« Aucun pays n’aime vraiment ses libérateurs, et les soldats américains ont fait preuve de peu de tact. »
ENTRETIEN – Le grand historien britannique Antony Beevor publie une nouvelle édition de son ouvrage de référence sur le Paris de l’après-Occupation, dans lequel il remet en cause de nombreuses idées reçues. Quatre-vingts ans plus tard, il rappelle comment sont nés les mythes gaullistes et communistes de la Libération et combien les événements de l’été 1944 ont pesé sur nos futures relations ambiguës avec les Américains.
LE FIGARO MAGAZINE. – Pourquoi avoir repris et complété votre reportage sur Paris 1944-1949, vingt ans après sa première version ? Quels éléments nouveaux vous ont poussé à le faire ?
Antoine BEEVOR. – Cette nouvelle édition est presque 40 % plus longue que la première édition française de 2004. Il manquait à cette dernière un élément essentiel. Comme au temps de la Révolution de 1789, la politique, après la Libération, influençait tout, et tout agissait sur la politique – la littérature, la philosophie, les arts, l’économie, la vie sociale, le théâtre, et même la mode. Tout cela exigeait une approche pluridisciplinaire.
L’histoire ne se répète jamais, mais il y a des leitmotivs, au premier rang desquels la « guerre franco-française ». Il convient de noter par exemple la vieille habitude de la gauche de glorifier les combats de rue et les barricades, ce qu’elle n’a pas manqué de faire en 1944 et encore en 1968. La fin des événements de 1968, comme nous le démontrons dans cette édition…