Des commerçants, des femmes et des enfants du camp de réfugiés palestiniens de Beddawi se sont rassemblés le long des allées du marché pour assister au passage du cortège. En milieu d’après-midi, vendredi 18 octobre, une heure après que le Hamas a confirmé la mort de son chef, Yahya Sinouar, dans la bande de Gaza, ses sympathisants se sont rassemblés dans ce camp de Tripoli, au nord du Liban, pour commémorer la « martyr ». Des responsables du Fatah, le parti rival du président Mahmoud Abbas, se sont joints à eux pour montrer leur respect à cet égard. « figure de la résistance palestinienne ».
Depuis les balcons, à travers les boules de fils électriques suspendues entre les immeubles, des femmes lancent du riz sur les plusieurs centaines d’hommes et d’enfants qui défilent. Au son des chants d’éloge du Hamas et de la résistance palestinienne, crachés par les haut-parleurs d’un coursier, des adolescents mènent la marche avec un portrait géant de Yahya Sinouar et des drapeaux des Brigades Ezzedine Al-Qassam, la branche armée du Hamas. Les visages sont sérieux mais aucune manifestation, ni de joie ni de colère, ne traverse l’assemblée.
« Il est mort comme il le voulait : en combattant. Ce n’était pas caché sous terre. Il se trouvait dans le quartier de Tel Al-Sultan à Rafah, où les Israéliens continuent de bombarder. J’aurais donné la vie de mon fils au lieu de la sienne. Même les gens du camp qui n’aimaient pas Sinwar politiquement le respectaient pour cela et pour ce qu’il avait fait pour la Palestine. »» clame Moustafa, un sympathisant du Hamas de 43 ans, qui a refusé de donner son nom de famille.
Le portrait de Sinouar bientôt partout à Beddawi
En diffusant des images des derniers instants de Yahya Sinouar, l’armée israélienne a, sans le vouloir, décuplé la force de la légende du leader du Hamas. Son portrait sera bientôt placardé partout à Beddawi, avec ceux d’Ismaïl Haniyeh, son prédécesseur, et de Hassan Nasrallah, le chef du Hezbollah, tué avant lui par Israël. La mort au combat de l’architecte de l’opération « Inondation d’Al-Aqsa », le 7 octobre 2023, qui a fait plus de 1 200 morts en Israël, force le respect même des voix les plus critiques au sein du camp. . Certains expriment néanmoins leur scepticisme quant à la stratégie du Hamas, compte tenu des ravages infligés par Israël à l’enclave palestinienne et de la mort de 42 000 Gazaouis au cours de l’année écoulée, selon les chiffres du ministère de la Santé de Gaza corroborés par les organisations humanitaires.
« Yahya Sinouar est un résistant comme tout le peuple palestinien, mais le Hamas essaie toujours de se mettre en avant »» critique Shadi Marzouq, un dirigeant local des Brigades des martyrs d’Al-Aqsa, liées au Fatah. « L’opération « Inondation d’Al-Aqsa » a été une erreur car elle est liée à l’Iranpoursuit ce combattant de 44 ans, dont la famille est originaire de Galilée. Il a détruit la bande de Gaza et tué de nombreux innocents. Il nous faudra cent ans pour reconstruire Gaza. Mais nous n’avons plus rien à perdre. Tous les Palestiniens veulent mourir en martyrs pour récupérer leur terre. Au Liban, les réfugiés n’ont pas de vie : ils ont faim, ils vivent dans des conditions déplorables, ils n’ont aucun droit. »
Il vous reste 58,51% de cet article à lire. Le reste est réservé aux abonnés.