au coeur de la crise, les SCPI attendent avec impatience la baisse des taux
Il y a un air de traversée du désert chez les SCPI (sociétés immobilières cotées). Alors que l’année 2023 a été marquée par la baisse de la valeur des actions d’une vingtaine d’entre elles (sur 215 existantes sur le marché), avec une baisse moyenne de 11%, signifiant une perte sèche pour les investisseurs, le début de l’année semble avoir été du même présage. Référençant une centaine de SCPI parmi les principales du marché, le site MeilleureSCPI.com a identifié des baisses de parts dans 8 fonds au cours du premier trimestre 2024 et dans 2 au cours du deuxième.
Pour rappel, les SCPI sont composées de trois parties : un portefeuille immobilier, une société de gestion et des investisseurs particuliers ou professionnels qui confient leur argent au gestionnaire pour investir dans l’immobilier en échange d’une partie des loyers et des plus-values. Pour investir dans ce placement, les particuliers et les professionnels de la finance doivent acheter des actions, qui correspondent à une partie du portefeuille et évoluent donc en fonction de la valeur de ce dernier. Ce sous-jacent a cependant beaucoup souffert avec la crise immobilière de 2023 qui a vu nombre de biens voir leurs prix baisser, notamment ceux dédiés aux professionnels (bureaux, commerces, logistique, etc.).
Si » nous arrivons à la fin des annonces de baisse de partage », estime Jonathan Dhiver, fondateur de MeilleurSCPI.com, interrogé par La galerieles annonces en chaîne ayant eu lieu au cours de l’année 2023 et début 2024 ont effrayé les investisseurs qui se méfient désormais du papier-pierre.
Gel des encaissements et des transactions
Ainsi, sur l’année 2023, la collecte nette des SCPI a connu une forte baisse à 5,7 milliards d’euros, contre 10,1 milliards pour l’année 2022, selon les chiffres de l’Association française des sociétés d’investissement. immobilier (Aspim). Et les professionnels du secteur confirment qu’ils ont“ j’ai toujours du mal à récupérer », confie Philippe Cervesi, président de la SCPI gérante Corum AM. Une situation qui touche pourtant bien plus les grandes SCPI bancaires que les petites indépendantes selon Jonathan Dhiver. » Ces derniers réussissent quand même parce qu’ils n’ont pas baissé leurs actions, ni même réussi à les augmenter, et ont su bien communiquer pour rassurer leurs investisseurs. », précise le spécialiste papier de l’immobilier.
Il n’en reste pas moins qu’il y a un manque d’argent frais, et que de nombreuses sociétés de gestion n’ont aujourd’hui pas les moyens d’acquérir de nouveaux biens… provoquant ainsi un effondrement des transactions. Seuls 1,6 milliard d’euros ont été investis sur le marché de l’immobilier professionnel (SCPI Playground) sur les trois premiers mois de 2024, contre 4,6 milliards un an plus tôt, selon une étude de BNP Paribas Real Estate Knight Frank. » Si les acheteurs sont revenus au Royaume-Uni, en France ils restent rares », note Jean-François Chaury, directeur général d’Advenis REIM. Une situation stressante pour les vendeurs qui les pousse parfois à rabaisser considérablement leurs marchandises afin de vendre rapidement.
Le spectre de la crise de liquidité
Cette précipitation s’explique notamment par une crainte nouvelle et inquiétante pour certaines sociétés de gestion : le manque de liquidité.
« Dans les SCPI à capital variable, qui sont majoritaires, lorsque le dirigeant ne trouve pas de nouveaux acquéreurs pour ses actions il ne peut pas rembourser les investisseurs souhaitant vendre les leurs », explique Jonathan Divers.
En cas de manque de liquidité, les sociétés de gestion sont parfois contraintes de mettre en place un « fonds de remboursement » qui consiste à vendre des biens en urgence pour trouver du cash… quitte à brader l’immeuble.
Autre option pour ce dernier : activer le « suspension de la variabilité « . Il s’agit de la vente d’actions sur un marché secondaire. Un mécanisme qui désindexe le prix des actions – normalement corrélé à la valeur du parc immobilier – et le fait fluctuer en fonction de l’offre et de la demande, posant toutefois le risque d’une remise sérieuse pour les vendeurs.
Vers une reprise en 2025 ?
Le printemps n’est pas encore arrivé pour le papier de pierre, mais les professionnels du secteur disent néanmoins entrevoir le bout du tunnel. » Le marché devrait se redresser d’ici 7 à 8 mois », précise Philippe Cerversi. Et l’impulsion devrait venir, ni plus ni moins, de la Banque centrale européenne. Pour rappel, cette dernière a relevé ses taux directeurs entre 4% et 4,75% – contre 0% en 2022 – entraînant une hausse du coût de la dette… et une crise du marché immobilier face à la rareté des acheteurs. et à la baisse des prix.
Mais la baisse des taux devient palpable aujourd’hui, avec une première étape attendue pour sa réunion du 6 juin. Cela nous permettra d’avoir une réduction du coût du crédit et donc des capacités de financement plus fortes, ce qui pourrait relancer le marché immobilier. », analyse Jean-François Chaury.
Dans le même temps, les sociétés de gestion attendent un retour des investisseurs puisque la baisse des taux d’intérêt aura également des répercussions sur les obligations et autres comptes à terme, redonnant de l’attractivité aux SCPI qui offrent un rendement moyen de 4,5% selon l’Aspim, et se retrouvent donc aujourd’hui en concurrence avec des investissements peu risqués. » On attend surtout le retour des investisseurs institutionnels (assureurs, fonds d’investissement, ndlr) puisqu’ils investissent de grosses sommes », explique le président de Corum AM. » Mais cela n’arrivera pas avant 2025 », rétorque son confrère d’Advenis REIM.