Attaque au couteau à Annecy : après le drame, l’énième reprise politique indécente de la droite

Est-ce la marque d’un réflexe pavlovien ou le signe d’un profond manque de respect envers les victimes ? Probablement les deux. Comme à chaque attentat, la droite et ses extrêmes n’attendent jamais très longtemps pour incriminer, dans une sorte de 100 mètres de surenchère, les choix de l’Etat en matière d’immigration.
Jeudi, après l’attaque au couteau à Annecy, par un homme de nationalité syrienne, dont les motivations n’étaient pas encore connues, les reprises politiques se sont multipliées dès que sa nationalité a été révélée. A droite de l’échiquier politique, on espère évidemment surfer sur les sondages qui placent régulièrement l’immigration parmi les priorités des interrogés.
Darmanin et la « troublante coïncidence »
Avec ce triste événement, LR a vu l’occasion rêvée de faire avancer ses lubies anti-étrangers en prenant l’opinion publique à témoin, tandis que le groupe de droite déposait deux projets de loi à l’Assemblée nationale pour « mettre fin à l’immigration de masse ». Un texte censé tirer l’herbe sous les pieds du gouvernement, qui doit présenter son propre texte sur le sujet durant l’été.
« L’agresseur d’Annecy était un demandeur d’asile syrien, écrit le patron des sénateurs LR, Bruno Retailleau, sur son compte Twitter. Ces types de cas sont en augmentation. C’est pourquoi il est indispensable que les demandes d’asile soient faites hors du territoire national, comme nous le demandons à LR. La migration laxiste doit cesser !
Même discours pour son homologue à l’Assemblée, Olivier Marleix. L’agresseur vêtu de vert, coiffé d’un turban, serait un demandeur d’asile syrien. L’immigration de masse incontrôlée tue. Plutôt que de déplorer chaque nouveau crime, arrêtons enfin l’immigration de masse ! », il jette. Jamais le dernier à dégainer, le président du parti, Éric Ciotti, n’a pas manqué de souligner : « Un profil issu d’une immigration qui pose aujourd’hui un grand débat. »
Gérald Darmanin, invité jeudi soir du JT de TF1, fait lui le lien entre le refus de la France de lui accorder l’asile et l’attentat : « C’est en effet une coïncidence troublante que dimanche dernier il connaisse la réponse de l’administration française, dans six mois pas d’asile puisque vous l’avez déjà en Suède, et qu’il agisse.
Le plus grand concours d’obscénité
Mais la droite n’est évidemment pas la seule à tirer à vue. Pour jouer au petit jeu de la surenchère, il faut au moins deux personnes. Reconquête et le RN ont rejoint le parti macabre afin de propager leur haine des étrangers. « Après le drame d’Annecy, c’est toute notre politique migratoire, et un certain nombre de règles européennes, qu’il faut remettre en cause. Il faut se donner les moyens d’agir et de reprendre le contrôle d’une situation qui échappe au contrôle du gouvernement. Ce débat est urgent. a réagi le président du RN, Jordan Bardella.
Un élément de langage que l’on retrouve aussi dans la bouche de la députée d’extrême droite Laure Lavalette, qui a accusé, il y a quelques jours, la LR de plagiat sur ses propositions. « On voit bien que cette immigration non réglementée met les Français en danger. Les demandes d’asile doivent être faites en amont, dans les pays d’origine », dit-elle.
Une manifestation d’extrême droite devant le lieu de l’attentat
Éric Zemmour a été l’un des plus prompts à attiser les passions tristes. Le numéro 1 de Reconquest a publié une vidéo sur ses réseaux sociaux. « Avant, les demandeurs d’asile fuyaient pour éviter la mort. Désormais, les demandeurs d’asile quittent leur pays pour mieux tuer nos enfants. Je vous demande : ne vous laissez pas intimider dans les jours à venir. Vous avez le droit de refuser la submersion migratoire. Vous avez le droit de refuser ces francocides », il a osé.
Un collectif d’extrême droite a même manifesté devant le lieu de l’attentat jeudi soir, malgré un arrêté d’interdiction pris par la préfecture. Selon France Bleu, entre 40 et 50 personnes ont répondu à l’appel du mouvement d’extrême droite sur les réseaux sociaux sous le hashtag « Francocide », rassemblés devant l’aire de jeux où plusieurs enfants ont été grièvement blessés. D’après Donatien Huetun journaliste de Mediapart présent sur les lieux, une banderole « arrêter l’émigration » a été déployé.
Une odieuse récupération politique qui n’est pas sans rappeler celle honteusement pratiquée au moment du meurtre de la petite Lola, en octobre 2022.
Grb2