Les trois avocats de l’ancien président américain se sont montrés offensants envers Keith Davidson, qui défendait les intérêts de l’actrice au moment des faits et a témoigné ce jeudi.
Négociations ou « extorsion » : la défense de Donald Trump a tout fait jeudi 2 mai pour discréditer l’avocat de l’ancienne star du porno Stormy Daniels, cité comme témoin, et à travers lui la transaction au cœur du procès pénal à New York de l’ancien président des États-Unis.
Dans cette affaire aux enjeux politiques énormes pour lui, le candidat républicain à l’élection présidentielle de 2024 est poursuivi pour 34 falsifications de documents comptables.
Ils auraient été utilisés pour dissimuler le versement de 130 000 dollars à Stormy Daniels dans la dernière ligne droite de la campagne présidentielle de 2016, remportée de justesse face à l’ancienne secrétaire d’État Hillary Clinton.
Cette somme a servi à acheter son silence sur une relation sexuelle qu’elle affirmait avoir eue avec Donald Trump en 2006, alors qu’il était déjà marié à sa femme Melania. Une relation que nie Donald Trump.
Des échanges tendus au procès
Durant deux jours d’audience, l’ancien avocat de l’actrice, Keith Davidson, a détaillé pour les jurés les dessous de cette négociation qu’il a menée directement avec l’avocat personnel de Donald Trump de l’époque, Michael Cohen.
Mais sous le regard de l’ancien président, cravate dorée et costume bleu marine, sa défense n’a pas manqué l’occasion de dresser un portrait peu flatteur du témoin et de ses méthodes.
Ce dernier s’était fait une spécialité de monétiser le silence sur les secrets embarrassants de célébrités, pratiques qualifiées d' »extorsion » par l’un des avocats de Donald Trump, Emil Bove, qui bombardait le témoin de questions.
De quoi ravir l’ex-président, qui ne fait que s’agiter et prendre plaisir lorsque ses trois avocats plaident sa cause, comme le constate Benoit Ballet, reporter de BFMTV présent sur place dans la chambre 1530, nichée au 15e étage du tribunal.
Globalement calme, mais avec une expression maussade, l’ancien locataire de la Maison Blanche semblait fatigué le reste du temps.
Au cours d’un échange tendu, Keith Davidson a dû reconnaître qu’il avait fait l’objet d’une enquête fédérale – qui n’a abouti à aucune poursuite – après avoir négocié la vente à l’ancienne star de catch Hulk Hogan d’une « sex tape » le concernant.
« J’ai fait une demande financière » au nom de clients, « je n’ai proféré aucune menace », s’est-il défendu.
L’avocat a également dû admettre qu’il avait dit à Michael Cohen : « S’il (Donald Trump) perd les élections, et il les perdra, nous perdrons tous les moyens de pression ».
Un enregistrement audio accablant réécouté
Finalement, un contrat de confidentialité a été signé le 28 octobre 2016, quelques jours avant l’élection présidentielle.
Les 130 000 $ ont été payés par Michael Cohen, via une société écran. Il s’est fait rembourser en 2017 par la holding de Donald Trump, la Trump Organization, des dépenses comptabilisées comme « frais juridiques », d’où des poursuites pour falsification de pièces comptables.
Michael Cohen, qui dit avoir agi à la demande du candidat, n’a pas encore témoigné. Tout l’enjeu de l’affaire sera de déterminer ce que Donald Trump savait de ces négociations en coulisses.
Jeudi, les jurés ont pu entendre un enregistrement audio, déjà connu, d’une conversation privée où Michael Cohen s’est entretenu avec le candidat républicain à l’élection présidentielle de 2024 au sujet d’un paiement pour obtenir le silence d’une autre femme, le mannequin Karen McDougal. Elle a également affirmé avoir eu une liaison avec le milliardaire.
Des jurés « démocrates à 95 % », selon Trump
En pleine campagne pour son retour à la Maison Blanche, Donald Trump risque dans cette affaire la première condamnation pénale d’un ancien président américain.
Avant la reprise des débats jeudi, le juge Juan Merchan a examiné une nouvelle salve de déclarations débridées du tumultueux candidat à l’extérieur de la salle d’audience, vitupérant contre Michael Cohen, devenu son ennemi numéro un, ou contre les jurés, qualifiés de « 95% Démocrates ».
Les procureurs ont dénoncé de nouvelles violations de l’interdiction prononcée par le magistrat d’insulter des jurés ou des témoins. Un autre avocat de Donald Trump, Todd Blanche, a défendu l’urgence de protéger sa liberté d’expression.
L’implication, « c’est que le jury n’est pas juste », s’est mis en colère contre le juge, qui a prévenu l’accusé qu’il était prêt à l’incarcérer pour qu’il cesse ses attaques. Il n’a pas statué jeudi.
Ces vives critiques ont valu à Donald Trump une amende de 9 000 dollars infligée par Juan Merchan, qui lui a également demandé de « rester raisonnable » pour ne pas en subir une autre, comme l’a souligné Benoit Ballet.
L’ex-président nie s’être endormi en audience
De son côté, Donald Trump a une nouvelle fois évoqué le procès sur son réseau Truth Social, mais pour nier qu’il s’endort pendant l’audience, ce qui semble parfois être le cas lorsqu’il s’enfonce, les yeux fermés, sur son fauteuil.
« Je ferme juste mes beaux yeux bleus, parfois, j’écoute intensément, et j’absorbe tout ! », a-t-il assuré, alors que son procès l’obligeait à se présenter au tribunal trois jours par semaine.
Trois ans après avoir quitté la Maison Blanche dans le chaos, Donald Trump entre en campagne en étant inculpé dans quatre affaires, dont celle devant les tribunaux fédéraux de Washington pour des accusations de tentatives illégales de renverser les résultats de la dernière élection présidentielle remportée par Joe Biden.
Pour rappel, il avait motivé ses partisans à marcher sur le Capitole le 6 janvier 2020, alors que les résultats de l’élection étaient en cours de validation.
Mais en raison d’appels et de questions de procédure, le procès de New York, de moindre ampleur, pourrait être le seul jugé avant l’élection de 2024 prévue le 5 novembre. Les débats reprennent ce vendredi.