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Au procès de l’assassinat de Samuel Paty, l’un des accusés se qualifie de « victime » et crée le malaise

Le père de l’écolière accusée d’avoir désigné Samuel Paty comme cible sur les réseaux sociaux est jugé au procès de l’assassinat du professeur. Entre protestations, excuses et victimisation, ses déclarations ont choqué.

Sans lui, l’assassinat de Samuel Paty n’aurait peut-être jamais eu lieu. Brahim Chnina fait partie des huit adultes jugés dans cette affaire dans laquelle il est décrit comme le « père de l’écolière ». Cet homme de 52 ans, à l’origine de fausses rumeurs visant le professeur d’histoire-géographie, est accusé d’avoir initié une vaste campagne de haine sur les réseaux sociaux avec l’un des autres accusés, le militant islamiste Abdelhakim Sefrioui.

Le père, dont l’enquête de personnalité révélait un profond attachement à ses proches et une propension à « prendre soin des autres », avait jugé Samuel Paty responsable de l’exclusion – fictive – de sa fille. Il a assuré que le professeur ne supportait pas que l’écolière lui tienne tête après la diffusion de caricatures du prophète Mahomet lors d’un cours sur la liberté d’expression. Brahim Chnina avait alors partagé l’identité et l’adresse de l’enseignant sur les réseaux sociaux dans des vidéos « destinées à susciter un sentiment de haine », désignant Samuel Paty « comme cible ».

Des faits et accusations contestés par le père de la collégienne lors de sa comparution au procès de l’assassinat de Samuel Paty, mercredi 6 novembre, à la cour d’assises spéciale de Paris. « Je ne reconnais pas les faits qui me sont reprochés », a-t-il déclaré derrière la vitre de sa loge devant le public, dont les parties civiles et ses proches venus assister à l’audience. Mais si Brahim Chnina a nié ces accusations, il a aussi exprimé ses remords quatre ans après le décès de Samuel Paty et présenté ses excuses à la famille de l’enseignant : « Je regrette profondément. Je m’excuse auprès de la famille et auprès de ce pauvre professeur qui n’aurait jamais dû mourir dans ces conditions ». .» Des excuses auxquelles Me Virginie Leroy, une des avocates de la famille Paty, a coupé court : « Nous n’avons pas besoin ici de vos excuses, mais de vos explications ».

Il se dit « victime du terrorisme »

L’enquête sur l’assassinat de Samuel Paty a conclu que les vidéos de Brahim Chnina sont parvenues au terroriste Abdoullakh Anzorov qui a décapité le professeur, avant d’être lui-même abattu par la police. Les deux hommes ont été en contact téléphonique à plusieurs reprises quelques jours avant l’attentat du 16 octobre 2020, entre le 9 et le 13 octobre toujours selon les enquêtes. Le jeune terroriste d’origine tchétchène était « immergé dans la religion » selon les témoignages d’anciens voisins et son acte terroriste laisse présager une radicalisation. Mais le père de la collégienne est décrit dans les conclusions de l’enquête de personnalité comme une personne pieuse sans pour autant être radicalisée.

Au contraire, l’homme se dit « très conscient » des dangers liés au terrorisme, notamment sur Internet. Il ajoute même, sans beaucoup d’estime pour la famille de Samuel Paty, qu’il est lui-même « victime du terrorisme » en faisant référence à l’une de ses sœurs, déficiente mentale, qui s’est envolée pour la Syrie après avoir été « endoctrinée » par un jihadiste.

« Nous ne sommes pas radicalisés. Nous avons grandi laïcs», a insisté Brahim Chnina auprès de l’enquêteur de personnalité. Un rapport à la laïcité qui pose encore question après ses propos et ses accusations contre Samuel Paty. L’homme a également été interrogé sur ses relations avec l’école de sa fille et, là encore, ses réponses ont été surprenantes après l’assassinat de l’enseignante. Il a précisé qu’il avait laissé à son épouse le soin de gérer l’éducation des enfants et qu’il n’avait jamais eu de contact avec le collège avant le 8 octobre, jour où il a demandé le licenciement de l’enseignante. L’homme a également déclaré qu’il avait du « respect » pour les enseignants et qu’il avait l’habitude de se mettre d’accord avec « les enseignants, pas (sa) fille » en cas de conflit.

Cammile Bussière

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