Comme c’était périlleux, ce public. Comme c’était inconfortable, la position de Jeff T., l’un des rares collègues de Samuel Paty à avoir « détaché » du professeur quelques jours avant sa mort. Comment supposer « position de principe » qu’il l’a fait il y a quatre ans sans donner l’impression de critiquer Samuel Paty lors du procès de son assassinat ? Comment retourner un » débat pédagogique » entre deux professeurs d’histoire dont l’un a fini décapité ?
Il le savait, Jeff T., en s’approchant du box des témoins de la cour d’assises spéciale de Paris, mercredi 13 novembre, qu’il lui serait impossible d’échapper à cela. piège », comme il le dit. Il n’a jamais parlé depuis quatre ans et il ne parlera plus. « Si je parle aujourd’hui, c’est parce que je n’ai pas le choixprécise-t-il d’emblée. L’islamisme cherche à semer la confusion, à nous faire perdre nos valeurs. Il est impossible qu’un argument venant de ma part aille dans cette direction. »
Pour comprendre l’origine de la polémique survenue dans la salle des profs du collège du Bois-d’Aulne (Yvelines), il faut remonter au 5 octobre 2020, onze jours avant l’attentat. Ce jour-là, Samuel Paty donne un cours sur la liberté d’expression à une classe de 4e. Profitant de la présence d’un assistant scolaire, il a proposé aux élèves qui le souhaitaient de sortir dans le couloir pendant que étaient projetées des caricatures du prophète Mahomet.
« Je n’ai pas changé d’avis »
Le cours n’a pas provoqué de perturbations majeures, mais la mère d’un élève était toujours en colère contre le directeur de l’école du fait que sa fille avait ressenti » victime de discrimination « . Le lendemain, Samuel Paty donne le même cours devant une autre classe de 4e, celle de Z., l’écolière qui a provoqué le drame : cette fois il propose aux élèves qui souhaitent détourner le regard. Mais Z., qui était absente ce jour-là, a nourri son mensonge sur le cours donné la veille, en disant à ses parents qu’elle avait été exclue pour avoir refusé de quitter la salle.
Le 8 octobre, Brahim Chnina, le père de l’écolière, et un militant islamiste, Abdelhakim Sefrioui, s’invitent dans le bureau du directeur et réclament le licenciement du professeur. Le lendemain, la proviseure rencontre les quatre professeurs d’histoire du collège pour évoquer le bouleversement créé par le cours de M. Paty, auquel elle apporte son soutien. Et c’est le 10 octobre que Jeff T. a exprimé son désaccord dans un mail envoyé à plusieurs enseignants : il a expliqué qu’il « dissocier » par Samuel Paty, qui selon lui « fait avancer la cause de la liberté d’expression » et commis un « acte de discrimination ».
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