qu’il y avait une volonté de détruire la famille. Et cette phrase… »

Comme pour les femmes, pour lesquelles un « backlash » (backlash, ou résurgence de propos sexistes et de discours masculinistes) a été observé après MeToo, un phénomène similaire émerge à l’encontre de la communauté LGBT après des décennies de progrès sociétaux. « Comme si on n’avait pas droit au bonheur », soupire Sophie, dont le rapport RH n’aboutit à rien : « La société avance, mais les mentalités reculent en opposition », déplore-t-elle.

Ces cas sont rares. Mais nouveauté, « aussi minoritaire soit-il, ce discours homophobe est devenu beaucoup plus détendu et mieux accepté qu’avant dans le monde du travail. A la cafétéria, des collègues vont faire des remarques ou des critiques qu’ils n’osaient pas prononcer auparavant», regrette Paul*, banquier de 33 ans. « C’est minoritaire, diffus, mais c’est là. » A l’occasion du 17 mai, journée internationale contre la LGBTphobie, 20 minutes s’interroge sur cette résurgence.

Mariage pour tous et poussée homophobe

Flora Bolter, co-directrice de l’observatoire LGBT+ de la Fondation Jean-Jaurès, déplore la situation : « À chaque acquis social ou débat politique sur les droits des gays, lesbiennes, transgenres, comme l’ouverture de la PMA pour les femmes, nous assistons à une augmentation des actes discriminatoires. L’exemple le plus marquant de l’histoire récente être le mariage pour tous, adopté en 2013. « À cette époque, il y avait une explosion d’homophobie, notamment dans le cadre professionnel. »

Une révélation pour Alain*, un infirmier de 35 ans, qui a constaté le changement cette année-là dans sa clinique : « Beaucoup de collègues qui m’appréciaient jusqu’alors se sont montrés méfiants, voire dégoûtés, à mon égard. J’ai compris que les gens nous appréciaient, ou plutôt nous toléraient, tant que nous n’avions pas les mêmes droits qu’eux. Nous voir égaux aux hétéros leur était insupportable. »

« C’est minoritaire, diffus, mais c’est là »

Depuis 2013, les actes et propos LGBTphobes sont en constante augmentation. Encore +13% en 2023 par rapport à 2022, selon le rapport communiqué par le ministère de l’Intérieur publié ce jeudi. Ces chiffres sont cependant difficiles à interpréter – les victimes déposent davantage de plaintes grâce à une société plus ouverte, et les agressions sont mieux enregistrées, donc plus nombreuses dans les statistiques. Ça previent. « On a vraiment l’impression qu’à chaque nouvelle droite, 300 nouveaux connards se découvrent homophobes. Comme s’ils avaient une réaction d’auto-défense face à trop de tolérance », s’amuse Paul.

En 2023, L’Autre Cercle, association pour l’inclusion et la gestion de la diversité LGBT+ au travail, estimait qu’un tiers des personnes concernées auraient été victimes d’au moins une agression LGBTphobe dans leur organisation professionnelle, soit +4 points par rapport à 2020. Paul dresse un portrait des commentaires entendus au quotidien : « Ce ne sont pas des insultes directes, ils ne vont pas me traiter de ‘sale pédé’. « Juste », les gens me diront qu’on en fait trop avec ça, que c’est trop, que « nous », les gays, prenons trop de place. »

« Le discours homophobe est devenu dépersonnalisé », analyse Flora Bolter. Il se donne un vernis de légitimité en évoquant la protection des valeurs, de l’enfance, du rire, et en feignant de ne pas cibler les gens. »

« On m’a dit que c’était une invasion »

Catherine Tripon, porte-parole de L’Autre Cercle, ajoute : « L’évolution positive de la société amène l’arrivée du négationnisme, qu’il s’agisse de l’antisémitisme, du sexisme ou de l’homophobie. Nous allons nier cette discrimination maintenant qu’elle est enfin prise en compte.» Et ce, même au sein des entreprises qui ont mis en place une politique « gay-friendly » : « Les salariés diront que c’est ennuyeux de voir un pauvre drapeau LGBT le 17 mai, qu’il y a trop de journées dédiées, que l’entreprise n’est pas obligée de le faire. commente ça… »

Ce qu’illustre Rémy*, 47 ans : « il y a quinze ans, quand je me révélais trans au travail, j’étais l’attraction, la nouveauté. Ce n’était pas une attitude parfaite, certes, mais il y avait une réelle écoute, car c’était tellement méconnu qu’il y avait plus de curiosité que de mépris. Maintenant, nous allons lever les yeux au ciel et dire : « Oh non, encore un ». On m’a déjà dit que c’était une invasion, une épidémie, ou on s’est moqué de ma transition : « Encore une folle ». »

Un étrange constat se pose alors : « Quelque part, nous sommes presque devenus grand public dans la société. A tel point que les gens trouvent impertinent, et donc classe et stylé, de se moquer de nous. Comme si être transphobe était devenu un trait de personnalité sympa. »

Un débat public qui n’aide pas

Autre explication : l’odeur – assez nauséabonde – du débat public actuel, selon Catherine Tripon : « Quand les sénateurs de droite s’attardent longuement sur l’interdiction de transition pour les mineurs, que le livre Transmanie fait le tour des médias, ou que certains hommes politiques parlent de vague de réveil ou de valeurs menacées, cela légitime le discours qui la sous-tend. « Si cela peut être dit dans l’espace public, je peux le dire dans les affaires ». »

Il reste fondamental de ne rien laisser passer inaperçu, souligne le porte-parole. Du côté des entreprises, « il est peut-être temps d’aller plus loin, d’être plus subtil également dans les politiques LGBT ». amicalrappelant qu’il ne s’agit pas d’un mouvement politique, ni d’une revendication absurde, ni trop parler de sa vie privée alors que les hétéros peuvent le faire à leur guise. C’est juste être soi-même. »

*Les prénoms ont été modifiés

Cammile Bussière

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