Plus de 17 millions de Sri Lankais éliront leur président le 21 septembre. L’annonce faite vendredi par la Commission électorale suscite l’espoir d’un changement dans une île en proie depuis deux ans à une succession de crises financières, sociales et politiques.
C’est en 2022 que tout a basculé pour ce pays de l’océan Indien. Cette année-là, une politique agricole désastreuse s’est conjuguée à une baisse d’impôts et à l’effondrement du secteur touristique provoqué par la pandémie de Covid-19 et les attentats terroristes de 2019. En avril, le Sri Lanka a fait défaut sur sa dette extérieure de 46 milliards de dollars (42 milliards d’euros) et a plongé dans la pire crise économique de son histoire. L’inflation a atteint 70 %. Les files d’attente s’allongeaient devant les magasins face aux pénuries de nourriture et de carburant.
Projets fantômes
Descendue dans la rue, la population accuse ses dirigeants d’avoir puisé dans les caisses de l’Etat. Le soulèvement contraint bientôt le Premier ministre Mahinda Rajapaksa à démissionner. C’est ensuite le tour de son frère cadet, le président Gotabaya Rajapaksa. Derrière eux, les deux frères laissent à leur pays des projets fantômes colossaux, conçus avec des prêts accordés par la Chine.
En juillet 2022, et sous les bons auspices du clan Rajapaksa, c’est un renard politique, Ranil Wickremesinghe, qui prend la présidence du Sri Lanka. L’homme de 75 ans entame une politique d’austérité drastique pour répondre aux conditions d’un programme de sauvetage du Fonds monétaire international. Avec la Chine et l’Inde, mais aussi d’autres créanciers comme la France et le Japon, il négocie la restructuration de la dette. Une cure d’austérité qui, selon les observateurs, permet désormais à l’économie de repartir sur les rails.
Si les pénuries alimentaires se sont atténuées, le mécontentement d’une population appauvrie a été étouffé. En réprimant les manifestants, le gouvernement de Ranil Wickremesinghe a également gelé les élections locales, suscitant des inquiétudes quant à l’avenir démocratique du Sri Lanka.
Les élections annoncées pour le 21 septembre n’en paraissent que plus importantes. Ce sera une élection clé, la première dans le contexte de la crise économique et du soulèvement populaire de 2022, déclare Bhavani Fonseka, chercheur au Centre for Policy Alternatives de Colombo. Toutefois, les parties prenantes doivent veiller à ce que les élections soient libres et équitables.. »
Incarner le changement
Les questions économiques seront au cœur de la campagne. Les adversaires de Ranil Wickeremesinghe, qui entend rester au pouvoir, ne manqueront pas de lui épingler la dureté de sa politique. Parmi eux se distingue Anura Kumara Dissanayake, qui critique la privatisation des grandes entreprises. Le chef de l’opposition, Sajith Premadasa, pourrait incarner le changement.
Le ministre de la Justice Wijeyadasa Rajapakshe est également sur la liste, tout comme Sarath Fonseka, l’ancien chef de l’armée qui a écrasé l’insurrection tamoule en 2009. Ce dernier porte en lui le souvenir, encore tabou au Sri Lanka, d’une guerre qui s’est soldée par des massacres de civils. Autant de traumatismes à vif dans une île fracturée et blessée, et que le prochain président devra panser pour respirer la paix et la prospérité.
New Grb1