Au Libéria, la partie perdue de George Weah

» Garde la tête haute. Ne pleure pas », exhorte George Weah, les traits tirés et du haut de sa chaire, à ses fidèles encore groggy de l’église de Forky Klon. Malgré le choc de la veille, le pasteur-président-Ballon-d’or n’a pas dérogé à sa messe dominicale, dimanche 19 novembre. Quelques heures plus tôt, il avait concédé sa défaite face à Joseph Boakai au second tour de l’élection présidentielle. au Libéria. » Certains demandent : mais pourquoi l’avez-vous appelé ? Je ne l’ai pas fait pour moi mais pour la paix », dit-il sous des applaudissements.
Mais la prédication pacifiste prend soudain une tournure vindicative. À son rival qui avait promis de scruter la gestion de l’argent public dans le cadre de son mandat, le président sortant a déclaré : « Lancer une chasse aux sorcières contre mes fonctionnaires et moi-même risque de faire dérailler la paix pour laquelle nous avons travaillé. » rappelle ensuite, un peu menaçant, que lorsqu’il succéda à Ellen Johnson Sirleaf, dont Joseph Boakai fut vice-président de 2006 à 2018, « au nom de la paix, nous n’avons pas attaqué les anciens dirigeants. Boakai doit maintenir la paix « .
L’heure des comptes attendra sans doute. Pour le moment, les Libériens profitent du fair-play du président défait. Vendredi soir, avant l’annonce des résultats définitifs par la commission électorale, George Weah a appelé Joseph Boakai pour le féliciter. Puis, dans un discours diffusé quelques minutes plus tard à la radio nationale, il a demandé à ses partisans de » Rentrer à la maison « . Cette sortie élégante a été salutaire pour le Libéria, tandis que les cadres de son parti l’ont encouragé à s’accrocher au pouvoir et ont rehaussé son image profondément écornée. La célébration a cependant été ternie par un incident encore inexpliqué : une voiture a foncé lundi soir sur des partisans du président élu, faisant au moins trois morts.
« En mode pilote automatique »
En le mettant à l’écart après un seul mandat – une première dans l’histoire du pays – les Libériens ont exprimé leur immense déception, à la hauteur des espoirs trop élevés placés dans ce président ultra-populaire dans tous les sens du terme. En 2017, déjà face à Joseph Boakai, ils ont élu avec plus de 61 % des voix celui qui avait tout réussi malgré ses origines modestes.
Il porte alors en lui la vengeance de « indigènes »les peuples autochtones exclus du pouvoir par l’élite américano-libérienne depuis la création du Libéria au milieu du XIXe sièclee siècle. Né en 1966 à Santa Clara, l’un des innombrables townships de Monrovia bâtis sur des marécages, George Weah a démontré très tôt un talent pour le football.
Il vous reste 75% de cet article à lire. Le reste est réservé aux abonnés.
gn world