Au Tchad, une présidentielle incertaine entre le président de transition et son premier ministre
Plus de huit millions de Tchadiens sont appelés aux urnes, lundi 6 mai, pour une élection présidentielle censée mettre fin à la transition entamée au lendemain de la mort du président Idriss Déby Itno, tué lors des combats avec les rebelles en avril 2021.
L’enjeu est de taille : son fils, Mahamat Idriss Déby, hissé par un groupe d’officiers sur le fauteuil de son père, souhaite légitimer son pouvoir par les urnes ; mais son principal rival et premier ministre, Succès Masra, ne compte pas lui faciliter la tâche. Cette bataille politique entre deux quadragénaires inquiète les observateurs.
Du côté du pouvoir, nous sommes heureux d’organiser la première élection présidentielle parmi des pays africains (Mali, Guinée, Burkina Faso, Niger) qui ont connu des changements de régime non démocratiques ces dernières années. Mais « Compte tenu des tensions autour de l’élection, celle-ci risque d’être seulement différente dans la forme. Au fond, il s’agit toujours de rester au pouvoir. » commente un observateur, soulignant que les institutions électorales sont contrôlées par les dirigeants du régime.
Depuis la mort du maréchal Déby, il y a trois ans, tout a été fait pour verrouiller le pouvoir de son fils, parfois par la violence. Dès l’automne 2022, un » « Un dialogue national inclusif et souverain » (DNIS) a prolongé de dix-huit mois la période de transition et autorisé le chef de la junte à briguer la fonction suprême, provoquant un tollé au sein de la société civile et de l’opposition. Le 20 octobre 2022, entre 73 et 300 manifestants venus réclamer la passation du pouvoir aux civils ont été tués par la police.
Le 28 février 2024, l’opposant Yaya Dillo, également cousin du président de la transition, est mort lors de l’assaut de l’armée contre le siège de son parti, au centre-ville de N’Djamena. Comme si de rien n’était, Mahamat Idriss Déby annonçait quelques jours plus tard en grande pompe sa candidature à l’élection présidentielle et l’envoyé spécial du président français, Jean-Marie Bockel, confiait à la presse présidentielle son » admiration « pour son leadership dans la transition. Un épisode qui n’est pas sans rappeler le discours prononcé par Emmanuel Macron lors des obsèques d’Idriss Déby Itno ; il était alors le seul chef d’État occidental à avoir fait le déplacement : « La France ne permettra jamais que la stabilité et l’intégrité du Tchad soient remises en cause », a-t-il déclaré. La phrase sonnait comme l’adoubement d’une succession dynastique.
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