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Au procès du viol de Mazan, la rage de Caroline Darian face aux dénégations de son père Dominique Pelicot

Antoine Camus, l’avocat de la fille du principal accusé, a tenté d’obtenir des précisions sur les deux photos dénudées du quadragénaire retrouvées dans son équipement informatique par les enquêteurs. En vain.

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Caroline Darian, à son arrivée au tribunal judiciaire d'Avignon (Vaucluse), le 17 septembre 2024. (CHRISTOPHE SIMON / AFP)

Connaîtra-t-elle un jour la vérité sur les agissements de son père à son égard ? Antoine Camus, l’avocat de Caroline Darian, a interrogé avec insistance Dominique Pelicot, mardi 17 septembre, en fin d’après-midi, pour tenter de lui soutirer des détails sur les deux photos de sa fille, retrouvées dans son matériel informatique par les enquêteurs. Depuis la découverte de ces photos en novembre 2020, elle est persuadée qu’elle a été droguée et peut-être même agressée sexuellement par son père, voire par des inconnus, selon la même méthode que celle utilisée par le principal accusé du procès pour viol de Mazan sur sa femme.

Son avocat, qui représente également sa mère Gisèle Pelicot, a profité de l’interrogatoire de personnalité du septuagénaire pour tenter de lui rafraîchir la mémoire… Il a commencé par décrire les deux photos. Elles montrent la même femme, « sur le côté gauche et sur le côté droit, dans la même position fœtale, avec les draps relevés presque au millimètre sur ses fesses »Antoine Camus décrit calmement. Elle porte une culotte que Caroline Darian « indiqué comme n’étant pas le sien ».

« Je peux comprendre ses doutes, mais en aucun cas il n’y avait rien », a déclaré Dominique Pelicot, après avoir déclaré juste avant : « Je n’ai jamais touché mes enfants, ni mes petits-enfants : je sais trop combien cela fait mal. » Une référence pour l’accusé principal aux relations incestueuses que son père (aujourd’hui décédé) entretenait avec une petite fille déficiente mentale adoptée par la famille, alors qu’il était encore enfant. Durant une bonne partie de cet interrogatoire, CAroline Darian, aujourd’hui âgée de 45 ans, le regardait fixement, la mâchoire serrée.

« Pourquoi aucune photo de vos fils n’a été retrouvée ? » continua Antoine Camus. « Je n’avais pas besoin de cette comparaison, je ne suis pas attirée par les hommes »a immédiatement répondu le retraité de 71 ans. Comme lors de sa cinquième audition devant Le juge d’instruction, Dominique Pelicot, a répété qu’il n’avait pas pris lui-même les photos de sa fille. Devant le tribunal correctionnel du Vaucluse, il a affirmé qu’il n’était pas « pas convaincu » que c’est bien elle sur les photos. « Je vais vomir ! »la personne concernée a réagi furieusement avant de quitter la pièce.

« Comment peut-elle se reconnaître ? Comment les policiers peuvent-ils la reconnaître ? » a a insisté l’avocat. « Et pourquoi as-tu créé le répertoire « Ma fille nue » ? » Pourquoi, continua Antoine Camus, appeler une photo « Ma chienne et sa fille »en référence à un montage qu’il avait réalisé. Dominique Pelicot a assuré qu’il avait simplement répondu à la demande de quelqu’un « à plus de 200 kilomètres » qui l’a « a montré sa femme et sa fille dans leur salle de bain et (lui)  » a demandé la même chose « . Mais ses explications n’ont pas convaincu la partie civile.

Antoine Camus poursuit son questionnement, avec ténacité : « Admets-tu que tu avais un regard incestueux ? » « Je ne l’ai jamais regardée comme ça. »rétorqua l’accusé, d’une voix à peine audible.

« Ne pouvez-vous pas vous comporter comme un homme et dire la vérité ? Ne comprenez-vous pas que votre fille souffre, que sa détresse est aiguë ? »

Antoine Camus, avocat de Gisèle Pelicot et Caroline Darian

à Dominique Pelicot

« Je n’ai jamais touché un enfant » a invariablement a répondu Dominique Pelicot. « Admets-tu que c’est toi qui as pris cette photo ? »Antoine Camus a encore demandé. « Non, ce n’est pas moi, ni l’un ni l’autre »l’accusé a juré.

« Tu mens ! »  » Caroline Darian a alors déclaré de l’autre côté de la salle. L’avocat a réitéré que sa cliente était certaine d’avoir été droguée. « Pourquoi dis-tu ça, puisque les tests ont prouvé qu’il n’y avait rien dans ses cheveux ? » a répondu Dominique Pelicot, spécialiste du sujet. « Vous savez ce qui arrive avec les analyses tardives sur les médicaments psychoactifs… C’est dommage qu’il n’y ait aucune preuve. C’est toute la tragédie de votre fille. », conclut Antoine Camus.

L’échange s’est terminé là, sous le regard courroucé de Caroline Darian. Durant la première semaine d’audience, l’avocate avait demandé à la psychologue qui avait procédé à l’évaluation de la quadragénaire si elle pouvait espérer aller mieux un jour. « et reconstruire sur des points d’interrogation aussi importants. »

« Le drame de ma cliente, c’est qu’elle ne croit pas ce que dit son père. S’il la rassure, elle ne le croira pas. S’il confirme sa pire crainte, elle tombera dans une autre forme d’enfer. »

Antoine Camus, avocat de Gisèle Pelicot et Caroline Darian

devant le tribunal correctionnel de Vaucluse

« Ne pas savoir est un piège »l’expert avait reconnu. « Quoi que dise M. Pelicot, ses propos seront entachés de suspicion », il avait estimé, invitant Caroline Darian à ne pas s’embarquer « une quête incessante de la connaissance. » Sinon, « Il y aura toujours des doutes, des ombres et donc une torture mentale ». Mais est-il vraiment possible de vivre en se demandant si son père l’a violée ?

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Gérard Truchon

An experienced journalist in internal and global political affairs, she tackles political issues from all sides
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