Le septuagénaire, principal accusé dans ce procès, est poursuivi pour avoir drogué, violé et fait violer son épouse, Gisèle Pelicot, par 50 hommes. « Il a consciemment infligé des souffrances indicibles à son épouse et à toute sa famille », a dénoncé le procureur adjoint.
Publié
Temps de lecture : 8min
Il est « la clé de voûte » de cette affaire « hors norme ». Au procès pour viol de Mazan, le parquet a requis, lundi 25 novembre, vingt ans de réclusion criminelle, soit la peine maximale, contre Dominique Pélicot, pour avoir, entre juillet 2011 et octobre 2020, drogué, violé et fait violer son épouse par des dizaines de personnes. hommes recrutés sur Internet. « Je vous demanderai de déclarer Dominique Pelicot coupable de tous les faits qui lui sont reprochés »a déclaré la conseillère générale Laure Chabaud, dans une salle d’audience bondée.
« Vingt ans, c’est beaucoup à la fois, car vingt ans de la vie d’un homme, ce n’est pas rien, et vingt ans de vie entre les quatre murs d’une prison, ce n’est pas Riencontinua-t-elle. Vingt ans, c’est à la fois beaucoup et trop peu compte tenu de la gravité des actes commis et répétés.«
Le parquet a également requis dix ans de suivi socio-judiciaire accompagné d’une ordonnance de traitement. Il a demandé à ceci qu’à la fin de sa phrase, Dominique Pelicot »faire l’objet d’un réexamen, en vue d’une éventuelle mesure de détention ». Trois circonstances aggravantes ont été retenues : qu’il a commis et organisé ces viols en sa qualité de conjoint de la victime, que ces faits se sont déroulés en réunion, et que la victime était sous l’emprise de soumission chimique. Pendant près d’une décennie, Dominique Pelicot a drogué sa femme Gisèle en cachant des pilules anxiolytiques dans sa nourriture.
Pour l’avocat général, « passer à l’acte » par Dominique Pélicot « ne peut être dissocié de l’étude de (c’est) personnalité »rappelant que sa sexualité est « marqué par de multiples déviances ». L’homme est « structuré de manière perverse »les femmes sont dans ses yeux « déshumanisé, réduit à l’état d’objet ». L’expert psychiatre Paul Bensussan a rendu compte de son fonctionnement « très pathologique, avec des mécanismes de défense archaïques, animés par le clivage et le déni ». Le magistrat a toutefois rappelé que le septuagénaire ne souffre d’aucune pathologie mentale.
Elle a souligné que les individus, ayant des antécédents criminels, étaient capables de « se montrent absolument charmants et, en même temps, capables des pires atrocités ». A ses yeux, Dominique Pelicot répond à ce scénario : « C’était un mari attentionné, un père affectueux, mais qui infligeait consciemment à sa femme et à toute sa famille des souffrances indescriptibles à travers des actes niant toute humanité à sa victime. »
Elle était hébergée par « la recherche de son propre plaisir » qui est passé par là « une volonté de soumission de la part de sa femme, voire d’avilissement » de celui-ci. Laure Chabaud a notamment dénoncé les propos grossiers tenus par Dominique Pelicot à son égard dans les nombreuses vidéos qui ont pu être visionnées à l’audience.
« Pour ‘dompter une femme rebelle’, selon ses propres mots, Dominique Pélicot a opté pour la soumission chimique. »
Laure Chabaud, procureure adjointedevant le tribunal correctionnel du Vaucluse
Le magistrat a rappelé que l’accusé avait reçu une vingtaine de prescriptions de médicaments, notamment du Temesta. « sous sa forme la plus mesurée »dont il avait été issu d’un total de « 780 comprimés »mais aussi du Zolpidem, un somnifère puissant dont des traces importantes ont été retrouvées dans les cheveux de la victime.
Elle a rappelé l’état de « confusion » et les nombreux « absences » de Gisèle Pelicot en raison de cette ingestion de médicaments, à des doses telles qu’ils auraient pu provoquer « son pronostic vital »comme l’a souligné un expert en toxicologie lors du procès. Gisèle Pelicot a été victime d’un accident de voiture sous l’effet de ces pilules.
Au-delà des multiples viols infligés à son ex-femme et de la soumission chimique, le vice-procureur a également requis que Dominique Pelicot soit reconnu coupable d’avoir pris et diffusé de multiples photographies intimes de Gisèle Pelicot mais aussi de ses belles-filles. des filles, qu’il a photographiées nues dans leur salle de bain, avant de réaliser des photomontages pornographiques. « Aucune limite ne semble fonctionner pour Dominique Pelicot qui va jusqu’à écrire : ‘Je suis entouré de belles salopes' »a rapporté Laure Chabaud.
Elle s’est également concentrée sur les deux photographies de sa fille nue Caroline Darian, enregistrées sous le nom « Ma fille nue ». « Caroline est persuadée qu’elle aussi a été droguée par son père, dans la mesure où elle ne dort jamais dans cette position, qu’elle aurait dû être réveillée par une lumière dans la chambre et que la culotte portée n’était pas la sienne », a rapporté l’avocat général. Elle a rappelé que sur ces faits, Dominique Pelicot a adopté « une position inhabituelle »depuis « Ce sont les seules qu’il conteste, allant jusqu’à dire qu’il n’est pas sûr que ce soit elle sur les images. » Et assurer « qu’il ne s’en souvenait pas, comme si on pouvait oublier de tels faits« .
Laure Chabaud a toutefois observé qu’aucun élément n’a été découvert permettant «trouver une traduction juridique » à « souffrance » par Caroline Darian. Celle que cette dernière désigne désormais comme elle « géniteur »et qu’elle a insultée à plusieurs reprises lors de l’audience, n’est donc pas poursuivie pour viol sur sa fille, mais uniquement pour « atteinte à la vie privée par enregistrement et fixation d’images à caractère sexuel ».
L’avocate de Dominique Pelicot, Béatrice Zavarro, a décrit son client comme « abattu ». « Nous nous préparions à ce que la peine maximale soit demandée, il n’y a pas surprendre »a-t-elle néanmoins admis. Reste à savoir quelles peines le parquet demandera à l’encontre des 50 coaccusés.
Une seule réquisition est tombée mardi matin, concernant Jean-Pierre M., cas particulier parmi les accusés, puisqu’il n’est pas accusé d’avoir violé Gisèle Pelicot, mais poursuivi pour avoir violé et fait violer sa propre femme, avec la complicité de Dominique. Pélicot. Le procureur de la République a requis 17 ans de réclusion criminelle à son encontre. Au total, les deux hommes avaient «une dizaine de rencontres sur une dizaine d’années »a relevé l’avocat général, Jean-François Mayet, estimant que Jean-Pierre M. « J’ai eu suffisamment de temps pour comprendre ce qui se passait ».
Les autres réquisitions dureront jusqu’à mardi soir, voire mercredi midi. L’accusation doit faire la différence entre les récidivistes – quatre hommes sont venus six fois et six sont venus deux fois – et les accusés qui ne sont venus qu’une seule fois à Mazan. « On ne peut plus, en 2024, considérer que, parce qu’elle n’a rien dit, qu’elle a accepté », a prévenu Laure Chabaud, alors que la plupart des accusés ont affirmé ne pas avoir compris que la victime n’était pas consentante. « Il n’y avait rien d’ambigu, ni dans le contexte, ni dans l’attitude de Gisèle Pelicot, qui pouvait laisser croire à ces hommes qu’elle acceptait de subir ces actes sexuels dans l’état léthargique qui était le sien »a-t-elle dit au vice-procureur.