Arthur Teboul et Baptiste Trotignon revisitent des grands titres de la chanson française

Arthur Teboul est le chanteur et parolier du groupe de rock et de pop français Feu! Chatterton, il est également auteur. Baptiste Trotignon est pianiste et compositeur de jazz. Classique, jazz, contemporain, pop britannique, rien ne lui fait peur, tout l’attire et l’intéresse. Ensemble, ils ont créé un album intitulé Voix de pianoou 15 grands titres de la chanson française revisités par leurs deux personnalités. Ils seront en concert à Annecy le 24 septembre, à Noisiel le 25 et une nouvelle date à la Salle Pleyel, à Paris, le 4 décembre.

franceinfo : Ce projet proposé par Baptiste vous a obligé à travailler sans filet de sécurité, sans protection. Il y a eu un point de départ, une émission pour Arte où vous vous êtes rencontrés. Il s’est passé quelque chose et vous avez décidé que l’aventure devait continuer. C’est un peu un filet de sécurité quand même.

Arthur Teboul : Oui, c’est sans filet, mais c’est aussi sans projet. Pour moi, ce projet c’était pour le Piano Day, un événement international autour du piano en 2022, Arte Concert. On avait décidé de reprendre quelques belles chansons du répertoire, mais là c’est 40 minutes. J’avais envie de me confronter à ça après 15 ans de métier avec Feu !

« C’était quand même un gros défi. Ce sont les chansons de mes idoles et la voix au piano, c’est de la nudité totale pour une interprète comme moi qui est habituée à être entourée de beaucoup de monde. »

Arthur Teboul

à franceinfo

On passe un super moment, mais une fois que c’est fini, je suis soulagée. Je me dis ça y est, c’est fini, on ne recommence pas ! Trop risqué et trop dur. Et puis je ne sais pas, quelques jours plus tard, Baptiste, très enthousiaste, me dit : « On a encore beaucoup travaillé, c’était sympa. Faisons d’autres concerts » et je réponds : non, non, non. Cela m’arrangeait de faire une date à la Scène Musicale qui est quand même une belle salle. Je confirme et il ajoute : « Deux rendez-vous ! » et c’est là qu’il y a un changement. L’album est né de ça.

C’est vrai qu’Arthur a une voix particulière, mais en même temps, vous avez un jeu de piano qui devient une vitrine.

Baptiste Trotignon: Ce que j’espère être spécial aussi !

Est-ce difficile d’aller accompagner l’artiste et de trouver le bon son, les bonnes phrases ?

Baptiste Trotignon: Il est vrai que dans la musique classique, la musique contemporaine, le jazz, ou un certain nombre de musiques, le langage est un peu sophistiqué et parfois un peu riche, parfois un peu saturé de richesse. Ce qui m’intéresse aussi lorsque je travaille avec une voix dans le domaine de la chanson, c’est de rechercher une pureté, une simplification au sens noble du terme. Dans un monde où tout est très compliqué, il est bon de temps en temps d’avoir des choses simples.

Arthur, tu es le fils d’un immigré séfarade. Tu as été bercé par le son de la chanson française, notamment de Léo Ferré et de Brassens. On les retrouve dans cet album. J’imagine toute la dimension qu’il doit y avoir autour de ça.

Arthur Teboul : Cet album, c’est d’abord l’envie de partager. La musique et les chansons ont la chance d’être un langage universel. Ce n’est pas parce qu’elles racontent une histoire vraie qu’elles touchent quelque chose dans notre âme, peut-être millénaire. C’est ça la puissance des grandes chansons. On les entend et on s’y reconnaît. On y reconnaît quelque chose de notre humanité, de nous-mêmes. Alors quand on s’est dit qu’on allait reprendre des chansons, on ne pouvait pas faire mieux que de reprendre ces chansons qui sont déjà les nôtres. Avec les mots des autres, on parle de nous-mêmes. »

Ce qui est surprenant, d’ailleurs, quand on regarde attentivement la liste, on a encore La vie en rose de Piaf, Göttingen par Barbara et Bashung avec Pas d’express. Était-ce aussi un besoin d’aller chercher d’autres palettes ?

Arthur Teboul : C’est presque une pirouette, mais on aurait pu l’appeler Autoportraits. Les gens font des portraits chinois. Qu’est-ce qu’un portrait chinois ? C’est dire qui on est à travers les choses qu’on aime, toutes ces choses-là, et il en manque encore ! Ce sont des choses qui font nos univers et notamment pour la chanson, mes sources, celles qui m’ont fait devenir auteur-compositeur. Il y a des choses légères, des choses sérieuses, il y a des choses très anciennes, des choses modernes et à force de faire cet exercice, on a eu plein d’idées et Baptiste m’a arrêté. Donc là, j’ai une liste de 150 chansons possibles pour le futur !

Il y a aussi la scène, c’est ça le but ? C’était le point de départ de pouvoir partager sur scène et d’aller chercher ce son qui est finalement un son live ?

Baptiste Trotignon: En fait, je t’ai un peu poussé à refaire des concerts après le Piano Day, mais tu as été le premier à allumer l’étincelle pour l’enregistrer à la Scène Musicale, dans le mode voyons ce qui se passe. »Ah, peut-être que ça pourrait faire un disque et ce serait moins lourd que d’aller en studio pendant une semaine.« . Et là, on avait deux prises par morceau puisqu’on avait deux soirées.

Arthur Teboul : La preuve c’est que l’album est enregistré en public. C’est en public qu’on livre le mieux ces chansons.

Baptiste Trotignon: Mais quand même, le premier soir de la Scène Musicale, je me souviens qu’on était vraiment paniqués. Après le concert, on s’est dit que c’était un peu tendu et puis on a fait le deuxième soir. On a quitté la scène, on s’est pris dans les bras et on s’est dit : « COk, nous avons le disque !« . Et ce qui est vraiment drôle, c’est que quand on le réécoute, sur l’album, il y a vraiment un mélange d’environ 50/50 des deux soirs. Ça veut dire que dans cette fragilité qu’il y avait dans beaucoup de prises le premier soir, on s’est dit qu’au final c’était mieux.

Arthur Teboul : Certaines pièces méritaient cette fragilité.

Baptiste Trotignon: Mais nous ne nous en sommes pas rendu compte à l’époque.