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Au Sénégal, le gouvernement présente son grand plan de développement

Le Premier ministre sénégalais Ousmane Sonko lors d'une conférence de presse de présentation du plan d'action économique du gouvernement, à Dakar, le 26 septembre 2024.

C’est un grand classique auquel les nouvelles autorités ne se sont pas écartées : à chaque changement de régime au Sénégal, un plan économique  » ambitieux «  est présenté. A un mois des élections législatives anticipées du 17 novembre et six mois après son élection présidentielle, le chef de l’Etat, Bassirou Diomaye Faye, et son premier ministre, Ousmane Sonko, ont dévoilé lundi 14 octobre un programme de « faire du Sénégal un pays souverain, prospère et juste »baptisé «Sénégal 2050».

Douze ans plus tôt, l’ancien président Macky Sall lançait son plan « Sénégal émergent », lui-même dans la lignée de l’ancien président Abdoulaye Wade et de son « stratégie de croissance accélérée » lancé après son élection en 2000.

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Comme ses prédécesseurs avant lui, le nouvel exécutif a multiplié les objectifs chiffrés pour les vingt-cinq prochaines années : tripler le PIB par habitant pour l’établir à 4.500 dollars (environ 4.130 euros) ou encore réduire le taux de pauvreté à 10% de la population. , alors que près de quatre Sénégalais sur dix survivent avec moins de 1 012 francs CFA (environ 1,5 euro) par jour, selon l’Agence nationale de la statistique et de la démographie (ANSD).

Face à cet horizon aussi lointain qu’incertain, le nouvel exécutif a d’abord fixé un cap pour 2029 : la croissance « attendu 6,5% » réduire le déficit budgétaire abyssal de 10,4% à 3% du PIB, tout en promettant de taxer les gens qui ne l’étaient pas jusqu’à présent.

Décentralisation de l’économie

Champion de la lutte contre la corruption, le duo au pouvoir a commencé par établir un constat accablant sur la gestion des précédentes autorités. Trois semaines après avoir porté une violente charge contre le régime de l’ancien président Macky Sall, l’accusant de « corruption généralisée » et d’avoir masqué l’ampleur de la dégradation des comptes publics, M. Sonko a souligné « mauvaise gouvernance depuis l’indépendance.

« Notre modèle ne crée pas de valeur. Mais nous pouvons emprunter une nouvelle trajectoire. est-ce qu’il » a expliqué devant le parterre de responsables nationaux et de diplomates étrangers présents au palais des congrès de Diamniadio, dans la banlieue de Dakar.

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Le nouvel exécutif a présenté les grands axes de sa stratégie pour briser le « cercle vicieux de (c’est) dépendance et (son) sous-développement »selon M. Sonko. L’économie du pays est « prisonnier d’un modèle d’exploitation des matières premières sans valorisation ni transformation locale », » a ajouté Bassirou Diomaye Faye.

Pour rompre avec ce modèle, les nouvelles autorités proposent une décentralisation de l’économie. « La Casamance, au sud, doit être le grenier agricole. La région de Matam, au nord, doit être productrice d’engrais car les phosphates y sont abondants mais largement sous-exploités. explique l’économiste Ousmane Birame Sane, ancien directeur de la Bourse régionale des valeurs mobilières.

« Les indices économiques réels sont dans le rouge »

Selon les prévisions du gouvernement, 27 milliards d’euros doivent financer ce plan de développement jusqu’en 2029. Pas de quoi lever les questions et les inconnues, ni pour rassurer les investisseurs inquiets des mauvais signaux de l’économie sénégalaise. Après que le Fonds monétaire international (FMI) ait révisé à la baisse tous ses indicateurs pour le Sénégal en septembre, l’arrivée au pouvoir des nouvelles autorités a coïncidé avec un renforcement des pressions fiscales et douanières.

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« Ces dirigeants sont déconnectés des opérateurs économiques. Ils ne nous ont pas consultés. Il n’y a rien de nouveau dans leur plan”dénonce Youssef Omaïs, directeur de Patisen, l’un des rares fleurons de l’industrie agroalimentaire au Sénégal. « Où est l’attractivité de la marque Sénégalaise dans leur plan ? » s’interroge un autre dirigeant d’un groupe industriel qui a préféré garder l’anonymat par crainte de représailles fiscales. Il y a urgence car les indices économiques réels sont dans le rouge »comme la note financière du Sénégal, dégradée début octobre par l’agence Moody’s de Ba3 à B1.

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Les nouvelles autorités ont également ignoré, lundi, le poids des hydrocarbures dans l’économie nationale. Quelle sera leur place lorsque le Sénégal sera devenu producteur de pétrole et devra exporter 100 000 barils par jour ? A un mois des élections législatives, la redistribution des revenus des hydrocarbures reste un sujet de discorde aussi bien pour les électeurs inquiets de voir leur facture d’électricité baisser que pour les compagnies pétrolières étrangères, soucieuses d’un retour sur investissement rapide et engagées dans une renégociation incertaine de leurs contrats avec le nouveau pouvoir.

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« Le problème est que nous nous concentrons sur la bonne gouvernance politique sans faire le point sur la gouvernance économique, analyse Ahmadou Aly Mbaye, professeur d’économie et de politiques publiques à l’Université Cheikh-Anta-Diop (UCAD) de Dakar. La transformation structurelle promise vers une économie manufacturière n’est pas évidente car nos dirigeants se heurteront à un paradoxe : la main d’œuvre au Sénégal est abondante mais son coût réel est l’un des plus élevés au monde. Tous les gouvernements précédents se sont heurtés à cette réalité : l’économie du Sénégal est une économie monétaire. L’arrivée du pétrole risque d’aggraver le contrôle des salaires. Comme tous les pays producteurs de pétrole avant lui, le Sénégal est menacé par un mal bien connu : celui qui conduit le secteur pétrolier à tuer tous les autres. »

Face aux attentes croissantes sur le pétrole et le pouvoir d’achat, Ousmane Sonko a exhorté les Sénégalais à  » patience « , semblant déjà anticiper des critiques à un mois des élections législatives.

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Gérard Truchon

An experienced journalist in internal and global political affairs, she tackles political issues from all sides
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