Au Maroc, la santé se privatise
Il s’agit de l’introduction en bourse la plus commentée à la Bourse de Casablanca (Maroc) de l’année 2022. Avec 4,5 milliards de dirhams (environ 415 millions d’euros) de souscriptions, soit près de quatre fois le montant demandé, le groupe Akdital, propriétaire du premier réseau de cliniques privées au Maroc, ont réalisé la plus grande levée de fonds que la Bourse ait connue depuis quatorze ans.
Plus de 8 000 transporteurs de 32 nationalités, particuliers et institutions, se sont précipités à l’action. Au prix d’émission de 300 dirhams, son cours s’est depuis envolé, se stabilisant autour de 740 dirhams. Une hausse fulgurante habituellement observée dans l’immobilier ou la construction. « Très peu d’entreprises ont réussi à réaliser de telles performances »souligne Marwane Najimi, analyste chez Sogecapital Bourse.
L’entrée fracassante d’Akdital en Bourse fut – et reste – la première cotation au Maroc d’une société de santé. Le docteur Rochdi Talib, son fondateur et PDG, a détaillé ses besoins de financement aux investisseurs : ouverture de nouvelles cliniques, modernisation des équipements, diversification de l’offre. Avec en ligne de mire un chiffre d’affaires qu’elle prévoit de doubler, pour atteindre 2,2 milliards de dirhams en 2023.
Il s’agissait finalement de « seulement » 1,9 milliard de dirhams, mais le rythme de croissance de ses revenus (+ 500% en quatre ans) a fait d’Akdital, groupe créé en 2017, le symbole de la croissance de l’investissement privé dans la santé au Maroc.
Une porte ouverte aux fonds d’investissement
Il suffit de voir la multiplication du nombre de cliniques privées : moins de 100 en 1990, plus de 400 aujourd’hui, soit près de 90 % des structures de soins primaires du pays. Au total, près de 15 000 lits – soit plus du tiers de la capacité nationale d’hospitalisation –, dont la majorité dans des établissements à but lucratif.
Le constat est frappant : quand le nombre de lits dans les hôpitaux publics a diminué de 1 % entre 2017 et 2022, celui des cliniques privées a augmenté de 50 %. Concernant Akdital, d’une seule clinique en 2017, le groupe est passé à vingt-deux établissements de santé. Et prévoit d’en ouvrir une quinzaine de nouveaux d’ici fin 2024.
Cette accélération sans précédent doit beaucoup à la « loi 131-13 », adoptée en 2015. Ironiquement, c’est un exécutif historique du Parti du progrès et du socialisme, Houcine El Ouardi, alors ministre de la Santé (2012-2017), qui a porté cette décision. texte ayant ouvert le capital des cliniques aux acteurs privés, pour « Rendre le système de santé plus attractif pour les investissements ». Une porte ouverte aux fonds d’investissement.
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