Après un mois d’audience, le verdict est tombé au procès de l’attentat du marché de Noël de Strasbourg ce jeudi 4 avril 2024. La cour d’assises spéciale a condamné Audrey Mondjehi pour association de malfaiteurs terroriste mais n’a pas été désignée comme complice de l’attentat. L’homme de 42 ans est condamné à 30 ans de réclusion criminelle.
Au procès de l’attentat de Strasbourg, la cour d’assises spéciale a rendu son verdict après 10 heures de délibéré ce jeudi 4 avril 2024. Audrey Mondjehi, 42 ans, n’a pas été reconnue complice de Chérif Chekatt mais a été reconnue coupable d’association de malfaiteurs terroriste. Il écope de 30 ans de réclusion criminelle, assortis d’une période de sûreté des deux tiers et d’une interdiction de séjour sur le territoire français. Une peine conforme à celle demandée par le parquet national antiterroriste.
Le tribunal a estimé qu’en remettant un revolver de 1892 à Chérif Chekatt le 11 décembre 2018, il ne savait pas que l’arme serait utilisée pour commettre un attentat de masse. En revanche, l’association de malfaiteurs terroriste est admise car le tribunal a considéré qu’Audrey Mondjehi avait connaissance de la radicalisation violente de Chérif Chekatt, de son appartenance à l’État islamique et qu’il servait d’intermédiaire pour lui fournir une arme. « Il savait que le projet criminel de Chérif Chekatt se développait même s’il en ignorait les détails précis »a déclaré la présidente Corinne Goetzmann.
Dans ce procès, trois autres personnes ont été accusées. Christian Hoffmann a été condamné à cinq ans de prison, dont six mois avec sursis. Il devra porter un bracelet électronique pour purger sa peine, décomptée de ses années passées en détention provisoire.
Frédéric Bodein, qui a transmis le numéro de téléphone du fournisseur de l’arme à Audrey Mondjehi, a été reconnu coupable d’association de malfaiteurs et condamné à quatre ans de prison dont un avec sursis. Sachant qu’il a déjà passé plus de trois ans en détention provisoire, il ne sera pas incarcéré. Son frère Stéphane Bodein a été acquitté.
Je peux continuer ma vie parce que j’ai attendu trop longtemps ce jour
Sagar E.Épouse de Kamal Naghchband
« J’ai beaucoup attendu ce jour et aujourd’hui il y a beaucoup d’émotion. Maintenant je suis heureux, je peux continuer ma vie car j’ai trop attendu ce jour. Cette période a été très dure pour moi, pour les enfants »a réagi Saghar E., l’épouse de Kamal Naghchband, tué par Chérif Chekatt en plein cœur de Strasbourg.
Avocat de plusieurs parties civiles, Emmanuel Spano a livré son analyse de ce verdict. « Je trouve cela assez équilibré. Vous avez d’un côté la clémence envers un accusé qui a été acquitté et de l’autre des faits extrêmement graves qui reflètent les drames vécus à Strasbourg. Et de ce fait, ils ont fait l’objet d’une sanction extrêmement lourde. peine contre Audrey Mondjehi. »
Reste désormais à savoir si la défense d’Audrey Mondjehi, qui n’a pas souhaité commenter, fera appel de cette décision. « Je pense malheureusement qu’on s’attend fortement à ce qu’un deuxième procès ait lieu et que nous devrons à nouveau préparer les victimes. Et s’il n’y a pas d’appel, nous devrons nous reconstruire en dehors du cadre de la Justice. »estime Emmanuel Spano.
Avant que le tribunal ne se retire pour délibérer, le principal accusé dans ce procès a eu une dernière fois la parole. Chemise blanche sur les épaules, il exprimait son « grande pensée et (sa) tristesse pour toutes les victimes ». « Toute ma vie, je regretterai ce qui s’est passé. Je n’aurais jamais cru qu’il ferait ça ! Je n’ai jamais pensé qu’il était radicalisé”répéta-t-il une dernière fois.
Je n’ai jamais su ce qu’il voulait faire
« S’il vous plaît, pardonnez-moi si j’ai été parfois maladroit dans ce procès. Il y a une sorte de responsabilité à avoir présenté des gens, mais je n’ai jamais su ce qu’il voulait faire »a-t-il conclu. « Il » il s’agit de Chérif Chekatt, l’auteur de l’attentat qui a tué cinq personnes, blessé onze victimes et traumatisé une ville entière avec une arme qu’Audrey Mondjehi l’a aidé à se procurer.
La veille, sa défense avait plaidé pendant plus de quatre heures pour convaincre le tribunal qu’Audrey Mondjehi ne savait rien de la radicalisation de Chérif Chekatt et encore moins de ses intentions terroristes.
